Fairy tales

5 février 2019 à 22:23

L’un des pays producteurs de séries dites « pour la jeunesse » les plus intéressants de la planète, c’est l’Australie. C’est là que s’imaginent et souvent se tournent la plupart des projets ambitieux en la matière, généralement sous la houlette de la télévision publique, mais pas exclusivement. Certains l’ont d’ailleurs bien compris, et co-produisent un grand nombre de séries australiennes pour enfants et/ou pré-ados, notamment l’Allemagne (où ZDF est très active dans le domaine) et le Canada.
Jonathan M. Shiff est l’un des créateurs auxquels on doit un grand nombre de ces séries depuis les années 90. Ocean Girl (bientôt rebootée d’ailleurs), Thunderstone, Lightning Point, la franchise H2O… son penchant pour les séries fantastiques n’est plus à prouver, et il a fait ses preuves.

L’été dernier, la chaîne australiene Eleven (depuis rebaptisée 10 Peach) a donc proposé The Bureau of Magical Things, une série fantastique de 20 épisodes créée par Jonathan M. Shiff.
Ce n’est pas la plus épatante série du genre, mais si vous cherchez un truc soyeux à regarder un jour de grisaille, ça se pose là. En outre, comme le montre bien la photo de promo ci-dessous, The Bureau of Magical Things a l’immense avantage de mettre en avant trois personnages féminins (les personnages masculins ayant un peu moins d’importance, au moins dans le premier épisode), chose encore plutôt rare dans les productions pour ce public.

Kyra est une adolescente à qui tout réussit : c’est une sportive populaire, une musicienne émérite, et une jeune fille responsable qui travaille même le weekend en promenant des chiens. Avec tout ça elle trouve encore le temps d’être aimable, et toutes ses qualités font qu’elle est appréciée aussi bien de sa meilleure amie Mathilda, également joueuse dans l’équipe de basket de son école, que de Peter, le geek de service. Bref tout va bien pour Kyra dans le meilleur des mondes, même si son père est peu présent à cause de son métier de flic.

Mais cette vie tranquille va bientôt être bouleversée lorsqu’un soir, faisant son footing, Kyra aperçoit un livre qui flotte à environ un mètre du sol, dans une allée du parc. Et ce livre ne se contente pas de voler, d’ailleurs, il brille aussi. Fascinée par le phénomène, Kyra ne peut s’empêcher de toucher le livre… et perd connaissance. A son réveil, il apparaît qu’une jeune fille inconnue l’a ramenée dans sa chambre. Elle a l’air gentille mais bon, admettez que c’est suspect. C’est encore plus suspect quand, effrayée par les questions de Kyra, l’inconnue s’enfuit en devenant une fée qui s’envole par la fenêtre !
The Bureau of Magical Things opère alors un retour en arrière de 8 heures (tous les pilotes de série y sont forcés maintenant, vous savez bien que c’est la loi) et redécompose comment la journée de Kyra a pu tourner ainsi. Les spectateurs, eux aussi, vont essayer de comprendre ce qui a bien pu se passer… et découvrir que parmi nous existent des fées et des elfes.

The Bureau of Magical Things a un peu la main lourde, pour être honnête. Là où certaines séries pour la jeunesse misent sur un minimum d’intelligence de la part de leur public (genre, disons, Nowhere Boys ou Gortimer Gibbon’s Life on Normal Street), la série est plutôt du genre à partir du principe que son audience est totalement incapable de comprendre les choses les plus élémentaires. Tout dans cet épisode introductif apparaît donc comme explicité à outrance, et, pire encore, accompagné par une musique dictant à chaque instant comment interpréter la moindre action apparaissant à l’écran. Je veux bien qu’on ait affaire à un jeune public, mais The Bureau of Magical Things n’est quand même pas destiné aux moins de 3 ans. Ce parti-pris est assez insultant, d’autant que rien dans cet épisode n’est très compliqué et que, si tel avait été le cas, il aurait suffit de raconter l’histoire de façon entièrement chronologique et le tour était joué, au pire. C’est sûrement ce manque de confiance dans l’intelligence ou l’attention des spectateurs qui a incité Nickelodeon à acheter la série pour la diffuser aux USA, parce que vous savez que le public pré-ado américain est absolument habitué à ce genre de pratiques et à quasiment rien d’autre…

Quoi qu’il en soit, rien dans ce premier épisode n’est follichon, mais en revanche, il est assez intéressant de voir que trois personnages féminins se détachent rapidement, et que The Bureau of Magical Things a trouvé des personnalités plutôt intéressantes à mettre en avant. Kyra apparaît ainsi comme bosseuse, mais sympathique ; elle a fort caractère mais est d’un tempérament aimable qui permet une certaine forme d’identification sans la rendre transparente.
La jeune fée qui l’a recueillie, (évidemment) nommée Lily, est douce et obéit à son professeur, mais elle est aussi un peu timide, et a carrément tendance à s’effacer devant l’adversité. Ca n’en fait pas un personnage ridicule, mais cela laisse augurer d’éventuelles pistes d’évolution pour elle. A l’inverse, la jeune elfe Imogen est prompte à exprimer des émotions négatives comme l’impatience ou l’énervement, elle n’hésite pas à voler un livre magique, mais elle est affirmée et très fière de sa condition d’elfe. Pour elle aussi, il est possible de voir comment la série peut la conduire à évoluer, car pour le moment elle n’est pas dépeinte comme une « méchante », juste comme imparfaite.
Dans le fond Lily et Imogen représentent deux parties de la personnalité de Kyra elle-même. Quand il s’avère que c’est leur dispute qui a conduit Kyra à toucher ce fameux livre magique, absorbant alors les pouvoirs autant des fées que des elfes, il devient clair que c’est la coopération, et non l’opposition, qui les aidera toutes les trois. En tous cas ce sont les éléments que The Bureau of Magical Things semble mettre en place…

Ce qui fait l’intérêt de la série, comme celui de la plupart des séries pour la jeunesse produites en Australie d’ailleurs, c’est que contrairement aux produits Disney ou Nickelodeon, il s’agit d’une série feuilletonnante. Eh oui ! Les 20 épisodes de la saison diffusée l’été dernier suivent un fil rouge, et c’est devenu rarissime à la télévision américaine (je me faisais encore la réflexion il y a quelques jours que malgré ses louables tentatives d’apporter un peu de fraîcheur dans le panorama des séries US, la nouvelle série Sydney to the Max reste éminemment procédurale).

Alors, si comme moi parfois, vous avez envie de retomber un peu en enfance, si vous voulez voir une série fantastique inoffensive (qui n’est pas The Other Kingdom : on avait dit qu’on ne parlerait pas de The Other Kingdom), ou que vous cherchez quelque chose à regarder avec des enfants, je recommande chaudement The Bureau of Magical Things, ses fées, ses elfes, sa grande bibliothèque de livres magiques, et ses trois personnages féminins un tout petit peu plus complexes que la moyenne.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

2 commentaires

  1. Tiadeets dit :

    Oh, ça m’a l’air sympa tout plein, ça dis-moi donc !

  2. Mila ♥ dit :

    Ooooh ça me parle bien, ça ! Je n’ai pas d’enfants, mais c’est pas grave, je peux la regarder avec moi-même 😀
    Et c’est vrai que j’avais fait gaffe au côté « séries jeunesses rarement feuillettonnantes » mais du coup tu m’as donné de quoi réfléchir, parce que maintenant que j’y pense….

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