Chaleur dans ton corps

30 août 2015 à 12:00

LastDaysofSummer-650

Quand hier j’ai donné le coup d’envoi de ces derniers jours d’été, sous le signe des séries américaines des années 90… bah je vous ai menti. Parce que la série d’aujourd’hui n’est qu’à moitié américaine, et l’autre moitié, eh bien, c’est encore nous Français qui en portons la responsabilité, comme souvent en matière de grosse bouse télévisuelle des années 90. Et en plus elle est entièrement tournée sur les plages mexicaines, alors bon, elle n’est étasunienne que de loin. Du coup, je sais pas si je vous souhaite la bienvenue dans la deuxième partie de nos adieux à l’été ?
Au menu ce midi : une review du pilote d’Agence Acapulco ! Qui est un épisode double, mais je me suis sacrifiée… euh, on avait dit quoi ? Ah oui : pour la science.

Pendant les années 90 (des temps troublés, assurément), ma sœur était totalement fan de cette série. Moi, c’était plutôt Pacific Blue, j’ai eu l’occasion de vous le dire hier. Bah je veux pas me vanter, mais les décennies m’auront donné raison : entre deux séries aux exigences basses, la mienne était la moins pire.

Dans le pilote d’Agence Acapulco, nous sommes invités à suivre les aventures de la H.E.A.T., soit « Hemisphere Emergency Action Team », une équipe d’agents secrets mandatés par une organisation internationale, le C5, et basée à Acapulco (Acapulco H.E.A.T., donc, ça tombe bien c’est le titre américain). Les premières minutes de l’épisode, d’une durée double, je le rappelle pour ceux dans le fond qui n’ont pas encore commencé à m’ériger une statue, nous martèlent le mot « heat » à toutes les sauces : du générique, qui hurle « I feel the heaaaaaaaat !« … à Ashley, qui sert de narratrice et prononce ce terme aussi souvent qu’humainement possible, généralement pour faire un jeu de mot pourri.
Par exemple, comme l’équipe de la H.E.A.T. est essentiellement composée d’intellectuels, c’est également le nom qu’ils ont donné au magasin qui leur sert de couverture : « Acapulco H.E.A.T. Beach Fashions ». GÉNIE DU CAMOUFLAGE.

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Ladite boutique est spécialisée en bikinis, supposément conçus par Ashley et… on sait pas trop quel job tiennent ses autres comparses, mais une fois de temps en temps, il y a un défilé de maillots et du coup ils peuvent jouer aux mannequins. C’est particulièrement subtil. Bon, allez, ne boudons pas notre plaisir : c’est la raison pour laquelle je parle d’Agence Acapulco dans le cadre de notre petite thématique ; les vues des bikinis, c’est l’argument de vente essentiel de la série. Même les méchants portent des bikinis ! Enfin, les méchantes ; pas les hommes, faut pas pousser. Mais ils ont souvent la chemise ouverte, si ça vous console.

Si seulement nos ennuis s’arrêtaient là, d’ailleurs. Car les gros plans sur les maillots de bain (en mouvement, en train d’être ajusté, etc., vraiment il y a de la variété) sont peut-être gratuits, mais au moins, il sont réuss-… pas ratés. J’aimerais pouvoir en dire autant de tout le reste.

