Décider de regarder le premier épisode d’Avocats et Associés n’est évidemment pas un hasard : en travaillant sur la review de Le Code (que vous avez toutes lue, naturellement…), je me suis aperçue que j’avais vu quelques épisodes par le passé, en attendant que commence ma série de deuxième ou troisième partie de soirée. Essentiellement les premières saisons. Mais je ne l’avais jamais suivi la série de près et n’avais, d’ailleurs, jamais vu son premier épisode. Pour une pilotovore notoire comme moi, c’était évidemment inacceptable.
Ajoutons à cela le fait que j’ai l’air de rien adopté la coutume de regarder une série française « ancienne » par an (en 2020, c’était Belphégor, en 2021, plusieurs épisodes de Salle n°8), et que, ma foi, j’y prends goût. Limite je prends plus de plaisir avec cette nouvelle tradition qu’à commencer certaines séries françaises récentes. Heureusement pas toutes, mais vous n’avez pas idée des glaviots que je n’ai pas lancés dans des reviews finalement jamais achevées. J’emporte avec moi dans ma tombe mon avis sur Le Bazar de la Charité… par charité, précisément.
Comblons donc cette insupportable lacune, et profitons-en pour faire un petit tour par les années 90, décennie pourtant assez maudite du côté de la fiction française™.
La review que vous vous apprêtez à lire va cependant être beaucoup moins élogieuse que celle de Le Code, autant vous prévenir. Avocats et Associés commence en effet in media res lors d’un entretien entre un accusé et son avocat (dont on apprendra par la suite qu’il s’appelle Carvani). Au bout d’une réplique et demie, on est déjà dans l’hystérie. Ça s’attrape par le col, ça se hurle dessus, c’est déjà pénible. Très mauvaise première impression.
Et même après cette première scène, la tension ne retombe pas vraiment, non pas parce que la foire d’empoigne continue, mais parce que la musique est décidée à accompagner le travail d’exposition de cet épisode en étant à 712 sur l’échelle de Richter, comme si la menace était permanente qui vérifient leurs message en arrivant au bureau le matin. Malgré cette tension artificielle (et assez inutile), on apprend rapidement à cerner nos protagonistes.
Le cabinet a été co-créé par Antoine Zelder et Robert Carvani, qui entretiennent une relation plutôt amicale ; Laurent Zelder, fils de, est également avocat au cabinet, quoique peu investi dans sa vie professionnelle (plus tard dans l’épisode, il en fera l’aveu lui-même) que dans ce qui ressemble à une activité nocturne plus passionnante ; enfin, il y a Michèle, une avocate workaholic qui vit au bureau et espère un jour devenir partenaire de la firme. Plus mineures sont les petites mains du cabinet, comme la secrétaire Vanessa ou la standardiste Audrey ; sur elles, on en saura très peu. Ce premier épisode décide également d’utiliser l’introduction d’une nouvelle avocate, Caroline Varennes, pour nous initier à son univers. Elle commence son premier jour en tant que collaboratrice de Carvani sous des auspices peu engageants, alors que les autres employées du cabinet discutent devant elle de la façon dont, comme d’habitude, une jeune femme a été engagée pour ce poste où personne ne fait long feu, et que ses compétences sont d’ores et déjà remises en question avant qu’elle n’ait serré la moindre main.
Et, oui, il semblerait que ma photo soit d’une saison ultérieure.
Bien-sûr elle va devoir prouver dans ce premier épisode qu’elle est un peu plus qu’une décoration pour le bureau de Carvani, et comme elle est au générique, on sait qu’elle va y arriver. Mais les vagues de remarques sexistes qu’elle se prend dans l’intervalle sont bien dégueulasses, quand bien même Avocats et Associés voudrait nous faire croire qu’il y a un côté pseudo-girl power derrière leur défilé. « Juré, on ne montre ces détails dix fois qu’afin que vous puissiez voir que malgré tout ça, Caroline va quand même mériter sa place » ! Il n’en reste pas moins que Carvani est un gros porc suffisant (et que son pote Zelder est un facilitateur qui a fait exprès d’engager une fille jolie pour lui faire plaisir), et qu’il y a quelques scènes, dont l’une dans le bureau d’Antoine Zelder, qui n’ont pas pour vocation de faire se confronter Caroline à l’adversité, mais juste à tenir des propos de mâle lubrique bien satisfait de soi parce qu’on sait à qui on parle. De la même façon, Michèle va attendre la toute fin de l’épisode pour arrêter ses blagues sexistes, parce qu’il faut bien qu’on comprenne qu’elle est cool comme femme, pas une mégère féministe qui ruine l’ambiance du cabinet.
Même en essayant très fort de me rappeler que 1998, c’était un autre siècle, il faut quand même admettre que cet épisode a petit problème de sexisme, renforcé par le déballage totalement gratuit d’une paire de seins ou, vers la fin, d’une scène de douche. Oh non mais je sais, c’était une autre époque, j’y étais donc je ne suis pas plus surprise que ça. C’est juste que lors de ce visionnage, je n’arrêtais pas de penser à d’autres legal dramas contemporains d’Avocats et Associés, et qui ne passaient pas autant de temps à se vautrer dans la beauferie, voilà tout.
