The Mama Bear Show

6 juillet 2015 à 17:06

Ça fait des mois que je bloque sur Hanyeodeul en me promettant de finir la série parce que, c’est trop bête, il ne me reste qu’une poignée d’épisodes à voir. Pas de chance, je suis le contraire de motivée à mesure que la série progresse. Ce weekend j’ai décidé que je jetais l’éponge. On va être honnêtes : j’ai du mal avec beaucoup de séries sud-coréennes, mais une fois de temps en temps, j’aimerais en finir une, et je n’y arrive ja-fucking-mais. Ça m’énerve passablement, comme vous pouvez le voir. Même quand j’en trouve une où il n’y pas trop de romance, on s’enlise tellement dans des scènes sans intérêt et des détours insupportables que j’ai juste envie de m’énucléer avec ma souris. Vous avez déjà essayé de vous énucléer avec une souris d’ordinateur ? C’est très peu pratique.
Voilà, donc je reviendrai peut-être à Hanyeodeul si jamais un élan de courage me vient (surtout que c’est trop bête, j’ai pris des tonnes de notes sur les épisodes déjà vu ; mais les « c’est trop bête » ont arrêté d’être une raison de continuer à regarder une série), mais en attendant, je passe à autre chose, histoire de ne quand même pas tenter une série sud-coréenne par an.

A la série Angry Mom, peut-être. Parce que ça c’est un pitch original (d’un autre côté je disais ça pour Hanyeodeul aussi). Ça c’est une idée intéressante. Et ça relativement peu de chances de virer à la romance sirupeuse. Ce qui ne garantit rien, mais bon, c’est toujours ça de pris.
Or donc, Angry Mom, de quoi ça cause ? De Kang Ja, une mère qui découvre que son adolescente de fille, Ah Ran (qui est chiante, boudeuse, caractérielle et qui ne parle plus à personne à la maison, une adolescente quoi), est dramatiquement harcelée au lycée. Ça n’excuse pas l’attitude exécrable de l’adolescente à la maison, mais ça l’explique quand même pas mal. Ce harcèlement a pris de telles proportions que désormais Ah Ran porte de nombreuses marques et bleus sur son corps, ce qui ne manque pas d’horrifier sa mère lorsqu’elle les voit pour la première fois. Que va faire Kang Ja à partir de là ?

AngryMom-650

Eh bien il s’avère que ses options sont assez limitées. Lorsqu’elle essaye d’en parler au professeur principal d’Ah Ran, l’affaire est vite étouffée, en grande partie parce que l’adolescente fréquente un lycée privé rempli de bourges dont les parents sont très puissants, et qu’en plus l’établissement est au cœur de bouleversements internes, précipités par un récent scandale. Inutile de dire que dans ce contexte, le dossier de l’adolescente est vite remisé pour éviter les soucis à la hiérarchie administrative du lycée.
Lorsqu’elle tente d’aller porter plainte au commissariat (auX commissariatS, en fait), Kang Ja découvre que la plainte doit être déposée par sa fille elle-même, ce qu’Ah Ran ne fera jamais pour les mêmes raisons qu’elle a tu le harcèlement pendant tout ce temps. Qui plus est, il faut se présenter avec des preuves et/ou la déclaration d’un témoin, et pour trouver tout ça bonne chance.
Et quand finalement, notre mère désœuvrée tente d’appeler à l’aide un juge qu’elle a autrefois connu, elle découvre que le système ne change rien aux dynamiques du harcèlement, et peut même pousser les victimes et leur famille au désespoir. Bref, ça ne règle rien du tout, à part adresser une tape sur les doigts au bourreau au bout de plusieurs longs mois de procès. Sans compter qu’Ah Ran ne veut même pas dire, ni à sa mère ni à la pâle excuse d’investigation au lycée, qui est responsable de ses maux.