Pour commencer les hostilités : les dialogues sont d’une indigence rare, et débités avec l’aisance d’un éléphant en bikini dans un magasin de porcelaine. On s’y fait tout expliquer trois fois, sans aucune raison. Mais ce n’est rien à côté des contorsions qu’opère le scénario pour créer des scènes « inédites » et « originales ». Il y a un passage, je vous jure sur la tête de Lee Pace, un des personnages doit couper les fils d’une bombe avec… une pince dans chaque main ET UN COUPE-ONGLES DANS LA BOUCHE. Sérieux, j’ai assisté à cette scène, je la raconterai à vos petits-enfants, quelqu’un DOIT témoigner.
Agence Acapulco n’a pas vraiment engagé la crème de la crème, et la plupart de ses personnages sont incarnés par des acteurs d’ordinaire plutôt sollicités pour des rôles muets : playmate, habitué des films d’arts martiaux, et ainsi de suite. On cause quand même d’une série qui a eu la lumineuse idée d’engager Fabio pour incarner le riche propriétaire d’un complexe hôtelier ; d’un autre côté je reste admirative d’un type qui a su bâtir une carrière entière sur des couvertures de romans à l’eau de rose et des cheveux longs. Mais ça vous donne une idée du niveau.
Les acteurs qui parlent le plus dans Agence Acapulco sont les interprètes d’Ashley et Mike, les deux patrons de la H.E.A.T. qui passent le plus clair de leur temps à flirter l’un avec l’autre, ainsi qu’à aboyer des ordres au reste du cast tout en essayant d’expliquer la trame de l’intrigue à des spectateurs vraisemblablement présumés idiots. Ce sont, accessoirement, les deux seuls acteurs à avoir plus ou moins une vraie carrière d’acteurs, on retrouvera d’ailleurs l’un d’entre eux dans Oz par la suite. En tous cas, il est clair vu la composition du cast (absolument pas dirigé d’ailleurs) et les contingences pseudo-narratives de la série, qu’Agence Acapulco part de zéro pour essayer de nous couper le souffle quant aux aventures de ces agents secrets, et que ce n’est donc pas du tout gagné d’avance.

Surtout qu’il faut encore ajouter à ça un autre problème : cette production est totalement fauchée, et ça se voit.
Déjà les décors sont une bonne indication du problème. La salle secrète de la H.E.A.T. est vide (ya presque un écho), moche, mal pensée. Les ordinateurs incroyables qu’utilise la geek sont en fait en carton-pâte et, quant elle appuie sur des boutons pour se connecter « au satellite », on voit le carton trembler. Les visuels sur les écrans sont infâmes, genre Blue Screen of Death. D’une façon générale, la conception qu’a la série de la technologie est navrante, mais admettons.
Par contre, la prise de son est odieuse, et ça c’est plus grave. Par exemple, en plein milieu d’une scène, on va avoir un fond sonore bruyant, sans raison. Du coup, il arrive que des dialogues soient masqués par la musique, ou les bruits de la circulation, ou les cris de la foule, ou encore la turbine de la caméra (…ou n’importe quelle combinaison de ces 4 ingrédients de cauchemar). Et tout est à l’avenant ! Personne n’a pris le temps d’essayer de faire de la post-prod sur ce double-épisode… et de toute façon yavait rien à sauver, vu que la réalisation est naze aussi.
Ainsi, dans les scènes de foules, les gens passent devant la caméra pendant des plombes, y compris lors des scènes importantes type course-poursuite, mais c’est pas grave, roule ma poule. Visiblement on ne pouvait pas payer de figurants, alors faisons avec ce qu’on a (soit : rien). On réutilise des plans comme des va-nus-pieds, genre personne allait le voir ; je sais pas moi, je vous force à faire un double épisode, peut-être ?! Certains autres plans sont longs sans raison (et je ne parle pas que des plans-bikinis), et se passent généralement en silence, avec un acteur qui fait vaguement un truc mais allez savoir quoi, sans aucune ligne de dialogue ni aucune musique d’ambiance, du coup on sait pas ce qu’on regarde, on sait juste qu’on se fait chier…
Oh putain, et me lancez pas sur la musique : c’est une catastrophe. De temps à autres, une vilaine chanson bas-de-gamme marque le début d’une scène (souvent d’action), mais le reste du temps, on entend juste les cameras tourner, si on a la chance d’être en intérieur. Et ça rend toutes les discussions 712 fois plus nulles, alors que le scénario est déjà largement impotent par ailleurs.

Si Pacific Blue avait parfaitement réussi à digérer et réutiliser les codes du clip musical malgré son scénario inepte, Agence Acapulco est son antithèse. Tout y est une purge. Aucun sens du rythme, de l’image, de la musique. Rien. Je sais que c’est une série de syndication aux USA, mais quand même, quel fiasco.

J’aimerais vous dire qu’entre l’amateurisme, la bêtise et le ridicule, le pilote d’Agence Acapulco a UNE qualité rédemptrice, mais un sosie l’irritante et over-the-top Jaime Murray y apparaît en guest. Que suis-je supposée dire après ça ?! L’intégralité de la chose est tellement pourrie que je suis étonnée que le générique de fin ne soit pas rempli d’Alan Smithee. Fichu double épisode, tiens. Fort heureusement, ça ira mieux demain.
…Je crois ?

par

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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