Sur un plan totalement différent, Avocats et Associés ne soutient pas vraiment la comparaison non plus, mais c’est pas faute de se donner un peu plus de mal.
Les intrigues ne sont en soi pas mauvaises : un procès pour meurtre où la victime est une jeune femme turque pauvre et l’accusé un jeune homme blanc riche ; et une médiation entre des parents d’accueil et une mère qui veut reprendre son fils sont les deux affaires principales. Ce ne sont pas des cas inintéressants, que ce soit de par les paramètres du dossier lui-même (l’accusé de meurtre est le fils d’un des plus gros clients du cabinet) ou les circonstances de la procédure (c’est la première affaire que traite Caroline… et même pour une avocate expérimentée ce serait impossible de gagner gain de cause). En revanche on assiste assez peu à l’impact de ces affaires, que ce soit sur les avocates elles-mêmes, ou sur les clientes. Ca n’est pas totalement exclu de l’intrigue, mais c’est fait de façon si fugace qu’on peut difficilement parler d’une approche dramatique.
En fait, plus ce premier épisode d’Avocats et Associés avance, plus on s’aperçoit que la série ne veut surtout pas émouvoir : elle veut juste faire avancer l’intrigue. Parfois la faire avancer, ça signifie juste faire épeler à voix haute la prochaine étape, mais surtout ça veut dire trouver un retournement de situation. C’est particulièrement vrai pour l’affaire de meurtre de Carvani, où à deux reprises l’avocat fait des révélations dans le prétoire qu’on n’a absolument pas vues venir. Et c’est, en réalité, précisément le principe : trouver un coup d’éclat qui surprenne, peu importe s’il ne fait pas spécialement sens dramatiquement. Alors tout d’un coup on fait une grande révélation tirée d’un chapeau en gesticulant devant un témoin, et ça passe pour une intrigue juridique. Dans une série policière, l’équivalent de cette technique consisterait à fait arrêter le coupable en n’ayant pas procédé à l’examen tous les indices et motifs devant les spectatrices. Il n’y a pas de réel bénéfice ici, à part : « regardez, il va gagner son affaire ». Cool. Contente pour lui. The Practice this ain’t.
Tout n’est pas à jeter dans cet épisode et, rappelons-le au cas où, c’est le premier épisode d’une série qui a duré 13 saisons. Mais vraiment, cette entrée en matière d’Avocats et Associés n’impressionne même pas mon chat, d’autant qu’au lieu de s’intéresser vraiment à ses personnages, à leurs cas de conscience, à leurs interactions, on reste en surface et on privilégie des moments où tout d’un coup ça hurle sans grand enjeu.
D’une certaine façon, Avocats et Associés semble démarrer sans s’être demandé pourquoi parler du monde la Justice, pourquoi avoir choisi un cabinet d’avocates, pourquoi avoir choisi ces avocates-là. Cela peut (et va probablement) venir par la suite, mais pour l’instant on a l’impression de faire un peu du travail à la chaîne. Qu’est-ce qui fait que ces sujets peuvent revêtir de l’importance, d’un point de vue dramatique, éthique ou même philosophique ? On saura pas. Lorsque les affaires trouvent une conclusion, on en sort dans le même état qu’on y est entrées ; rien n’a vraiment d’importance. On a meublé 1h le vendredi soir, c’est déjà pas si mal. Vous voulez ressentir des trucs, en plus ?!
Il y a bien un embryon de fil rouge qui semble avoir été lancé ici (en insistant sur la façon dont lentement, Carvani découvre que Caroline n’est pas juste jolie : elle est aussi belle et compétente ! et ce pile au moment où sa vie de couple de délite), mais il faudra attendre que cela paie plus tard parce que pour le moment, on ne s’intéresse pas aux protagonistes en tant que personnes. Vu que les intrigues n’ont pas de poids non plus, c’est une introduction dans laquelle il est difficile de s’investir.
Bon, malgré ce bilan assez morose, laissez-moi finir sur une note un peu plus positive, par un mot sur le générique de la série : c’est un des rares génériques français que je trouve VRAIMENT bien. J’avais d’ailleurs oublié à quel point. Pas trop visuellement, je vous l’accorde, mais musicalement, c’est du thème qui tient la route ! Il partage quelques points communs avec d’autres séries de sa décennie, ce qui est normal, toutefois j’ai beaucoup aimé les ruptures de rythme, et les « vocalises » d’opéra qui parviennent à être brèves et légères tout en donnant de l’austérité, comme pour rappeler le côté sérieux d’une institution telle que la Justice. Un bon compromis pour moi qui n’aime pas les génériques avec des paroles ! C’est du générique des années 90 de qualité ; il part directement dans la playlist, celui-là.
Pour le reste… bon bah pour le reste, ya plus qu’à se rabattre sur une saison 2 de Le Code, hein.