Huis clos

5 mars 2017 à 13:29

Au début de The Good Place, je n’étais pas d’un enthousiasme débordant, il faut le dire ; de toute façon inutile de le nier, les preuves sont là. La série a eu toutes les peines du monde à me convaincre, et ce alors qu’elle avait un double-épisode pour le faire en guise de lancement. Pendant plusieurs semaines, je ne lui ai donc pas accordé plus d’attention que je ne l’avais initialement fait en septembre, mais ça n’a pas été le cas de ma timeline sur Twitter, qui s’est en particulier (pour ne pas dire exclusivement) manifestée lorsqu’a été diffusé le dernier épisode de la saison 1. Quel twist, s’accordait-elle à dire, quel cliffhanger !

…Bon, je vois ce que c’est. Me voici donc lancée dans une intégrale de The Good Place. Attention, en dépit de mes tentatives de les maintenir dans le « mauvais endroit », des spoilers se sont peut-être glissés dans la review ci-dessous.

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La bonne nouvelle, c’est que j’ai compris pourquoi ça ne collait pas entre la série et moi au départ : je m’attendais à ce qu’elle me semble drôle. Erreur de débutante : The Good Place n’est pas à regarder comme une comédie, ni même vraiment une dramédie, mais plutôt comme un conte moral qui tente à tout prix de ne pas nous braquer juste parce qu’il cite Lao Tseu, Kant ou Socrate (voire même Sartre, implicitement), et essaye donc de faire des trucs loufoques. Ce n’est pas drôle, en tous cas pas pour moi, mais c’est divertissant, et ce devrait être suffisant en un sens… en attendant que le conte philosophique prenne de l’épaisseur. Ce qui, fort heureusement, se produit de façon constante.

En fait une bonne partie de ce que je prenais pendant longtemps pour des défauts dans The Good Place, a finalement du sens, quelque part, lorsqu’intervient son twist de fin de saison. Le fait que le « bon endroit » soit trop parfait par exemple, est plutôt logique quand on considère les conditions qui nous sont révélées de sa conception. La bienveillance un peu chiante de Michael est du même ordre. Quant au fait qu’il soit difficile de s’attacher aux personnages en dépit du fait que tous (sauf Eleanor, bien-sûr) soient décrits comme absolument parfaits, il trouve au final une explication.

C’est d’ailleurs assez intéressant la façon dont The Good Place ne nous a pas explicitement préparés à une révélation, essayant de nous occuper avec le secret d’Eleanor (partagé initialement par Chidi, puis d’autres protagonistes), tout en nous poussant à nous interroger sur certaines choses. En mettant en scène des conflits pas vraiment entre les personnages mais plutôt internes à chaque personnage, The Good Place nous force à nous demander si certains ont vraiment leur place ici (en ce qui me concerne, c’était particulièrement vrai pour Tahani, mais à lire les reviews maintenant que j’ai fini la saison, je comprends que d’autres aient eu cette réaction pour Chidi également).
Voilà qui rejoint un peu la question que je me posais au moment du pilote : si les protagonistes qui entourent Eleanor ont mené une existence si parfaite jusqu’à leur mort, voire au-delà, comment se fait-il que les humains envoyés au « bon endroit » soient capables de manifester de la négativité ? La réponse, dans le dernier épisode, est satisfaisante de ce côté-là, quand bien même elle n’est pas du tout celle à laquelle je m’attendais, noyée que j’étais dans des considérations relativistes sur « ses actions font de l’humain quelqu’un de bien, mais cela ne l’empêche pas d’éprouver des choses plus conflictuelles ». N’empêche qu’au final, et ce que je rie ou non, j’étais engagée dans la réflexion de fond de The Good Place sans même y prendre vraiment garde.

Les questions que pose The Good Place sont intéressantes, dans l’absolu (quelles sont les caractéristiques d’une bonne personne ?), à un niveau personnel (où irais-je, moi, s’il y avait un « bon endroit » et un « mauvais endroit » ?), mais aussi bien-sûr au sein de son propre univers (au final, existe-t-il vraiment un « bon endroit », et que faut-il pour y être envoyé ?), en plus de ses intrigues plus terre-à-terre, si je puis dire, au sujet de ses protagonistes, de leurs amours et de leur sort au-delà de la première saison. C’est plutôt un tour de force que la série accomplit ici derrière ses allures de comédies farfelue et colorée, pour ceux qu’elles font rire. Ce n’est pas mon cas, mais je me retrouve dans le reste et j’admets bien volontiers que si les blagues m’ont souvent laissées de marbre, ça n’a pas été le cas de ses axes les plus philosophiques et/ou mythologiques. Si bien qu’en quelques heures, je finissais mon marathon sans même voir le temps passer, et je suis (naturellement) pleine de questions quant à la saison 2. J’espère qu’on nous montrera d’autres « endroits » comme on a pu découvrir « l’endroit moyen », au passage.

La réalité des choses, c’est que les séries sont comme les personnes : ni entièrement bonnes, ni totalement mauvaises, mais capables de trouver une forme de rédemption. Enfin j’espère. Et maintenant si vous voulez bien m’excuser, j’ai organisé une collecte de fonds pour subventionner des greffes de moustaches en faveur de chatons malades… j’ai du karma à améliorer.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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