Je vous l’accorde, on a déjà parlé de beaucoup de premiers épisodes de série ce mois-ci, festival oblige. Et pourtant, ya du rab, je vous le mets ? Cette troisième édition de Take Five inclut en majorité des formats assez courts (une demi-heure environ), parce que, ma foi, ça a été ma priorité ce mois-ci. Cependant je vous rassure, il n’y a pas que ça, et on se retrouve avec une sélection plutôt hétéroclite à nouveau !
Animal Control (2023)
Je commençais à voir sur Twitter des retours positifs de la part de quelques critiques américaines… et une fois devant l’épisode, j’avoue que j’ai été un peu désarçonnée. Ce n’est pas mauvais, mais ça n’a rien de génial non plus. Le premier épisode est assez conventionnel, à plus forte raison parce que Joel McHale est en train de se transformer en one trick poney qui explore toujours la même palette sans jamais sembler y ajouter quoi que ce soit ; qu’est-ce qui différentie son personnage ici de son personnage dans Community ? Franchement, le décor, les autres personnages, bref, tout ce qui lui est extérieur. Mais lui, non. Ou alors par quelque miracle dans les épisodes suivants ? Il est important de noter que sur le principe, je ne suis pas opposée à ce que certaines interprètes choisissent (ou se laissent enfermer…) dans des rôles similaires, pourvu d’en faire quelque chose. Un exemple que je prends tout le temps est celui de Matthew Perry, qui au fil de ses personnages pourtant souvent similaires a exploré des nuances variables : plutôt le deuil, plutôt la colère, plutôt l’addiction… si bien que même quand les personnages répondent plus ou moins à la même fiche descriptive, on n’a pas l’impression que l’acteur se répète. Un acteur n’a pas à être un caméléon capable de tout jouer, mais il faut a minima qu’il arrive à éliminer tout soupçon de fainéantise…
Et même sans parler de lui, l’humour de la série m’a laissée indifférente. A la grande rigueur, j’aime bien le côté positif du protagoniste incarné par Michael Rowland (pardon, j’ai pas retenu les noms des protagonistes et j’ai la flemme d’aller regarder IMDb juste pour ça), qui à mon sens aurait été un personnage central un poil plus intéressant (et qui oriente certaines scènes vers une sorte de Ted Lasso sans sucre). Mais bon, dans l’ensemble il n’y a pas de quoi fouetter un chat. Contente de retrouver Vella Lovell, cela dit.
Machos Alfa (2022)
Comme le mois a été chargé par ailleurs, j’ai surtout testé des séries d’une demi-heure en mars… et ça m’a menée à Machos Alfa, une comédie de Netflix lancée fin décembre, et qui très franchement n’aurait jamais figuré parmi mes priorités sans ces circonstances très précises. La série s’intéresse à quatre potes dans la quarantaine environ, qui se retrouvent tous ensemble à suivre un séminaire de déconstruction de la virilité toxique. Bon, pourquoi pas.
Sauf qu’évidemment Machos Alfa n’a pas vraiment envie de parler de ces mecs comme de gens qui ont quelque chose à apprendre. Tout le premier épisode est en fait tourné comme non pas une explication de la raison pour laquelle ils ont décidé de suivre ce séminaire (et supposément de se remettre en question), mais surtout comme une victimisation. La backstory de chacun est détaillée, et finalement accrédite la thèse de l’un d’entre eux (pourtant présenté comme le plus sexiste) que leur tort principal dans ce monde moderne est d’être des hommes. L’un perd ainsi son boulot au profit d’une femme, un autre qui voulait demander sa compagne en mariage se voit proposer une relation plus ouverte, un troisième est hanté par son ex-femme après que leur fille ait décidé de venir vivre avec lui, et le dernier… le dernier a pour tort essentiel de n’avoir apparemment pas envie de coucher avec sa femme (quoiqu’il y ait éventuellement une discussion à avoir sur le consentement pendant une scène, mais la série s’en contrefout parfaitement, elle). Oui, je, euh, moi non plus je vois pas forcément le rapport avec la masculinité.
En tout cas, dans tout cela, on va évidemment suivre l’aventure de leur point de vue, pas celui des femmes dont ils empoisonneraient la vie au point de mériter une remise en question. Si bien qu’au lieu d’avoir l’impression qu’ils doivent comprendre les rapports femmes/hommes modernes, on a l’impression que c’est plutôt le monde qui ne les comprend pas. Les protagonistes féminines qui les entourent sont en outre assez caricaturales, ce qui n’aide en rien. Une fois cet épisode introductif fini, d’ailleurs, on ne sait toujours pas vraiment comment ils ont atterri dans ce séminaire. Est-ce qu’à un moment ils vont sincèrement vouloir apprendre quelque chose ? Rien n’est moins sûr pour le moment, tant ce qui anime Machos Alfa est le même refrain que tant d’autres séries avant elle. Mais je ne saurai jamais comment la série amène le sujet, parce que le reste des épisodes a promptement été effacé de mon disque dur.
