Cher Journal,
Ça fait neuf minutes que je regarde Castle. Je ne sais pas encore ce que j’en pense, c’est un peu tôt pour avoir une opinion arrêtée sur le sujet, mais je dois quand même avouer ça n’a pas l’air extrêmement positif pour le moment.
Les personnages ne m’énervent pas trop, mais ils auraient du mal parce que pour cela, il leur faudrait me surprendre dans un sens ou dans l’autre, or ils sont si peu originaux que ça me fatigue puissamment. Les premières minutes sont censées nous présenter l’intrigue et les personnages, et c’est bien ce qui s’est passé, comme prévu, mais justement tout me semble prévisible au plus haut point, et ça me décourage un peu. Rien qu’un peu. Je tiens bon, même si les minutes s’écoulent, et si rien ne vient provoquer chez moi le moindre soubresaut de sourcil.
Evidemment le personnage principal est un arrogant bon à baffer mais au charme ravageur, avec un don qui peut servir à résoudre des enquêtes (le pitch nous avait prévenus mais on avait droit à encore un peu d’espoir, non ?), évidemment l’enquêtrice qui va devoir collaborer avec lui est revêche mais seulement en apparence, évidemment le personnage principal est entouré dans sa vie privée de caractères bien trempés pour réussir à lui donner la réplique mais sans jamais l’éclipser, comme sa mère (qui rappelle Mona de Madame est Servie), sa fille (la sempiternelle ado trop intelligente pour son âge), son ex-femme (à laquelle comme par hasard il est toujours contraint d’être mis en contact et donc avec laquelle il y a échange de piques), etc…
Cher Journal,
Nous en sommes à la vingtième minute de Castle, et rien à faire, je n’ai toujours pas été surprise une seule fois. Je commence à atteindre un stade de désespoir assez affligeant qui, me dit mon entourage, se lit sur mon visage, et ce n’est pas bon signe.
Evidemment, arrivés à la moitié de ce pilote, on a un suspect pour les meurtres, mais de toute évidence, ça ne convient pas au personnage principal, et comme les scénaristes sont dans son camps, et que bien-sûr il reste encore une moitié d’épisode devant nous, on sait qu’il a raison et que les doutes qu’il a émis vont comme par hasard être justifiés. Ce qui poussera probablement la fliquette à devoir faire amende honorable à un moment ou un autre avant le générique de fin. On a tous hâte de la voir faire ses excuses à ce prétentieux plein de muscles, parce que, tant qu’à être prévisible, autant faire le grand Schelem.
Cher Journal,
C’est la vingt-deuxième minute et je constate que j’ai pas eu la berlue, j’ai bien vu le nom de Stephen J. Cannell dans les crédits, en effet il est là, juste devant moi, en train de taper la discut’ avec Nathan « take that f*cking shirt off » Fillon. Je crois bien que c’est la première bonne nouvelle de ce pilote.
Sur le fond, on se contente d’expliciter ce que les spectateurs les moins habitués au genre (et pourtant on a tous été bien entrainés ces dernières années, vu le nombre de séries policières qui ont précédé et dans les pas des quelles Castle marche avec une prudence de Sioux) n’auront pas encore compris : non, l’enquête ne s’arrêtera pas là. Nathan n’a toujours pas tombé la chemise (il rajoute même une veste dans la scène suivante), on ne voit plus Cannell, et les choses continuent d’être prévisibles. Dommage, l’espace d’un instant j’ai presque failli être intéressée par ce que je voyais…
Cher Journal,
La trente-troisième minute de Castle est révolue et, comme par hasard, on a un nouveau suspect, avec un nouveau mobile, etc… ainsi que le personnage principal l’avait prédit, mais d’un autre côté que pouvions-nous espérer d’autre vu que la série porte son nom ?
Ce qui semble logique puisqu’on est entrés dans les dix dernières minutes de l’épisode, pendant lesquelles le personnage principal et sa partenaire improvisée continuent de se fritter gentillement alors qu’il est évident à ce stade qu’ils sont compatibles professionnellement… et sur d’autres plans qu’on va prendre le temps d’explorer, à n’en pas douter, dans les épisodes à venir, on a déjà tout ce qu’il faut comme prémisses à ce sujet et c’est pas le tout, maintenant on a une enquête à boucler. Quand elle devra admettre qu’il n’a pas été complètement mauvais sur cette enquête, de toutes façons, on aura les violons, alors bof…
Cher Journal,
C’est exactement au moment où on a passé la trente-huitième minute que j’ai su que c’était mon premier et mon dernier épisode de Castle. Un personnage prévisible, des enquêtes prévisibles, des actions prévisibles, des dialogues prévisibles, rien à faire c’est irrécupérable.
Par un incroyable concours de circonstances qu’on n’avait pas vu venir, parce qu’on vit dans une grotte et qu’on n’a jamais vu une série de CBS (et quand ABC se met à copier CBS, on sait qu’on est vraiment dans le pétrin jusqu’au bout), le personnage principal a retrouvé l’inspiration dont on avait explicité qu’elle lui manquait récemment, et que cette inspiration ne va pas sans un partenariat entre la fliquette et l’écrivain. Permets que je n’exulte pas de joie, hein.
Cher Journal,
L’épisode est fini, Nathan Fillon n’a pas eu une seule fois la bonne idée de retirer sa chemise, ou même simplement se mettre en valeur dans un tissu moulant, on n’a plus jamais revu Stephen J. Cannell et je n’ai pas été surprise une seule fois.
Tu comprendras donc qu’il n’y aura pas d’autre message à propos de Castle dans ces pages.
Même si tu apprends par hasard que Castle retire sa chemise à un moment donné, tu n’en reparleras pas ? (Bon, je dis pas que tu pourrais regarder parce que ce genre de scène, ça se retrouve sur la toile, sans contexte et tout, donc plus besoin de regarder l’épisode mais quand même ! )