La review du jour va être très difficile à écrire sans faire des rapprochements avec une autre série, et je déteste quand ça arrive. Seulement, parfois, il n’est tout simplement pas possible de faire autrement, tant l’esprit revient, encore et encore, sur les points communs mais aussi les différences entre deux séries au sujet formidablement similaire.
La review du jour ? Elle porte sur le premier épisode de Los Enviados, une série mexicaine lancée par Paramount+ le mois dernier dans le but d’investir dans la fiction hispanophone. Son synopsis ? Elle suit une équipe envoyée par le Vatican pour enquêter sur des miracles… Donc, oui, autant le dire d’entrée de jeu : ça va être un peu compliqué de ne pas penser à Evil… également sur Paramount+.
Le père Simón Antequera est un avocat espagnol diplômé en droit canonique ; il est envoyé en mission aux quatre coins de la planète afin d’étudier des miracles, et déterminer s’ils sont réels. Au cours de ce premier épisode, il résumera cela parfaitement : « Si ce n’est pas la science, c’est nous ». Jusque là il se débrouille plutôt bien, même si évidemment ce genre de fonction déplaît aux religieux à qui on annonce que leur miracle n’en est pas un. A vrai dire, il semble avoir très peu d’alliées, hors son assistante la sœur Emilia, une Italienne qui partage un bureau avec lui au Vatican.
Mais vient une affaire pour laquelle tout d’un coup, on décide de lui attribuer un partenaire, le père Pedro Salinas. Ce religieux mexicain, de formation purement scientifique, est donc désormais chargé de l’expertise à proprement parler pour cette nouvelle investigation.
Cette affaire part d’une video tournée dans le village de San Acacio, dans laquelle un homme se jette du haut du clocher d’une église au Mexique, tombe devant plusieurs témoins, meurt… avant d’être ramené la vie par un curé local, le père Quintana ! Et vraiment mort : une docteure qui était présente avait confirmé le décès.
Antequera et Salinas sont donc dépêchés sur place, pendant qu’Emilia procède de son côté à une enquête à distance, notamment sur la video elle-même. Il s’avère que l’homme qui a échappé à la mort est l’un des patients de l’hospice psychiatrique local ; bien qu’étant construit dans un petit village, celui-ci abrite 200 patients ! C’est énorme, et ça ne manque pas de piquer la curiosité de nos deux religieux. En outre, il est difficile de ne pas remarquer que le miraculeux père Quintana mène une vie plus que confortable, et qu’il dissimule mal la relation qu’il vit avec une jeune femme, Elena ! Cependant, rien de tout cela ne prouve fondamentalement que le miracle de San Acacio ne s’est pas produit. En fait, les témoignages des fidèles des environs tendent même à indiquer que Quintana a accompli de nombreux miracles, ce qui explique qu’il soit autant révéré par la population.
Los Enviados a donc pas mal de choses en commun avec un épisode moyen d’Evil, à une nuance près : il s’agit d’une série bien plus feuilletonnante. Dans ce premier épisode, en effet, le père Quintana disparaît pendant l’enquête, et désormais Antequera et Salinas doivent aussi comprendre ce qui lui est arrivé. Chose qui n’est pas facile vu que même la police locale fait barrage à leur enquête, et leur « conseille » de rentrer au Vatican sans plus poser de question.
A voir le matériel promotionnel, il semble assez évident que la docteure Adriana Moreno Cordero va également prendre part à l’aventure, même si pour le moment son rôle est assez mineur dans ce premier épisode. Cela signifie que cette introduction nous en dit beaucoup plus sur les deux padres, et les pousse à interagir à plus forte raison qu’ils ne s’étaient jamais rencontrés jusque là.
