Avec le début de l’année, plein de diffuseurs aux quatre coins de la planète en profitent pour dégainer des nouveautés ; de toute façon, on le sait bien, il n’y a plus de saison. C’est par exemple le cas de Citytv, au Canada anglophone, qui nous propose en ce mois de janvier Wong & Winchester. Après avoir vu le premier épisode, je vous confirme que son timing ne pourrait être plus impeccable.
Alors, je sais, j’avais dit que je ne parlerais plus de séries policières. Pour ma défense, les héroïnes de Wong & Winchester sont détectives privées… On dit que ça passe ? Allez, juste cette fois on dit que ça passe.
Pour être tout-à-fait franche avec vous, Wong & Winchester n’a rien inventé, et force deux protagonistes à coopérer sur des enquêtes, dans une série à la structure procédurale.
Dans le cas présent on a la vague originalité d’avoir un tandem féminin, mais bon, en l’an de grâce 2023 encore heureux que ça ne soit plus trop exceptionnel. Plus rare en revanche est le fait que l’une de ces femmes soit asiatique, et à la télévision canadienne même s’il y a eu quelques efforts depuis quelques années (avec par exemple Second Jen, Kim’s Convenience, ou plus récemment Run the Burbs), ça reste encore exceptionnel. La série tourne un peu plus sur cette héroïne, d’ailleurs, présentée comme un peu plus centrale et complexe que sa collègue, au moins pour le moment. Ah, petit point anecdotique : la série est tournée à Montréal, aussi. Bon c’est le cas de plein de séries aussi, hein, mais la plupart du temps elles sont francophones donc c’est un peu marrant, je voulais le signaler.
Marissa Wong a été contrainte de quitter la police, et travaille désormais dans un petit cabinet d’investigations privées, sous la direction de son patron Gary Johnson. Le problème c’est que des, euh, mésaventures précédentes, dirons-nous, ont donné lieu à un retrait de permis pour Marissa, et elle a donc besoin en permanence de quelqu’un pour la conduire partout. Et vraiment juste ça ! Pas question de partenaire ou quoi que ce soit.
Gary, qui est résolument bonne pâte, a décidé d’engager un chauffeur pour elle. Ou plutôt sept. Sept chauffeurs se sont succédés, et n’ont pas toléré le tempérament épouvantable de Marissa, qui est blasée, cynique et, qui plus est, les met en danger (généralement parce qu’elle se met en danger elle-même, cela dit). Après une ultime démission à cause d’une brumeuse histoire de batte de baseball, Gary décide donc de changer de modus operandi, et contre l’avis de Marissa, propose le poste à Sarah Winchester. Sarah est, au passage, la nièce de Gary, mais surtout elle représente l’exact inverse de Marissa, et a tout de la charmante première de la classe qui est toujours gentille avec tout le monde. Ce qui va sans nul doute irriter Marissa. Point irritant supplémentaire : Marissa ne veut pas travailler avec une femme (…on ne nous a pas trop expliqué pourquoi, j’avoue ; en même temps quelle raison pourrait être audible, je vous le demande), donc elle est ulcérée à l’idée de devoir travailler avec celle-ci plutôt qu’un homme.
Wong & Winchester n’a pas inventé le buddy cop show, mais le fait est que ça marche. Et ça marche parce que ce premier épisode démontre assez rapidement que ces deux femmes ne sont pas vouées à s’entendre en théorie, mais que dans la pratique, exactement comme le prédisait Gary, elles forment une formidable équipe parce qu’elles sont très complémentaires. Marissa Wong est compétente ; elle a le sens de l’improvisation, elle est tenace, elle est intelligente ; Sarah, elle, a le sens du contact humain et parvient aisément à amadouer les gens, elle est fine observatrice, et elle se montre très douée pour relier entre eux les indices qu’elle relève.
Lorsque la série se focalise sur leurs forces respectives (et c’est le cas assez rapidement pour un premier épisode qui a aussi de la mise en place à faire), elle en tire quelque chose d’efficace et sympathique, qui permet de rapidement dépasser le stade des petites chamailleries typiques du genre. De fait, après une petite période d’hostilité, Marissa finit par réaliser qu’elle a affaire à une jeune femme intelligente qui peut être un atout, et elle redirige ses répliques sarcastiques ou désabusées vers d’autres personnages. Finalement c’est peut-être le choix le plus fin de Wong & Winchester : décider que ses héroïnes, même si elles ne sont pas compatibles sur tout, ne vont pas se tirer dans les pattes en permanence parce qu’elles sont capables de voir ce qui est positif chez l’autre. Ou au moins, dans les moments qui comptent !
L’enquête de ce premier épisode ne surprend pas (j’avais deviné qui était coupable environ à la fin du premier acte), mais introduit suffisamment d’ingrédients drôles ou atypiques pour retenir notre attention. Le meurtre sur lequel cette introduction porte s’est déroulé dans une maison de retraite haut de gamme, et la victime est un homme de presque 90 ans qui multipliait les conquêtes sexuelles, par exemple. C’est plutôt amusant comme idée et la série (loin de porter un jugement, d’ailleurs ; au fait, dites à vos grand’mères de se protéger, les capotes c’est pas que pour les jeunes) s’amuse un temps avec tout cela, avant d’offrir un peu d’action vers la fin de l’enquête. C’est efficace en diable, que voulez-vous que je vous dise.
On me fera remarquer, et à raison, que Wong & Winchester ne fait rien de très nouveau, et c’est précisément la raison pour laquelle à mes yeux son timing est parfait. Ecoutez, moi, c’est le début de l’année, je suis déjà épuisée de tout, je suis en colère d’à peu près tout aussi ; je regarde mes séries avec une tasse de thé à la main (devenu un plaisir onéreux par les temps qui courent), drapée de mon fidèle plaid violet ; je suis pas là pour regarder des trucs chiants ou compliqués, j’ai tout le reste de l’année pour ça, pardon. Donc Wong & Winchester, c’était parfait pour ce que c’était, et pour mon humeur du moment.
Si ce n’est pas la vôtre, c’est pas grave ! Mais c’est bon de savoir qu’il y a des options en matière de cozy mystery ou juste d’enquêtes procédurales légères (et je sais combien So Help Me Todd ne fait pas l’unanimité) : au cas où vous cherchiez des idées, eh bien, en voilà une.
Oh gosh, I’m so into female-led cozy mystery right now. And to think this one grew in my own backyard and I didn’t even know! Now to figure out if I have any CityTV access ?
L’importance du timing, c’est quelque chose que je remarque de plus en plus dans mes visionnages : par exemple je peux vouloir commencer une série à un moment donné, mais rien à faire, ça veut pas, je lâche au bout de quelques minutes, et la voir finalement plusieurs jours/semaines/mois plus tard, sans problème.
Le moment de la journée est aussi important : je me rends compte que les soirs, je préfère regarder des séries légères, sans prise de tête, avec une intrigue pas trop compliquée à suivre (même si je ne trouve pas la série fondamentalement qualitative) : en décembre, les 2 saisons de The Bureau of Magical Things étaient au programme de mes soirées (j’en suis la première surprise, je ne pensais pas la continuer au-delà de quelques épisodes), et c’était juste parfait, parce que c’était pile ce dont j’avais besoin à ce moment-là.