Pour mon premier pilote de l’année, j’ai décidé de m’en remettre à vous : sur Twitter, vous pouviez m’aider à trancher entre deux séries qui me tentaient : The Strip, une dramédie néo-zélandaise dont l’intégrale en DVD a été mon cadeau de Noël de 2015, et 90 Plein Street, une série politique sud-africaine dont je repousse le visionnage depuis plusieurs mois. Eh bien elle attendra encore un peu ! A une écrasante majorité, vous avez décidé qu’on démarrerait 2016 par un trip en Nouvelle-Zélande. Enfin, un strip, en l’occurrence.
Melissa Walker est une avocate performante (en fait, la meilleure de son cabinet), organisée et responsable. Mais ce ne sont pas des qualités qu’elle n’applique qu’à son travail, et si elle parvient à jongler entre 12 heures de travail quotidiennes, et sa vie personnelle, c’est bien parce qu’elle est capable de planifier jusqu’à la plus petite minute de son existence avec son mari Glenn et leur fille Paige.
Ce qui n’apparaissait pas sur son agenda, c’est qu’un jour, elle surprendrait Glenn en train de la tromper. Avec un homme.
C’est la goutte qui fait déborder le vase, mais The Strip fait un plutôt bon job lorsqu’il s’agit de nous expliquer pourquoi une crise guette Melissa de toute façon : l’épisode s’ouvre ainsi sur un cauchemar pendant lequel elle est tuée sur le coup par une météorite, dans son bureau. Dans ce cauchemar, personne n’est touché de sa disparition, ses collègues ne se souviennent même pas de son nom quelques minutes après sa mort, et le pire, c’est que même si être tuée de cette façon n’est pas courant, elle est seulement la deuxième personne à qui cela arrive. Jusqu’au bout, sa vie aura été sans intérêt.
Cette angoisse accompagne Melissa, et une grande partie de l’épisode introductif de The Strip, de façon implicite alors que sa journée se déroule a priori comme les précédentes. Le ver est dans la pomme : elle est bien malgré elle en train progressivement d’analyser sa vie. Il lui faudra peu de temps avant de découvrir que les choses vont au-delà d’une simple affaire extra-maritale. Le problème n’est ainsi pas vraiment Glenn avec lequel de toute façon elle n’avait plus vraiment de lien, ni sa fille Paige qui la méprise et se sent abandonnée mais sûrement à raison. Le problème, c’est que cette vie, là, si bien huilée, si parfaite, si ordonnée, eh bien elle ne fonctionne pas.
Pour quiconque connaît le pitch de The Strip (ou bien, vous savez, son titre), il est clair assez vite que le changement de trajectoire de Melissa va prendre une orientation bien précise : l’un de ses clients, qui possèdent des clubs dans un quartier pas très cossu de la ville, vient justement à elle parce qu’il est sur le point de perdre l’un d’eux. Presque dans le même temps, elle a été invitée à l’enterrement d’une soirée de jeune fille d’une collègue, où évidemment se trouve un stripper ; la soirée, qui conclut une journée atroce pendant laquelle la vie de Melissa semblait s’être effondrée autour d’elle, parvient à lui redonner le sourire, et achève de lui donner une idée : reprendre le club en perdition, nommé The Gates of Heaven, et ouvrir un club de strip tease à son tour. Avec un twist : il serait exclusivement réservé aux femmes, et les danseurs seraient tous des hommes.
On ne peut pas dire que l’imprévisibilité de The Strip soit son point fort, donc, par contre le premier épisode parvient très bien à donner à cette suite logique d’évènements quelque chose de très humain : c’est le parcours de Melissa qui compte, pas de montrer à tout prix de la chair fraîche (mais on en aura quand même un aperçu en fin d’épisode, je vous rassure !). Le strip tease devient, dans The Strip, un moyen et non un but. Ce que recherche Melissa, de son propre aveu, c’est un nouveau sens à sa vie, voire même un premier sens tout court, mais c’est aussi voire surtout de retrouver le sourire, non parce qu’il y a des hommes nus, mais parce que les femmes viennent chercher dans un endroit de ce type est précisément ce qu’elle veut ressentir aussi souvent que possible. C’est, au passage, un choix que je trouve bien plus intéressant que celui de nombre séries se déroulant dans l’univers du travail sexuel : plusieurs séries de la planète préfèrent imposer se changement à leur personnage, généralement via un héritage (c’est le cas de Hard, c’était le cas du projet The Whole Shebang, et même d’une intrigue de Desperate Housewives). Ici la décision est consciente, et je trouve ça appréciable. Sans compter que la façon dont Melissa maîtrise parfaitement (…pour le moment ?) sa reconversion me rappelle l’esprit d’entreprise d’O Negócio.
Après il faut bien garder à l’esprit que The Strip commence un peu à vieillir visuellement ; si les fringues, les cheveux et le maquillage des personnages ne l’avaient pas assez clairement annoncé, ça se sent bien dans le rythme (ou absence de !) du pilote. Or si la dernière décennie nous a bien appris un truc, c’est que désormais, on est habitués à ce qu’il n’y ait plus de temps mort, plus de silence, plus d’hésitation. The Strip expérimente parfois au cours de son épisode introductif ces petites pannes, qui ne sont pas en soi dommageables, mais qui se voient. J’ajoute que sa scène d’introduction m’a rappelé la façon dont Ally McBeal essayait d’exprimer les conflits internes par la fantaisie et l’absurde, et que c’est pas la pire des références non plus.
Je vous avoue que quand j’ai commandé le DVD de The Strip au Père Noël, je ne savais d’elle que ce que j’en avais lu à l’écrit (et qui m’avait poussée l’an dernier à écrire un fun fact à son sujet). C’est donc à l’aveuglette que je commence 2016 et, ma foi, il y a vraiment de pires façons de démarrer l’année !