Résultat, Angry Mom montre dans le premier épisode surtout une Desperate Mom (mais c’était plus ou moins déjà pris). Et la démonstration est vraiment très forte.
Qu’il s’agisse de montrer comment, par paliers, Kang Ja découvre le problème puis essaye de le régler par les voies officielles, ou tout simplement de dépeindre son sentiment d’incompétence pour communiquer avec sa fille, Angry Mom fait vraiment du bon boulot. On frémit devant ce premier épisode qui nous plonge dans une situation dramatique et ne recule pas, ou quasiment pas (j’y reviens) devant l’obstacle. C’est d’autant plus fort que l’épisode s’en charge avec peu de voix-off (un peu au début de l’épisode, plus du tout ensuite), choisissant de s’appuyer plutôt sur de longs silences pendant lesquels le spectateurs est forcé de suivre le mélange d’émotion et de cheminement de pensée de l’héroïne. Empathe tu seras, spectateur. Et tu te prendras toute la colère, tout le désespoir et toute l’impuissance dans la gueule.

C’est une grande force de ce premier épisode, et l’on devine que cette situation ne durera pas, donc autant en profiter dramatiquement. Elle ne durera pas parce que, de vous à moi, le pitch de la série est en réalité le suivant : Kang Ja, qui a eu sa fille très jeune (pensez Lorelai Gilmore) et qui ne fait pas vraiment son âge, va en fait intégrer le lycée en tant qu’étudiante, pour remonter elle-même la piste du harcèlement causé à sa fille. Et comme Kang Ja était une jeune délinquante particulièrement badass avant de tomber enceinte, elle va bouleverser le statu quo du lycée cossu. Au lieu de s’en prendre uniquement aux responsables des tourments d’Ah Ran, elle va progressivement mettre à jour les dérives de tout le système du lycée.

Si l’objectif est carrément intéressant, il faut cependant voir ce que cela englobe. Et pour cela, quelques rares scènes nous donnent en réalité des indices. Ainsi, Kang Ja tient un petit resto (tellement petit que j’ai honte d’appeler ça un resto) où elle fait régner la loi par les clients mêmes ivres, parce qu’elle est impressionnante et n’a pas peur de se montrer physiquement menaçante. Vers la fin de l’épisode, on la verra aussi nous rappeler qu’elle a été une ado bagarreuse en allant foutre le dawa dans un club du coin, probablement pour renouer avec ses connaissances de l’époque où elle était membre d’un gang. Ces quelques séquences, en tirant sur la comédie grosses tatanes, ne rendent pas service à Angry Mom : je suis certaine qu’on aurait pu montrer que l’héroïne a du cran sans la voir semer le trouble dans un club où concrètement, la réalisation emprunte à Benny Hill. Ca fait un peu tâche. On comprend bien que l’idée est de ne surtout pas faire un truc trop déprimant tout le temps, mais justement les autres scènes avaient si bien réussi à donner le ton pendant la majorité de l’épisode, qu’au final le décalage fait plus de mal qu’il ne soulage.
Angry Mom est vraiment une idée sympathique, mais je crains que sur le long terme, à mesure que Kang Ja surmontera les embûches et affrontera les responsables de la situation de sa fille, ce type de séquence ne se multiplie au détriment de l’émotion.

Au juste je ne saurais pas promettre que je vais continuer à regarder Angry Mom. J’aime bien cette relation-mère fille, douloureuse et quasi-impossible, j’aime les questions sur la parentalité qu’on voit émerger dans ce premier épisode (le mari de Kang Ja n’est pas le père d’Ah Ran, par exemple), et puis j’aime bien l’idée qu’on regarde aussi le harcèlement à un niveau plus large que la simple relation bourreau-victime, même si ici on est dans le contexte très particulier d’une administration très politisée. Il y a aussi quelque chose de très sud-coréen dans l’exploration des rapports de force entre classes sociales, et qui est largement explicité ici.
Mais enfin, si c’est pour voir Kang Ja distribuer des claques à des petits cons de lycéens dans des scènes comme celle qui clôt le premier épisode, ça me retient un peu. En tous cas si vous voulez voir par vous-mêmes, Angry Mom a été diffusée intégralement au printemps et ne comporte que 16 épisodes ; peut-être que vous serez plus motivé que moi.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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