En matière de fansubs, il faut être patiente ; cela peut prendre des mois, parfois des années, avant de pouvoir profiter d’une saison dans son intégralité… et plus dans le cas de séries comptant plusieurs saisons, bien-sûr. Il m’arrive d’attendre que le merveilleux travail des fansubbers soit terminé sur une série pour vous en parler (comme pour l’atypique Toranai de Kudasai!!, ou plus récemment Boukyaku no Sachiko, dont vous aviez enfin découvert la review au début de l’année), mais parfois… bah, je n’ai pas la patience ! Ça n’a jamais été ma plus grande qualité de toute façon.
Aujourd’hui je vous parle donc du premier épisode de Momo Ume, une série initialement lancée l’an dernier par Hulu Japan, comptant 40 épisodes… dont, au moment où ces lignes sont écrites, une dizaine seulement a été traduite. Moi-même je n’ai pas eu la force d’attendre la fin des sous-titres pour commencer la série, alors maintenant que j’en ai vu le premier épisode, c’est encore plus difficile d’attendre pour une review. Donc nous y voilà.
En fait, si j’ai l’air de m’excuser en intro, c’est parce que je me sens un peu coupable de proposer toute une review à partir d’un épisode de… 9 minutes et 46 secondes. Momo Ume est en effet ce qui s’approche le plus d’une shortcom (bien que le terme ne soit pas en usage au Japon), ce qui n’est pas exactement inédit, preuve en est de l’existence par exemple de Kyou no Nekomura-san, mais quand même très rare. C’est d’autant plus étrange que la shortcom est supposée être un format de télévision linéaire : c’est avant tout une fiction qui est parfaite pour être glissée entre deux cases horaires, mais qui n’a pas vraiment vocation à être consommée comme le sont la plupart des séries de streaming, c’est-à-dire à la carte ou même en bingewatch. Bref, l’existence de Momo Ume est, sur le papier, trop intrigante pour lui résister.
Et, dans mon cas, il y avait un dernier facteur rendant impossible l’attente : l’une des deux actrices de la série n’est nulle autre que Sairi Itou, une actrice pas très connue mais que j’ai adorée dans la romance lesbienne TRANSIT GIRLS et que j’avais également évoquée, depuis, dans Zenra Kantoku sur Netflix. J’avais très envie de la voir tester ses superpouvoirs dans une comédie aussi atypique. Ma petite favorite a également tourné plusieurs séries avec Queen Yuuki Amami, et est doubleuse d’une des protagonistes du dernier Jurassic World en date, écoutez, elle coche toutes les cases, c’est à croire qu’elle le fait exprès.
Momo Ume est l’adaptation de… écoutez, c’est compliqué.
Apparemment, tout aurait commencé en 2018 avec un compte TikTok et une chaîne Youtube, proposant des dessins animés très simplistes dans lesquels Momo et Ume étaient deux pharmaciennes ; les vignettes humoristiques étaient apparemment commandées à l’agence marketing Cuebic par une entreprise proposant des services de formation et de réorientation à des pharmaciennes. Mais les personnages subsistent au-delà de la campagne, et Cuebic décide de les transposer dans divers univers professionnels (et même au lycée). Finalement, en 2019, Momo et Ume arrivent dans un bureau, ce qui devient « Momo to Ume (OL edition)« . L’intérêt essentiel des vignettes animées réside dans leurs dialogues : un humour à la fois très pince-sans-rire et grotesque, offrant un regard décalé sur des choses banales. C’est cette version qui a rencontré un vif succès sur les réseaux sociaux (à ce jour 100 millions de vues, toutes plateformes cumulées), si bien que les deux employées se retrouvent ailleurs pendant l’été 2021, soit quelques semaines avant le lancement de la série sur Hulu : une compilations de leurs meilleures échanges au format CD/Blu-Ray et un tome unique d’une version papier.
Ce qui est intéressant dans la version de Hulu, c’est que l’idée d’une adaptation animée a été écartée, au profit d’une série en live action. Le style se retrouve pourtant pas mal, étrangement. C’est très coloré, pour commencer, et les deux protagonistes sont lookées de façon similaire (coiffure, pinces dans les cheveux à l’image du fruit dont elles portent le nom, etc.). On retrouve aussi les masques stylisés de la version animée, qui évidemment, étant deux petits rectangles blancs, ne couvrent pas grand’chose en réalité… et donc la série les fait disparaître régulièrement en nous indiquant qu’il suffit d’imaginer qu’ils sont toujours là !
Mais, plus important encore, la série parvient à préserver le rythme des vignettes video d’origine. Les dialogues sont débités à la vitesse de la lumière (ce qui ne fait qu’ajouter à l’efficacité de leur côté pince-sans-rire), et le montage est au taquet, insérant plein de plans ou de petites scènes absurdes venant illustrer les échanges des deux employées. Si je voulais établir une comparaison simpliste (vraiment simpliste, hein, ne la prenez pas trop au sérieux) avec quelque chose qu’à peu près toutes les téléphages de ma génération connaissent, je dirais qu’il y a du Gilmore Girls et du Ally McBeal là-dedans.
Et, exactement comme dans la version web, pas de série feuilletonnante ici. Car en réalité, ce petit épisode de même pas dix minutes… comporte deux sketches. Sans aucune relation entre l’un et l’autre. La première histoire porte sur la façon dont Momo a remarqué que ses collègues (et par extension les gens dans leur ensemble) aiment bien se vanter de choses incroyables juste pour one-upper leur entourage, et la seconde porte sur la façon dont, apparemment, manger des trucs sucrés en médisant sur le dos de son patron est une tradition d’OL, et que le mal qu’on a à dire dépend de la qualité des bonbons ou gâteaux consommés. C’est vraiment une technique de shortcom, cette structure, pour le coup ! Mais c’est tellement moins vulgaire que Caméra Café…
Encore une fois, on est ici dans des sujets très simples, mais c’est vraiment les dialogues qui en font toute la valeur. Momo s’agace facilement, parce qu’elle est jeune, et est un peu dramatique ; Ume, plus expérimentée, a tendance à prendre les choses avec plus de calme. Toutefois, elles partagent le même humour, la même vision des choses, et rient, dans leur coin de bureau, du quotidien, avec le regard décalé qu’elles partagent dans un monde si absurdement normal. Et ça marche. Sur moi en tout cas, ça marche.
Il y a toutes sortes d’explications possibles à cela (la vie du bureau, c’est universellement absurde, par exemple). Mais j’en arrive toujours à la même conclusion : c’est tout simplement que je réponds bien à l’humour japonais, du moins en général. Or, le type d’humour de Momo Ume, c’est du manzai quasiment pur jus : il y a deux personnages relativement statiques (les gags ne reposent pas sur ce qui se fait mais uniquement ce qui se dit), aux personnalités complémentaires (boke pour Momo, tsukkomi pour Ume), et les situations sont à la fois universelles, absurdes et anodines.
Finalement, il peut s’en dire, des choses, sur quelques minutes à peine de télévision. Et c’est ce qui au final m’a convaincue de vous parler de Momo Ume, quand bien même tous ses épisodes ne nous sont pas encore accessibles. Sans regret ?