Il vous souvient peut-être qu’au tout début de la saison 8 de Séries Mania (c’était il y a une éternité, on a dormi depuis ; au moins une dizaine d’heures !), je vous parlais de la durée des épisodes de séries, qui n’est pas gravée dans le marbre comme on pourrait le croire. On trouve donc, et ça n’a rien de nouveau, de nombreux dramas dont les épisodes ne durent qu’une demi-heure, sans que cela choque quiconque si ce n’est les téléphages qui ne connaissent de la télévision que les séries étasuniennes. C’est pas grave, ça se soigne.
Tempel est ce type de série : il ne s’agit clairement pas d’une comédie, ni d’une dramédie, et son sujet sombre ainsi que son traitement peu gai nous rappellent que l’on peut faire du drama en une demi-heure.
A une condition, cependant : utiliser ce format avec intelligence. Ce n’est hélas pas nécessairement le cas de Tempel…
Mais d’abord, parlons un peu du sujet de la série : Mark Tempel est un infirmier à domicile qui apporte des soins à des personnes malades et/ou en fin de vie. Ce n’est pas un métier très lucratif, et le foyer Tempel a souvent des fins de mois difficiles dans le petit appartement que Mark, sa femme Sandra, et leur fille adolescente Juni, occupent.
C’est précisément par cet appartement que les problèmes arrivent : leur immeuble est convoité par des entrepreneurs et après avoir refusé de déménager, les Tempel commencent à être harcelés. Au point que dans le premier épisode, des hommes armés de battes de baseball investissent l’appartement et détruisent tout sur leur passage, bien décidés à impressionner la petite famille au point de la faire fuir. Si la peur est définitivement présente dans les réactions, l’obstination en est une autre : les Tempel refusent de partir. Cet appartement est le leur ; cet immeuble est le leur ; ce quartier est le leur.
Mais pendant cette intrusion, les hommes de main ont brisé quelque chose d’important : le violon de Juni, qui devait lui ouvrir les portes d’une école de musique d’ici quelques mois. Pour sauver l’avenir de sa fille, Mark Tempel décide donc de retourner auprès de Jakob, un homme qui l’a tiré du besoin voilà des années. Les deux hommes ne s’étaient pas vus depuis bien longtemps ; depuis, en fait, que Sandra avait posé un ultimatum à Mark : celui d’arrêter les rencontres de boxe… et les activités illégales en général. Mark, toutefois, a une idée bien précise en tête : il veut participer à un ultime match afin de récolter l’argent nécessaire à l’achat d’un nouveau violon. En revenant vers Jakob après tout ce temps, il met un doigt dans un engrenage qui va le ramener à la vie de crime qu’il avait jadis menée…
A l’histoire de Tempel, je n’ai rien à reprocher : c’est intéressant de parler de gentrification dans un crime drama ; plutôt que de voir les choses sous un angle systémique, Tempel choisit de n’y voir que des rapports de force concrets. Ainsi, battes de baseball, gangs de box et poignards se succèdent, plutôt que des démonstrations abstraites sur la raison pour laquelle les pauvres sont boutés hors de leur habitation.
Non, le souci que j’ai avec Tempel, c’est qu’en une demi-heure, la série n’a pas le temps de tout mettre en place, alors elle fait un choix que je trouve hautement critiquable : elle décrète que si c’est comme ça, elle racontera son introduction non pas sur un épisode, mais deux. C’est-à-dire qu’en gros, Tempel n’aurait pas dû être une série d’une trentaine de minutes, ça ne correspondait pas du tout à ses objectifs, à son traitement, à son rythme. Si son premier épisode était incapable de procéder à l’exposition de l’intégralité de la situation, alors il en fallait un plus long, voilà tout. Dieu sait que je n’ai rien contre les dramas d’une demi-heure (encore heureux, vu ma propension à voyager téléphagiquement !), mais la moindre des choses c’est d’écrire en conséquence.
Résultat, si Tempel est loin d’être une mauvaise série (3 épisodes étaient projetés à Séries Mania, et le 3e est en l’occurrence très fort émotionnellement), son premier épisode, lui, est vraiment raté. Pris individuellement, il laisse froid, parce qu’il est incomplet. Or un épisode introductif devrait être précisément cela : un épisode qui introduit les données nécessaires à la compréhension des enjeux de la série. Dans le cas de Tempel, ce sont les deux premiers épisodes qui remplissent ce rôle, signe d’un échec quant au choix de format.
A cela il faut également ajouter que les personnages sont définis par ce qui leur arrive, pas qui ils sont (je ne suis pas entièrement sûre que qui que ce soit dans Tempel ait une personnalité), et que certaines intrigues semblent parfois un peu grossières, quand bien même elles ne manquent pas de sens dans le contexte de la série.
C’est dommage que Tempel ne soit pas mieux pensée, mais il faut reconnaître qu’elle a trop peu de concurrence, en ce qui concerne ses thèmes, pour qu’on fasse la fine bouche.