School Spirits (2023)
Je n’ai eu de temps que pour le premier épisode (et ce sera encore le cas pendant quelques temps…), mais j’ai très envie de voir la suite de School Spirits. Je sais, je suis la première surprise, mais que voulez-vous, je suis curieuse. Parce que des séries comme celle-ci, avouons-le, ce n’est pas particulièrement exceptionnel : l’idée qu’une personne décédée s’interroge sur les circonstances de sa propre mort a fait l’objet de plusieurs autres séries (Beau Séjour, par exemple, me vient à l’esprit… sans jeu de mots). Ce n’est même pas particulièrement unique dans le contexte de la vie lycéenne… d’ailleurs si vous n’avez pas eu l’occasion d’y jeter un oeil, Class of 1970 est très courte et tous publics (elle fait partie de cette nouvelle génération de webseries pour la jeunesse qui remuent un peu les standards du genre).
Toutefois School Spirits met en place certains paramètres intéressants. Ce qui m’intrigue principalement, c’est ce groupe de parole de l’au-delà, dans lequel plusieurs personnes décédées dans le même lycée au fil des décennies se retrouvent à essayer d’avancer vers le « stade suivant ». Naturellement notre héroïne y est hermétique au début, mais la présence de cet aspect, ainsi que les tropes mobilisés autour de sa mise en place, promettent une piste introspective. Et pour ce genre d’enquête post-mortem, c’est assez rare ! Alors certes, cette introspection peut n’être que secondaire, mais elle est là, et cette partie me rend très curieuse, je n’y peux rien. Je vous mets School Spirits dans cette review « Multi » pour le moment, mais je vais essayer d’y revenir dés que possible. Ou disons, me connaissant : avant la fin de l’année. J’essaie d’arrêter de promettre des trucs.
Souq El Kanto (2023)
Se déroulant dans différents magasins d’un souk, ce gigantesque ensemble drama propose de suivre les destins de plusieurs personnes pendant les années 20. Le personnage central est Taha El Amash, dont l’oncle Shehata dirige l’un des commerces de tissus les plus importants du souk. Outre les affaires familiales, Taha s’occupe également d’un petit business illégal, puisqu’il a organisé une distillerie clandestine. Avec toute sa famille, il attend des nouvelles de Sahed, son frère qui est parti à la guerre, et que nul n’a revu depuis qu’il a disparu dans les tranchées en Europe. Un peu plus loin dans le même marché, la couturière Rawia n’en peut plus de son travail ; employée par Madame Mary, une vieille dame aux goûts très conservateurs et obsolètes, elle voudrait travailler sur la mode, la vraie : des robes modernes, plus courtes, plus colorées. Lorsqu’un de ses collègues lui apprend qu’il est entré en possession de robes venues d’Europe, elle commence à envisager de se mettre à son propre compte pour les vendre et ainsi fonder son propre atelier, ce qui évidemment n’est pas du goût de Madame Mary lorsque la rumeur lui parvient. Il faut aussi compter sur Fatma, l’épouse de Sahed qui l’attend chez les El Amash ; Gaber, surnommé « l’Etranger », qui semble être le parrain local ; Rashad, un voleur et employé d’un concurrent des El Amash dans le domaine textile ; Elwan, qui assure la « sécurité » des boutiques (bref, les rançonne) ; et plusieurs autres personnages mineurs, mais qui créent un patchwork assez large.
On aura l’occasion de reparler de séries du Ramadan en avril (du moins je l’espère, car avec Canneseries la période sera chargée !), mais je n’aurai sûrement pas grand’chose de plus à dire de Souq El Kanto, dont le premier épisode, juste en-dessous de 35 minutes, remplit purement ses fonctions d’exposition. Il ne s’y passe pas grand’chose d’autre : on n’a pas le temps. Il y a beaucoup de personnages à mettre en place (même si pour certaines je n’ai pas forcément compris tous les tenants et aboutissants : Aesha est-elle la sœur ou l’employée de maison de Taha, par exemple ?). Certaines rivalités sont en outre établies, ce genre de choses. C’est du primetime soap, ni plus ni moins ; apparemment au moment de la sortie de son tout premier trailer, la série a été pas mal comparée à Peaky Blinders, mais l’ambiance y est moins glauque, et légèrement moins criminelle, aussi. Au moins pour le moment. Mais c’est sûr que quiconque a aimé la série britannique ne serait pas déçue par Souq El Kanto. En plus, les décors (une partie en prise de vue réelle, mais avec un peu d’effets spéciaux pour les plans les plus larges) ne sont vraiment pas dégueulasses.
