Jour polaire/Midnattssol n’est pas un projet récent. Dans mon imaginaire, cela signifie que la série a eu le temps d’être pensée en long en large et en travers, et qu’aucune dimension n’a pu être négligée. Après tout, il semble plus pardonnable qu’une série américaine, développée pour un network en l’espace de parfois quelques mois à peine, soit décevante : dans l’urgence il est difficile de penser à tout.
Alors vous comprenez que découvrir la série hier soir lors de Séries Mania, et m’apercevoir de son grand nombre de faiblesses, m’a un peu mise en colère.
Le meurtre atroce d’un Français à quelques kilomètres de la petite ville de Kiruna, dans le Nord de la Suède, provoque la collaboration entre le bureau du procureur local et la police française. Et attention : quand je dis atroce, c’est vraiment atroce.
C’est aussi atrocement grossier : Jour polaire/Midnattssol est de toute évidence en train de jouer la carte du choc dans sa scène d’ouverture afin de retenir l’attention de ses spectateurs ; ça marche, bien-sûr que ça marche. Mais ça n’est ni subtil ni très intéressant. Les créateurs Måns Mårlind et Björn Stein, forts du succès de Bron/Broen, recyclent ici une recette qui a fait ses preuves à des fins qui paraissent quasiment alimentaires. Jour polaire/Midnattssol n’a pas grand mérite à ne pas être un ratage complet : elle a de qui tenir. Cela ne signifie pas qu’elle soit réussie pour autant.
A la réflexion… « ni subtil, ni très intéressant » pourrait être un excellent résumé en 5 mots du démarrage de la série. Il n’y a pas un cheveu qui dépasse dans Jour polaire/Midnattssol, tout est imaginé pour être utile. Cela signifie que l’émotion est en grande partie absente (et c’est plus Leila Bekhti et son interprétation à vif qui accomplit ce miracle), et qu’il n’y a aucune réflexion, aucun fond. L’épisode introductif est vraiment là pour ne nous donner que le strict nécessaire, certes avec une réalisation propre et dans des décors fabuleux, ce qui n’est pas détestable, mais sans jamais fournir le moindre effort pour se distinguer. En pleine vague scandinave, Jour polaire/Midnattssol s’avère être une production comme tant d’autres : regardable mais générique, bien conçue mais redondante, et thématiquement pauvre. Il faut d’ailleurs attendre le second épisode (également projeté hier) pour que des particularités culturelles viennent démontrer pourquoi situer l’intrigue à Kiruna (et alentours) n’était pas le fruit d’un lancer de fléchettes sur une carte.
Mårlind et Stein expliquaient hier en fin de séance qu’il s’agissait d’une série sur l’origine et l’identité ; mais s’il est vrai que dans les deux épisodes projetés, une poignée de lignes de dialogues ont effectivement abordé le sujet, on ne peut franchement pas dire que la réflexion soit poussée. Ou qu’il y ait une quelconque réflexion à vrai dire. Service minimum.
Je ne sais pas, peut-être que je sature aussi ; beaucoup de séries projetées aux festivaliers lors de Séries Mania cette année portent sur des meurtres et/ou des disparitions, et emploient des méthodes similaires, probablement parce qu’il est avéré qu’elles marchent. Donnons aux spectateurs ce qu’ils veulent ! Ou, du moins, ce qu’on suppose qu’ils veulent étant donné qu’on n’importe quasiment rien d’autre de la Scandinavie (ni d’ailleurs ; ne me relancez pas sur le sujet) et qu’on ne va quand même pas prendre de risques. Le problème de cette pratique c’est qu’on crée des tendances qu’on épuise en l’espace de quelques années, et qui provoquent rapidement une forme d’overdose. Bron/Broen, c’était aussi le côté unique que en faisait l’attrait ; mais après plusieurs remakes et copycats, il est temps de passer à autre chose.
Alors aujourd’hui, dans mes reviews de Séries Mania, je commence par vous parler de Jour polaire/Midnattssol, et ensuite on parlera de séries sans meurtre glauque pour le reste de la journée. Parce qu’à un moment, marre, quoi.