Roberto Casas est le joueur mexicain de football le plus talentueux de sa génération, et sa carrière est là pour le prouver. Après ses débuts dans le petit club de son village, après avoir joué pour la sélection nationale de son pays, après avoir décroché un énorme contrat pour aller jouer pour une équipe espagnole, il n’a plus rien à prouver. Sa célébrité internationale a fait de lui une légende vivante, et cette gloire lui a apporté une fortune inespérée. Casas personnifie ce à quoi toutes les footballeuses rêvent…
…jusqu’à l’accident. Pendant un match, alors qu’il célèbre un énième but, Roberto Casas fait un malaise. C’est grâce à celui-ci qu’est détecté un problème de santé qui n’avait jusque là jamais été remarqué, mais qui, désormais, lui interdit de reprendre le sport, sans quoi il pourrait y perdre la vie. Adieu contrats lucratifs, partenariats publicitaires et autres opportunités ; et comme son train de vie n’a pas changé (et que, pire, il sombre d’autant plus suite à cette nouvelle), Casas est rapidement ruiné.
Las Bravas FC n’a pas exactement choisi un motif original pour faire revenir son protagoniste vers sa ville natale. Le démarrage de la dramédie mexicaine n’est de toute façon pas là pour marquer des points d’originalité, mais plutôt pour faire sourire… et peut-être espérer en une rédemption pour Casas.
En fait, on m’aurait dit que Las Bravas FC est une comédie, que je n’aurais pas trouvé ça plus étrange. L’épisode initial de la série (lancée ce mois-ci par HBO Max) fourmille de gags, de répliques à double tranchant, et de passages pince-sans-rire, qui donnent à penser que c’est son aspect humoristique qui prédomine. Ce n’est pas une mauvaise chose ; et puis, en matière d’humour, j’ai vu largement pire. C’est juste que c’est quand même assez rare de la part d’une série dont les épisodes durent une cinquantaine de minutes de miser autant sur ces ressorts, même une dramédie.
En particulier parce que beaucoup de dramédies (certes pas toutes) trouvent un équilibre grâce à leur volet affectif. Or, dans le cas de Roberto Casas, on peut difficilement se lier au personnage central, qui est parfaitement imbuvable.
La série fait cependant un travail formidable à la fois pour nous donner une idée de sa trajectoire, et de sa personnalité. Affectionnant les montages incisifs retraçant des mois, des années de la vie de son personnage, le premier épisode de Las Bravas FC nous décrit avec une précision d’horloger combien Casas est devenu un monstre d’ego. Probablement que n’importe qui, en pleine ascension professionnelle comme lui, aurait la même tendance ; mais voilà, on espère quand même que quelqu’un qui trouve le succès à un tel niveau maintienne une certaine forme d’humilité, et clairement… l’humilité, ce n’est pas son genre, à Roberto. Il y a donc une forme de satisfaction, presque karmique, à le voir ensuite dégringoler de son piédestal. Quand bien même, dans les faits, rien de tout cela n’est de sa faute (ce n’est pas une erreur de sa part qui l’empêche de rejouer, mais un problème de santé ; dont il ignorait tout qui plus est), on a quand même le sentiment, encouragé par la façon dont le personnage nous est présenté, que ce coup du sort est mérité, et va le faire redescendre un peu.
Cette exposition le confirme : la seule opportunité qui se présente à Cavas après avoir tout perdu (et en ayant le fisc aux trousses) est de revenir dans son patelin d’origine pour l’inauguration d’une statue à son effigie. Sauf qu’en réalité, notre footballeur découvre qu’il est parfaitement détesté dans tout le village, où on ne cesse de lui cracher à la gueule (au figuré mais parfois aussi au « propre ») en l’invectivant : il est considéré comme un traitre pour avoir quitté la sélection nationale mexicaine, afin de se remplir les fouilles dans un club espagnol. Ah bah oui, le foot, ça a du sens pour tous ces gens-là, on ne plaisante pas avec la fibre nationaliste des fans du ballon rond.
Las Bravas FC n’a, naturellement, pas fini cet épisode introductif sans nous offrir une piste de rédemption. Celle-ci se présente alors que même la manager espagnole de Cavas n’a plus d’idées, ni pour sauver sa carrière, ni pour sauver Roberto Cavas de lui-même. Elle lui conseille de rester planqué au Mexique pendant un temps, et c’est en discutant avec les rares personnes de son entourage passé acceptant de lui adresser encore la parole que Cavas découvre que sa ville natale a toujours une équipe de foot. Celle-ci appartient à l’homme le plus riche de la ville… un oncle de Cavas qui le déteste, mais lui propose d’entrainer l’équipe, en échange de quoi les dettes du sportif auprès des impôts espagnols seront épongées.
Sauf qu’il s’agit d’une équipe féminine constituée d’adolescentes, et qu’évidemment, Cavas pense qu’il est trop bien pour elles. Il est trop bien pour cette ville toute entière, après tout ! Alors des joueuses amatrices qui savent à peine taper dans un ballon…
C’est là que Las Bravas FC sort sa dernière carte : Sebas, l’ami d’enfance de Roberto, lui révèle que l’une de ces joueuses… est sa fille ! Sauf qu’on ne sait pas trop si c’est la vérité, ou juste une excuse pour convaincre le footballeur à la dérive de rester. Et que même si c’est vrai, on ne sait pas laquelle. Mais en tout cas, maintenant, Roberto Cavas s’est découvert une nouvelle façon de laisser un héritage au monde du foot, et une nouvelle chance de réparer les multiples erreurs du passé. Ce qui ne veut pas dire qu’il va s’en saisir, car le plus gros chantier qu’il a devant lui concerne son ego…
L’histoire telle qu’elle est introduite dans ce premier épisode n’est donc pas foudroyante d’originalité, j’avais prévenu. Mais Las Bravas FC mène son intrigue avec tellement d’énergie, et bien-sûr d’humour, qu’on se laisse quand même charmer. Et au pire, cette première saison n’a apparemment qu’une demi-douzaine d’épisodes, alors bon…
Vu le nombre de dramas que je regarde qui ne font pas dans l’originalité, je ne dirais rien parce que parfois, on veut absolument retrouver les mêmes schémas avec juste une ou deux choses qui changent pour passer un bon moment (et puis une histoire pour que quelqu’un apprenne la modestie, ça fait toujours plaisir en vrai).
C’est vrai ; au moins tu sais que tu auras ce que tu es venue chercher 🙂