Sullivan’s Crossing (2023)
Tout part de Maggie Sullivan, une neurochirurgienne dont la carrière à Boston est en plein essor, mais qui, le soir de la remise d’une récompense professionnelle, est arrêtée par le FBI en même temps que son patron. Celui-ci est en fait l’unique responsable de leurs déboires juridiques, mais ça n’empêche pas la carrière de Maggie de passer au point mort. Elle décide donc de partir passer un peu de temps dans sa ville natale, en Nouvelle-Ecosse, où est resté son père surnommé Sully (joué par Scott Patterson ou plutôt par Luke, c’est exactement le même perso avec 20 ans de plus). Or, elles ne se sont pas revues depuis que Maggie avait 15 ans (apparemment ça s’est même très mal passé), et elles ne sont plus aussi proches que lorsqu’elle était enfant. Dans le petit patelin canadien où vit Sully, et où il tient un camping (« Sullivan’s Crossing », donc), tout le monde connaissait Maggie, mais évidemment le temps a passé et elle réalise dés les premières heures de sa visite qu’elle ne s’y sent plus chez elle ; elle fait en outre la connaissance de Cal, qui donne régulièrement des coups de main à son père et avec lequel, immédiatement, elle ne s’entend pas du tout.
Sullivan’s Crossing se rend coupable d’un trope que je déteste : cette idée du retour au bercail comme impératif pour se redécouvrir et réaliser qu’en fait le bonheur a toujours été là, simple, chaleureux, parfait. C’est un cliché agaçant mais que le public originaire des petites villes aime bien qu’on lui raconte sur lui-même… Comme tant d’autres séries en son genre, Sullivan’s Crossing prépare en outre le terrain pour une romance (clairement pas débutée sous les meilleurs auspices) qui a tout du cliché également. C’est supposé être très feelgood, à croire qu’on ne peut pas faire des choses nouvelles en même temps qu’on réchauffe le cœur des spectatrices ; pour moi c’est de la paresse, mais bon, chacune voit midi à sa porte.
Le premier épisode passe le plus clair de son temps à faire l’inventaire de toutes les personnes que Maggie a autrefois connues, mais avec lesquelles, occupée qu’elle était par ses études puis sa carrière, elle n’a jamais pris la peine de garder contact, et qui le font plus ou moins gentillement remarquer à la protagoniste pendant que celle-ci passe de scène en scène avec un air excédé. En fait c’est sûrement la seule chose qui est surprenante, dans cet épisode : Maggie est clairement mise en place comme l’héroïne de la série, mais cette dernière se montre absolument incapable de nous la rendre sympathique. C’est comme si d’emblée, on adoptait le point de vue des gens de Timberlake (oui, c’est le nom de la ville où est situé le camping…). Pour vous donner un exemple, il y a toute une scène dans laquelle elle rencontre un homme désorienté ; son premier réflexe est de vouloir le soumettre à une évaluation cognitive, en dépit de tout le monde qui lui dit de laisser pisser ; et Maggie est là, genre « mais attendez, moi je sais mieux, je suis neurochirurgienne moi » alors que bah, c’est un gars du village, tout le monde le connaît, t’aurais pu poser des questions avant de faire la grande. Bref. Vous voyez le tableau.
En un sens, c’est risible, parce que Sullivan’s Crossing veut aussi nous donner l’impression que la vie de Maggie prend l’eau de toutes parts et que c’est la galère, mais on ne peut pas dire que ça nous intéresse ; et du coup, les perspectives pour Maggie de s’adapter à nouveau à la vie dans cette petite ville apparaissent moins comme une expérience transformatrice qu’une épreuve d’humilité. Au juste je ne suis pas complètement certaine que Sullivan’s Crossing soit la série qu’elle ambitionnait d’être, en fait.
Mais assez parlé de moi. Vous avez testé quoi, ce mois-ci, comme séries ?
Dans ma grande superficialité j’avoue que les costumes de Souq El Kanto ont retenu mon attention… (il faudrait aussi que je revienne un jour à Peaky Blindes, du reste)
Et j’aime bien ta description de School Spirits. Faut dire que dès que ça cause esprits et tentative d’accepter la mort, moi, hein… peut-être plus tard. Comme tu sais, j’ai comme un continent de prédilection et j’ai déjà tellement que j’ai envie de voir (et revoir) de ce côté-là…
En ce moment cela dit (pour répondre à ta question) j’ai commencé Shadow and bones. Comme j’ai lu Six of Crows (UN dss livres que la série adapte) j’étais curieuse de voir ce que cela donnerait. Honnêtement je peine à accrocher tout à fait, malheureusement, parce qu’il y a un tiers de l’histoire qui me parle, un tiers qui est trop accéléré pour moi, et un tiers auquel je suis indifférente. Mais je veux voir la suite du tiers qui me parle, alors ;;
J’avais regardé la première saison de Shadow and Bone mais j’ai pas trouvé la motivation à tenter la saison 2, sans même parler du temps. Par contre j’entends plein de gens parler de spin-off en ce moment !
Les costumes sont pas mal, mais il n’y a pas beaucoup de personnages féminins (qui sont toujours la meilleure partie d’une série en costume à mon avis) pour les porter. Rawia a des super fringues, c’est sûr. Et un joli maquillage qui la fait sortir du lot.