Nan mais c’est bien. C’est une bonne idée de lancer The Letter for the King en ce moment ; je sais que Netflix ne l’a pas fait exprès, mais ça tombe pile poil comme il faut. Je vous disais hier que si vous n’arrivez pas à vous concentrer sur ce que vous regardez, ce n’est pas la peine de vous forcer.
Du coup, c’est parfait, parce que je vous garantis qu’il n’y a pas besoin de se concentrer sur The Letter for the King.
Très franchement, même sans avoir lu les bouquins (et encore, apparemment l’adaptation est très libre), on connaît l’histoire : celle de Tiuri, un jeune homme au cœur pur, parti de rien, au passé énigmatique, pas très sûr de lui mais qui semble promis à une destinée hors du commun… bref, un héros. Et punaise mais alors ça tombe fichtrement bien : d’après une ancienne prophétie, il s’avère qu’on attend justement un Héros. Un Héros avec majuscule et tout, pour lutter contre euh eh bien, contre quoi d’autre, les forces du Mal évidemment. Il n’est pas spécialement difficile d’imaginer ce qui personnifie le Mal, pas plus qu’il n’est fait de mystère autour de la nature de notre Héros. Ainsi, hasard du calendrier, alors que cela fait des millénaires qu’une guerre faisait rage, un prince contemporain de Tiuri a réussi à conquérir un territoire jusque là imprenable du nom d’Eviellan ; et évidemment ce prince est sanguinaire, assoiffé de pouvoir, et apparemment doté de pouvoirs surnaturels. Mais qu’on se rassure, parce que Tiuri entend d’étranges voix, donc sûrement que lui aussi a deux-trois trucs dans sa manche sans le savoir.
Bon et puis, évidemment, il y a le poster promotionnel :
Punaise, je crois que c’est la première fois que je m’endors en écrivant une review de pilote. Tout cela est d’une banalité…
Encore une fois, je n’ai pas lu la saga littéraire, donc j’ignore si en essayant de se dégoter un Game of Thrones à prix coûtant (parce que bien-sûr que c’est ce qui se trame ici), Netflix a rendu l’histoire soporifique ou si c’était d’origine, mais qu’est-ce qu’on se fait chier. Il n’y a rien dans The Letter for the King qui vaille la peine d’être regardé tant on a l’impression de tout connaître à l’avance.
Pis comptez pas sur la série pour essayer de parler de quelque chose à travers son intrigue. On est là pour cocher des cases, rien de plus.
Les personnages originaires d’Eviellan sont noirs ? On va surtout s’arranger pour que personne ne semble le remarquer, et que ça n’ait l’air d’avoir aucune forme de signification. Surtout ne pas l’expliciter dans les dialogues ou quoi. C’est un pur hasard. D’ailleurs si les gens méprisent le Héros et font la guerre à Eviellan, c’est pour une touuuuute autre raison, évidemment. Pas de racisme dans notre monde médiéval… d’ailleurs tenez, il y a même une asiatique dans la série ! Et personne n’a remarqué qu’elle est asiatique non plus, ou qu’elle est une femme d’ailleurs. D’ailleurs tenez, on a même une reine dans cette série ! Qui croit au mérite, en plus ! Bon, 712% des autres personnages autour sont des hommes blancs, hein, mais à part ça notre univers médiéval est super inclusif et du coup on n’a pas besoin d’en parler.
Est-ce que du coup on va parler de mythologie ? Oh dites, ne comptez pas trop là-dessus. Aucune idée de pourquoi Eviellan est en guerre avec les deux autres royaumes du continent depuis des siècles. Sachez juste que ça fait super longtemps et que maintenant la roue a tourné, voilà, next. On va pas palabrer pendant des heures dessus, de toute façon c’est juste un prétexte pour vous montrer une jolie carte (pas aussi jolie que celle de Game of Thrones mais on n’avait pas le budget de toute façon) et vous donner l’impression qu’il se passe des trucs. Il se passe aucun truc, pour être claire ; rapport au fait que le prince maléfique a déjà fini sa campagne militaire et que la série démarre donc, littéralement, après la bataille. C’est juste histoire de mettre en place des enjeux en carton, mais on va pas commencer à vous parler de l’Histoire du continent ou quoi ou qu’est-ce.
Nan mais attendez, ça se trouve la quête intérieure du personnage est super profonde ? Nenni. C’est juste un ado qui connaît pas son père et entend des voix. Il n’a aucune qualité, il est totalement incapable de quoi que ce soit, il n’a pas de personnalité, et à la rigueur sur la fin de l’épisode, on essaie vaguement de nous signifier qu’il est altruiste mais ça pourrait aussi bien être de la stupidité, c’est dur à dire. Vu que lui-même n’a aucune idée de qui il est, de ses origines, ou même de la raison pour laquelle il entend des voix (et sa mère n’est franchement d’aucune aide sur ce point), on ne peut pas franchement dire que sa vie intérieure soit particulièrement dense. La seule chose qui le torture c’est de décevoir un beau-père qu’il n’aime même pas, c’est vous dire le niveau.
Au risque de me répéter, regarder The Letter for the King est, pour toutes ces raisons, ab-so-lu-ment-par-fait en ce moment. Netflix nous pond des daubes comme ça à longueur d’année, ça remplit ses grilles hebdomadaires sans trop chercher à accomplir quoi que ce soit… mais là ça tombe super bien. Si vous avez envie de regarder des images qui bougent et des gens qui parlent, c’est idéal. L’impression de transparence totale des personnages, de l’intrigue, des décors et des enjeux fait que The Letter for the King a quelque chose d’à la fois nouveau et familier.
Vous voulez une série à regarder sans avoir à y penser, ni pendant ni après ? Bingo.
Rho la vache, c’est tendu. Après en plus de l’atout « pouvoir regarder sans se prendre la tête », ces séries ont au moins le mérite de permettre à des acteur.ices de mettre de la nourriture sur la table et de payer les factures.
Oui voilà, faut le voir comme ça. Un peu comme les scénaristes qui rejoignent des séries nulles parce qu’à un moment on peut pas tous bosser sur des Succession.