Mrs. Officer

16 août 2016 à 18:00

BeatStory-650

Comme je vous le disais ce matin, notre semaine dédiée aux flics en uniforme se balade aujourd’hui ailleurs qu’aux USA. Mais plus encore, la série dont on va causer cet après-midi a la particularité d’être l’une des rares séries à présenter des flics en uniforme à une autre époque. Il s’agit de WPC 56, qui se déroule en… je vous dis l’année ou je vous laisse deviner ?

Pourtant la chose n’est pas totalement nouvelle : dés 1914, Nina Boyle et son assistante Margaret Damer Dawson, deux femmes engagées dans la lutte féministe, créent un service appelé « Women Police Volunteers », destiné de toute évidence à accueillir des femmes bénévoles au sein de la police, afin de prêter main forte notamment face à l’afflux grandissant de réfugiés de guerre. Il faut dire que dans les circonstances de la Première Guerre mondiale, beaucoup de femmes arrivées de Belgique notamment se trouvent recrutées par des réseaux de prostitution ; le WPV envoie donc des patrouilles de femmes, en particulier aux abords des voies ferrées, destinées à venir en aide aux femmes réfugiées avant que des proxénètes ne leur mettent la main dessus. Mais cette initiative par et pour les femmes a des inconvénients : les volontaires ainsi recrutées ne sont pas vraiment des policières ; elles n’ont notamment pas le droit de procéder à des arrestations. Ce n’est que l’année suivante qu’une dénommée Edith Smith devient la première femme constable (le terme britannique pour agent de police) autorisée à avoir ce pouvoir comme l’ont déjà tous les officiers masculins. Le WPV a ensuite évolué sous la supervision de Margaret Damer Dawson en devenant le Women’s Police Service, lequel se trouve hélas dissous au terme de la Première Guerre mondiale comme beaucoup d’organisations majoritairement féminines.
Les années qui suivent voient les droits et les devoirs de ces femmes évoluer au gré de la législation et des consignes internes. Pour vous donner une idée du climat, en 1921 il est par exemple décidé que les femmes se mariant devraient impérativement démissionner les services de police (une obligation fort heureusement non-rétroactive pour les femmes déjà mariées à cette date), et plus tard en 1937, les femmes constables sont autorisées à prendre des empreintes (j’essaye de trouver les raisons qui « justifiaient » de les empêcher jusque là, je sens que ça doit être savoureux).

Bref vous l’avez compris, des femmes dans la police, en 1956, ça n’a rien d’une chose radicale… mais cela ne signifie pas pour autant que l’idée est bien acceptée.

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C’est ce dont parle WPC 56 (pour woman police constable), sans faire grand mystère de ses intentions. Comme beaucoup de séries équivalentes, elle s’attache à prendre un personnage féminin idéal : Gina Dawson (…Dawson, vous l’avez ?), une jeune recrue qui dans le premier épisode vit son tout premier jour dans le commissariat Brinford, un tout petit service de police (fictif) situé Birmingham. La fraîcheur optimiste et le tempérament obstiné de la constable Dawson jouent moins en sa faveur dans cette mutation que le manque d’effectifs du commissariat, et on lui fait bien sentir dés le début quelle est sa place dans l’environnement de travail, forcément très masculin (il y a juste une secrétaire), de l’endroit. En fait… sa place est littéralement dans un placard, pour tout dire.
WPC 56, avec toute la finesse d’une série quotidienne diffusée au beau milieu de l’après-midi et qui connaît son public, met donc en scène les petites allusions et les grandes humiliations de ces premières heures passées dans ses nouvelles fonctions. Vraiment, tout y est, la seule chose qui manque c’est peut-être une main aux fesses. Patience, la saison n’est pas finie.

Je vous rassure, WPC 56 a tout de même quelques autres choses à raconter, souvent plus intéressantes que la répétition des insultes sexistes plus ou moins subtiles que se prend Gina Dawson. Car même si son angle choisi, celui d’une femme essayant d’entrer dans un milieu professionnel viriliste, apporte quelques moments intéressants (notamment au sujet des obligations de l’héroïne en tant que femme lorsqu’elle ne porte pas l’uniforme, comme on le verra vers la fin de l’épisode), WPC 56 ne s’arrête pas là. La série a aussi l’élégance d’éviter la vision tunnel et de montrer aussi à quoi ressemble le travail des policiers de l’époque, soulignant aussi bien les ressemblances avec les séries policières que l’on connaît (arrestations musclées, interrogatoires…) que les différences (aussi bien en matière de procédure que de matériel, vu que par exemple la prise d’ADN est forcément exclue).

Cela permet à la série de raconter quelque chose qui devrait être évident, mais qui n’apparaît vraiment que lorsqu’on nous raconte le travail de policiers de jadis : la fonction de flic est le reflet de la société de son époque. Les réactions de différents personnages face à un homme noir immigré de Jamaïque (on est en plein milieu de la « Windrush Generation ») accusé d’avoir agressé une femme, par exemple, sont parlantes. Évidemment, l’héroïne, elle, a un peu moins de préjugés sur la question, parce qu’elle est l’héroïne ET parce qu’en tant que femme elle perçoit des oppression qui échappent totalement à l’œil de ses collègues. Mais il est évident que Dawson lutte péniblement contre un système qui la dépasse et qui n’est pas prêt à la remise en question… même si, au vu de la conclusion de l’épisode, ce sera sans doute nécessaire à un moment ou à un autre.

WPC 56 a les qualités de ses défauts. Elle aborde ces questions avec un ton simpliste, sans vraiment essayer d’aller très loin dans son propos… mais précisément ça la rend facile à regarder en diable ! Les personnages nous sont présentés de façon assez unidimensionnelle eux-mêmes, déterminant rapidement qui est « gentil » (l’enquêteur qui, toutes proportions gardées, accepte d’entendre l’avis de Gina Dawson sur une affaire) et qui est « méchant » (le flic qui passe un accord avec un suspect avant de le laisser filer). A l’impossible nul n’est tenu : on est devant un divertissement gentillet avant tout.
Force est pourtant de reconnaître qu’ils ne sont pas des dizaines, les dramas à s’essayer à ce sujet.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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