Naufragés en plein désert

27 juin 2015 à 12:00

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Si vous ne vous êtes pas endormi en cours de lecture de l’article du début de la semaine, vous savez que depuis les années 60, les networks ne savaient plus comment faire pour que les gens regardent leurs westerns et rentabiliser leurs infrastructures. C’est ainsi qu’on verra naître des séries au ton très varié, histoire de tâter le terrain et voir si éventuellement, en mélangeant le western à autre chose, il n’y aurait pas moyen de moyenner. Bon, du coup vous savez aussi qu’il n’y pas eu moyen de moyenner, mais jusqu’au début des années 70, quelques initiatives se poursuivent ponctuellement.
Parmi les idées nées pendant la seconde partie des années 60, on peut dénombrer les comédies. Celles-ci ont rarement eu du succès, mais les networks tentent encore quelques combinaisons de temps à autres, espérant trouver de l’or là où les spectateurs ne voient que de la boue. En 1973 très précisément, la syndication joue le tout pour le tout, et sort Dusty’s Trail, une comédie au pitch qui en évoque légèrement un autre. Mais légèrement seulement, promis, hein !

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Jugez plutôt : alors qu’ils remontent le California Trail, les passagers d’une diligence et une carriole se trouvent isolés du reste du convoi. Désormais livrés à eux-mêmes, ils tentent de survivre aux dangers de l’Ouest, tout en essayant de rejoindre leur équipage. Ou la Californie, selon ce qui se produira en premier.
La diligence est conduite par Dusty, un abruti notoire dont le générique nous dit qu’il a causé (on ne sait trop comment au juste) la séparation d’avec la caravane par sa bêtise crasse. A ses côtés, on trouve généralement le chef de convoi, Mr Callahan, un homme un peu rude mais ayant un bon fond, et dont la raison d’être est en gros d’empêcher de faire tuer tout le monde. Le reste de la petite troupe compte quant 5 passagers : les Brookhaven, un couple un peu âgé de notables venus de l’Est qui vit dans la diligence ; Lulu McQueen, une danseuse de cabaret exubérante ; Betsy McGuire, une jeune institutrice innocente ; et Andy Boone, un ingénieur. Ces trois derniers se partagent la carriole.
Eh oui ! Dusty’s Trail n’est rien qu’une vilaine resucée de Gilligan’s Island transposée grossièrement dans l’univers des westerns ! Elle est après tout créée par les frères Sherwood et Elroy Schwartz, respectivement créateur et head writer de la fameuses série sur les naufragés les plus ridicules d’Amérique. Il faut dire qu’en 1973, Gilligan’s Island a disparu depuis 6 ans, et est donc abondamment rediffusée en syndication où elle continue de remplir les fouilles des annonceurs faire le bonheur des spectateurs nostalgiques ; rien ne semble alors aussi idéal que trouver une façon de ramener la série sans devoir se coltiner les négociations qui vont avec.

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Écoutez, soyons clairs : les fans de Gilligan’s Island ne peuvent pas avoir été dépaysés en regardant Dusty’s Trail. C’est humainement impossible ! Du générique à la répartition des personnages, en passant naturellement par le degré de raffinement en matière d’humour (…or lack thereof), il ne manque rien, la copie est certifiée conforme. Devant l’épisode pilote de la série (qui n’explique pas vraiment comment la petite compagnie a perdu le reste du convoi), on a vraiment l’impression d’assister à un cahier des charges soigneusement coché par les frères Schwartz tout au long des vingt minutes.
Si vous avez en tête des stéréotypes sur les pires comédies des années 70, ou bien-sûr antérieures, eh bien Dusty’s Trail matérialise tous vos cauchemars les plus secrets : c’est ridicule, surjoué, sous-écrit, c’est ni fait ni à faire. Tout comme l’original, je vous dit. Mais avec presque 10 ans d’écart entre le lancement de l’un et celui de l’autre… vite coupé dans son élan, Dusty’s Trail sera fort heureusement un four total, et annulé au bout d’une saison.

Très peu de westerns comiques ont fonctionné à la télévision américaine. Ce n’est pas spécialement étonnant : le genre du western s’était construit autour de la mise en avant de héros charismatiques, représentant des valeurs conservatrices, et vivant des aventures aptes à rappeler aux spectateurs l’esprit d’entreprise et d’aventure supposé caractériser l’Amérique. Pas spécialement le genre de contexte où l’on conçoit les bouffonneries ! Et quand on voit Dusty’s Trail, on comprend pourquoi ça ne marche pas ; et ce n’est pas simplement la faute du recyclage de Gilligan’s Island ! Revenez à 18h pour notre deuxième rendez-vous de la journée, j’aurai une preuve pour vous.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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