A l’origine aujourd’hui, je voulais vous parler du premier épisode d’une série norvégienne. J’avais commencé à préparer la page de la review, uploadé les photos, mis à jour le tag…
Et puis les choses ont totalement déraillé. Ce que je n’avais pas planifié, c’est qu’entre le moment où je commencerais à écrire et le moment prévu de la publication, j’allais tellement brûler d’envie de voir les épisodes suivants… que finalement la review du jour est une review de saison !
Mais c’est le genre de problème que, de vous à moi, je suis toujours ravie d’avoir.
Pørni a été lancée au début du mois par la plateforme nordique Viaplay ; ses résultats ont apparemment été si spectaculaires que moins de 15 jours après son démarrage, la plateforme annonçait le renouvellement de la série pour 2 saisons d’un coup (la prochaine étant attendue pour 2022).
Et vraiment, je comprends le coup de cœur. Je suis moi aussi tombée sous le charme de Pørni, qui contrairement aux apparences n’est pas une série sur l’industrie du cinéma érotique, mais une jolie petite chronique sur la vie de son personnage principal, Pernille Middelthon, dite « Pørni ».
Sur le papier rien ne destine Pørni à être exceptionnelle : c’est une dramédie qui suit le quotidien de sa protagoniste éponyme, une femme de 45 ans qui vit à Oslo. Sa vie n’est ni parfaite ni horrible, un peu entre les deux : elle assistante sociale à l’enfance, elle est divorcée depuis 5 ans, elle vit avec son père Ole Johan, elle a la garde de ses deux filles adolescentes (l’aînée Hanna et la plus jeune Sigrid), elle héberge également son neveu Leo.
Le premier épisode commence alors que le père de Pørni est à l’hôpital, prêt à recevoir un diagnostic définitif de cancer incurable, et que, depuis les toilettes de l’établissement, elle appelle sa sœur Anne au téléphone pour partager son ressenti. Sauf que sa sœur ne répondra pas, et ne répondra plus jamais : elle est décédée dans un accident de la route quelques mois plus tôt. Pørni gère toute seule ce genre de choses, à présent.
Ce qui m’a d’emblée épatée dans Pørni, c’est l’attitude de son héroïne et à travers elle, de toute la série. Il n’y a pas de défaitisme.
Il y a des coups durs, mais ils n’ont pas plus d’importance que les bons moments. La vie de Pørni est complexe, et très occupée, et belle, et triste, et parfois ni l’un ni l’autre. Elle est, voilà tout. Alors oui, c’est émouvant que Pørni ne puisse plus parler à sa sœur, évidemment, mais la série tourne les appels (réguliers) sur le portable de la défunte non pas comme une source de déchirement, mais plutôt comme une façon saine de dire ce qu’elle a sur le cœur, prolonger l’intimité qu’elle avait avec sa sœur, puis repartir de plus belle dans un quotidien plus chargé.
Le fait que les moments les plus compliqués ne soient jamais la fin du monde, moi, ça m’épate. Je suis dépressive, quand quelque chose de triste ou compliqué se produit, c’est toujours un signe que les choses vont de plus en plus mal et n’iront plus jamais bien. Je ne sais pas voir le monde autrement. Pørni, si. Quand quelque chose va mal, c’est juste pour elle le signe que les choses vont mal maintenant, mais ça n’exclut pas celles qui vont bien, et surtout, ça n’exclut absolument pas la possibilité que les choses aillent mieux ensuite.
Je sais qu’il y a des gens qui perçoivent le monde comme ça, et au fond je sais que c’est la façon la plus « saine » de percevoir le monde d’ailleurs, mais quand Pørni, avec tous les outils d’une fiction, me le montre et m’invite temporairement à le ressentir par empathie, je suis désolée mais ça me chavire.
Quoi qu’il se passe, c’est la vie. Les hauts et les bas. Et ça, c’est de la magie pour moi.
Au fil des 6 épisodes de Pørni, on va donc la voir jongler entre les impératifs du quotidien (ce qu’on fait à manger, quelle enfant fait quoi, etc.), ses envies à elle (passer du temps avec des amies, peut-être enfin tenter de passer une nuit avec Bjørnar, cet avocat plus jeune qui ne se lasse pas de lui faire comprendre qu’il est intéressé), son affection pour ses proches (son père n’a, en fait, pas un cancer, mais quand même une révélation à lui faire), son attention envers l’adolescence de Hanna et Sigrid (surtout que leur père est un deadbeat dad vivant à Copenhague et que parfois il génère des déceptions supplémentaires) et celle de Leo (c’est son père qui conduisait la voiture dans l’accident qui a tué sa mère, forcément c’est compliqué…), ou encore son métier, qui rajoute encore des enfants pour lesquelles s’inquiéter.
Il arrive parfois des choses assez sordides (Pørni est harcelée par la mère d’une famille où elle est intervenue), ou des événements qui semblent terrifiants (Sigrid est à un moment la victime d’un chantage à la photo volée), mais dans Pørni, parce qu’on privilégie la stabilité émotionnelle, on ne panique pas. Presque pas. On peut se sentir triste, mais jamais vraiment accablée. En tout cas on se reprend très vite, on affronte le problème, et puis on trouve un moyen de le régler… ou de vivre avec.
Avec une saison de seulement 6 épisodes d’une demi-heure, Pørni fait beaucoup avec peu, tout en conservant une humilité qui sert parfaitement son propos.
Dans le même temps, Pørni est le genre de série qui me rend amère.
Le temps que dure son visionnage, j’ai l’impression d’avoir touché du doigt le visage de Dieu et d’être irradiée par une compréhension parfaite de l’univers et de la place que je peux y tenir. Bon, j’exagère, mais pas de beaucoup. Il y a une paix intérieure communicative à regarder des séries où les actions des protagonistes semblent saines, même dans l’adversité, surtout dans l’adversité. Après avoir eu le sentiment qu’une porte s’ouvrait, j’ai l’impression qu’à l’avenir je pourrai être plus résiliente, moins accablée par tout, tout le temps.
Ce qui me consterne, c’est que cette impression ne dure jamais. Je regarde un épisode, ou deux, ou six, ce pourrait même être trente ou deux mille… mais quel que soit l’expérience de transcendance éprouvée pendant ce temps-là, elle s’évapore quelques heures plus tard. J’aurais voulu regarder Pørni et qu’elle me donne le pouvoir d’arrêter d’être moi, mais c’est un peu beaucoup demander à de l’art.
M’enfin, vivement la saison 2 que je puisse, brièvement, croire à nouveau que c’est possible.
Ah ces séries qui motivent et nous font penser qu’on peut arriver à tout et où au final ça ne dure que quelques heures ou quelques jours. Eh bah, au moins, c’est ça de pris.
C’est aussi sympa de voir un personnage comme Pørni ! Je suis comme ça aussi et c’est rare de voir des personnages avec cet état d’esprit dans la fiction !