Aile de pigeon

20 juin 2021 à 11:14

Il est des séries qu’on rechigne à tenter, et pourtant je me considère comme plutôt aventureuse. Mais voilà : quand on lit le synopsis d’une série, et qu’il ne nous allèche pas, de nos jours il n’est pas très compliqué de céder la priorité à d’autres séries plus passionnantes, en se jurant, bien-sûr, qu’on y reviendra un jour.
Depuis quelques jours, les news commencent à tomber sur ce à quoi ressemblera la saison 2 de la série chilienne El Pre$idente (annoncée plus tôt ce printemps), et j’ai bien été obligée d’admettre qu’à force de reporter, j’avais tout simplement enterré le visionnage de la série. Pourquoi ? Parce qu’elle parlait de foot (spot qui m’indiffère puissamment), en particulier d’un scandale que je n’avais pas du tout suivi… et qui entre nous soit dit ne m’intéressait pas le moins du monde.

Ce qui n’est pas juste. Après tout, si je suis capable de m’éprendre pour le biopic d’un réalisateur de porno japonais des années 80 dont je n’avais jamais entendu parler avant (Zenra Kantoku revient la semaine prochaine, amies téléphages, et je ne suis que joie !), alors pourquoi pas une série sur le Fifagate ? Une série n’est pas son sujet.
Du coup, devinez de quoi on cause aujourd’hui : eh oui, du premier épisode d’El Pre$idente.

De toute façon, ce premier épisode n’en parle même pas, du Fifagate. Pas vraiment. Pas encore.
L’introduction d’El Pre$idente est pour le moment occupée à… eh bien, introduire des trucs. Au premier chef desquels se trouve le personnage central de Sergio Jadue, dirigeant d’un club de foot d’une petite commune obscure et pauvre, mais qui se retrouve, du jour au lendemain, à la tête de toute la fédération chilienne ! Toutefois, ce n’est pas vraiment son talent ou son ambition qui le portent aussi loin, mais plutôt le fait qu’il débarque au siège de l’ANFP (ou Asociación Nacional de Fútbol Profesional) au bon moment, c’est-à-dire lorsque des personnalités autrement plus influentes que lui ont besoin d’un vulgaire pantin à mettre à la Présidence. Âgé d’une trentaine d’années, Jadue devient le plus jeune Président de l’histoire de l’ANFP, mais il n’a pas vraiment de pouvoir décisionnaire…
…du moins pas tant qu’il ne se réveille pas. Toutefois, motivé par une épouse dont les dents rayent le parquet (et qui contrairement à lui est excellente stratège), il finit par prendre le taureau par les cornes et user de son statut pour s’imposer dans le monde du football chilien.

Naturellement, ce n’est pas exactement une success story qu’El Pre$idente tente de nous raconter. Déjà, des éléments plus sinistres augurent du scandale à venir, même si Jadue, qui n’a pas inventé le fil à couper le ballon rond, n’en a pas encore conscience. A la fin de ce premier épisode, on comprend cependant qu’en embrassant son titre de Président, il a aussi accepté de prendre part à ce qui se trame du côté sombre du football.
Et lorsqu’il s’agit de parler de cet aspect, El Pre$idente est encore plus fine que dans son portrait de l’idiot-du-village-devenu-Président Jadue.

En fait c’est même la force de cette exposition, et a priori du reste de la série. Pour nous expliquer les enjeux, la série emploie un narrateur omniscient, mais il ne s’agit pas de n’importe qui ! Notre guide n’est autre que Julio Grondona, vice-président argentin de la FIFA… et qui est enterré quand démarre la série. Maintenant qu’il n’a littéralement plus rien à perdre, rapport au fait qu’il est mort, il peut parler librement de l’univers du football sud-américain, qu’il connaît si bien pour y avoir régné en maître pendant des années.
Il peut nous pointer du doigt les tractations entre dirigeants en coulisses. Il peut évoquer les pots-de-vin qu’on distribue aux copains. Il peut nous décrire le business du foot, qui rend ces hommes (…toujours des hommes, naturellement) richissimes depuis des décennies, grâce à la popularité du sport sur le continent. Il explique, en somme, pourquoi des millions de fans permettent à ces types de l’ANFP d’empocher des millions. Il y a plusieurs passages où la voix-off offre du vitriol pur, qui incite le public de la série à se poser des questions sur la corruption qui se cache derrière son sport préféré.
Pas seulement au sens d’un avertissement sur d’éventuelles dérives, non. Au contraire, rien que dans le premier épisode, les afficionados se font traiter ouvertement de pigeons plusieurs fois ! Si tous ces hommes d’influence se font du pognon, c’est parce que les supporters se laissent entuber sans remettre en question quoi que ce soit. El Pre$idente semble appeler de ses vœux une prise de conscience : le scandale qui sera décrit par la série dans les épisodes à venir devait se produire à un moment où à un autre, mais il ne commence pas avec Jadue. Et ne finit probablement pas avec lui non plus.

Ce qui est ironique, c’est que bien-sûr… les premiers détails sur la saison 2 ne sont pas la seule information à être tombée récemment. On apprenait ainsi il y a quelques jours qu’Amazon Prime Video avait récupéré les droits de la Ligue 1 française (pour un total de plusieurs centaines de rencontres). Ça m’a un peu fait rire de réaliser cela au beau milieu de mon visionnage, vu qu’El Pre$idente est… une série originale d’Amazon Prime Video.
L’avantage c’est qu’au pire, ça pourra fournir l’intrigue de saisons ultérieures à la série.


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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

3 commentaires

  1. Tiadeets dit :

    Le sujet ne m’intéresse pas plus que ça, mais tu sais à quoi ça me fait penser ? J’aimerais bien une série d’un des pays qui se préoccupe de crickets sur ce sport et les problèmes de corruption, une bonne coprod’ australie-inde, ce serait bien ça.

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