Los Enviados insiste sur tout ce qui sépare ces deux religieux. Antequera est un type qui a beaucoup de bagou, goguenard, bon vivant, il n’a aucune difficulté à enfreindre la loi des hommes, et vient d’une famille espagnole nombreuse et pauvre ; de son côté, Salinas se révèle être un homme de peu de mots, à l’humour acerbe, austère, très respectueux des règles, et il vient d’une famille mexicaine très riche (d’ailleurs il a grandi pas très loin de San Acacio). Dés le départ, il est clair qu’Antequera essaie de sympathiser, en partie parce qu’il est mal à l’aise avec l’idée de ce partenariat, tandis que Salinas éprouve un mépris à peine voilé pour son compagnon, dont d’ailleurs il a épluché le dossier avec une attention froide.
Malgré tout, l’épisode va progressivement montrer les deux hommes en train de s’apprivoiser, et lentement commencer à se parler, ne serait-ce que pour communiquer leurs premières impressions sur cette affaire. Chacun fixe son attention sur des détails différents, mais au final, l’opinion qu’ils commencent à se faire de Quintana est assez semblable.
D’une façon générale, ce premier épisode n’est pas révolutionnaire, il faut l’admettre. Evil joue également sur les tiraillements entre science, croyance, et psychiatrie. Los Enviados cultive assez peu de suspense quant à son postulat de départ : pour le moment, personne n’envisage sérieusement qu’il ait pu se produire un miracle (sans même parler de plusieurs).
Cette proximité thématique avec Evil n’est cependant pas la seule responsable de l’air de déjà vu de cette entrée en matière. Los Enviados signe ici un épisode qui est aussi à rapprocher de la formule de nombre de polars plus classiques : la collaboration de deux partenaires venus de deux cultures différentes, c’est un peu beaucoup la recette, cent fois dupliquée, de séries comme Bron/Broen. Le fait que l’enquête sur un miracle se transforme au cours de cette introduction en une enquête sur une disparition n’aide d’ailleurs pas à se sortir le parallèle de l’esprit.
Pour autant, l’épisode n’est pas dénué de charme, en grande partie grâce à ses personnages. Le père Antequera est incarné par un Miguel Ángel Silvestre en très grande forme, cabotinant face à Luis Gerardo Méndez qui incarne un père Salinas qui est psychorigide, mais pas dénué de nuances. Le tandem fonctionne bien et lorsqu’ils parlent de religion ou de leurs origines, on se passionne rapidement pour leurs échanges.
Avec seulement 8 épisodes pour cette (première ?) saison, Los Enviados va sans doute avoir besoin de faire un peu plus que cela pour éviter les comparaisons handicapantes, et le faire vite. La série n’est pas, pour le moment, criante d’originalité, et que vu mon emploi du temps téléphagique en ce moment, je ne me vois pas en faire une priorité absolue. Cela dit, si ça vous intéresse d’y jeter un oeil, je ne veux pas vous décourager non plus, elle se laisse regarder… je ne suis simplement pas convaincue que ce soit mieux de la regarder elle plutôt qu’Evil. Mais en attendant la prochaine saison, pourquoi pas ?
La comparaison avec Evil est plutôt opportune pour moi qui était restée très mitigée par cette dernière. Peut être que Los Enviados m’aidera à comprendre ce qui si déplue chez sa rivale
Je n’ai pas détesté Evil (ma review de la saison 1 est dans les recommandations sous cet article, au passage ; pas encore eu le cran de me mettre devant la saison 2), mais j’ai envie de dire que Los Enviados ne cherche pas vraiment à donner dans l’horrifique, en tout cas pas pour le moment. Evil travaille vraiment sur la question de la peur, et l’exorcisme est une notion récurrente dans ses intrigues, alors que pour le moment Los Enviados ne s’aventure pas vraiment sur ce terrain-là. Après, je n’ai vu que le premier épisode pour le moment. Peut-être que ça évolue. Mais à partir d’un même sujet, les deux séries ont deux tons différents (et ça me donne encore plus de regrets de ne pas pouvoir comparer avec Il Tredicesimo Apostolo).
Je ne sais pas pourquoi en voyant l’image en haut de l’article, j’avais inversé qui était quel prêtre et ce n’est qu’en te voyant dire qu’il cabotinait que je me suis dit « ah non, j’ai inversé les prêtres ».