Puisque cette saison on ne saurait parler séries sans parler de voyages dans le temps (ne vous inquiétez pas : comme toujours, cela se tassera lorsque l’essentiel des nouveautés sur le sujet seront annulées), parlons donc de Making History, une comédie brandie par FOX à la mid-season alors que le gros du peloton a débarqué il y a plusieurs mois déjà. Les dialogues du pilote indiquent que ça n’était pas du tout prévu, d’ailleurs, puisque la série se déroule en partie en 2016, et que FOX n’a pas daigné subventionner un peu de post-prod pour corriger cela.
Dans Making History, Dan est un type minable qui a découvert dans les affaires de feu son père un sac de sport géant qui sert de machine à voyager dans le temps. Lors d’un voyage (on ignore si c’est le premier) en 1775, Dan a rencontré Deborah, une jeune femme dont il s’est épris, mais ce faisant il a sans le vouloir influencé le passé et… court-circuité rien moins que la Révolution américaine ! Lorsqu’il s’en aperçoit, il est déjà trop tard, et le cours de l’Histoire a été changé. Il se précipite donc pour recruter un professeur d’Histoire, Chris, afin de l’aider à remettre le monde dans le droit chemin.
Ce sont surtout ses aspects comiques qui rendent Making History légèrement différente des autres séries peuplant le genre. Et ce, quand bien même l’humour n’est pas toujours des plus fins…
Ses enjeux sont, eux, très classiques : bien souvent, la fiction de voyage dans le temps consiste précisément à lutter contre le changement du passé (accidentel ou mal intentionné). Celui-ci a, dans le cas de Making History, été provoqué par Dan alors qu’il pratiquait une forme de tourisme temporel qui n’a même pas l’excuse d’être aussi idéologiquement importante que celle de Send Me. Il est le type-même du héros qui ne sert à rien : il n’est pas non plus l’inventeur de la machine, n’a aucune connaissance historique, et même sur un plan humain, rien n’est en jeu pour lui… bref, il ne sert que d’avatar au spectateur dans la série, sans avoir la moindre plus-value au-delà de cette fonction (un trope agaçant que, depuis que je regarde The Magicians, je surnomme le « syndrome de Quentin »).
Les seuls moments où pour le moment, Making History réussit quelque chose, c’est dans son commentaire sur l’époques à laquelle elle se déroule : 1775 ne se présente pas sous la forme d’un idéal qu’un certain patriotisme a popularisée avec les âges, mais une époque sale, et difficile à vivre pour les femmes et/ou les personnes racisées.
Ponctuellement, Making History tire très bien avantage de cela : les interventions de Chris, qui va se prendre une solide dose de racisme dans la tronche (bien-sûr tournée sous la forme de l’humour, mais violente tout de même), soulignent bien cet état de fait, et sont nécessaires. On n’est pas dans 11.22.63 ici, et il ne s’agit pas d’ignorer la place des minorités dans cette période de l’Histoire. Or, plus important encore, Making History brille sur la fin de son premier épisode en soulignant que si, en 2016, les choses sont meilleures (par exemple en matière d’esclavage), elles sont loin d’être résolues. Une réplique en particulier constitue le seul moment où j’ai ri pendant ce pilote, et il est dommage qu’elle soit apparue autour de la 20e minute… Si Making History parvient à jouer sur ce genre d’humour inhérent à son sujet, plutôt qu’en plaisantant sur des fluides corporels, elle tient quelque chose.
Las, je n’ai que peu d’espoir. Tout dans le ton de la série indique qu’il faut plutôt compter sur un humour potache qu’un commentaire socio-historique incisif. Si cela se confirme, et après tout Making History n’a que 9 épisodes pour boucler son intrigue, ce sera un véritable gâchis ; bien des choses sont plus faciles à dire sous couvert d’humour que dans un drama traitant sérieusement les voyages temporels. Je n’ai pas vu Time Traveling Bong, mais je ne pense pas que la série ait réussi à faire beaucoup mieux de ce côté-là.
La quête d’une comédie de voyage dans le temps acerbe se poursuit donc… mais c’est le moment idéal pour la mener.