Deux adolescents attardés, Jack et Ben, vivent aux crochets de leurs parents dans un trou perdu de Floride. Leur rêve ? Comme Dawson Leery, ils espèrent devenir le Steven Spielberg de demain, et de créer des films inoubliables ; en attendant, ils créent de petites productions miteuses dans le garage de leurs parents. Et puis un jour, c’est le drame : lesdits parents décident de les mettre dehors pour qu’ils s’assument un peu, et gagnent leur vie par leurs propres moyens. Il ne pourrait rien leur arriver de pire !
Ou bien.
Capables de déplacer des montagnes lorsqu’il s’agit de leur amour pour le cinéma, Jack et Ben sont dotés d’un solide poil dans la main quand il s’agit d’avoir un travail. En apprenant qu’ils ont deux semaines devant eux avant d’être expulsés de la maison familiale, ils décident donc de tout faire pour forcer leurs parents à changer d’avis. Après une séance de brainstorming épique, ils tombent d’accord pour soutirer 20 000 dollars à leurs parents avant de partir ; une somme, estiment-ils, qui leur permettra de poursuivre leurs tournages sans se préoccuper de gagner leurs croûte.
L’idée est déjà contestable. Ce n’est pourtant rien en comparaison de la méthode employée.
Dans Big Time in Hollywood, FL, on ne se préoccupe pas tellement des films de Jack et Ben, et c’est tant mieux. La scène d’ouverture de la série a, dans le fond, déjà tout dit sur leur art. C’est que, par-dessus le marché, les deux compères ne sont pas exactement talentueux. A la place, on va se lancer dans une folle aventure où les choses ne vont cesser d’empirer pour eux. Car non, être menacés d’expulsion par leurs propres parents n’est vraiment pas le pire qui pourrait arriver, mais plutôt le stratagème mis en place et ses conséquences.
Bercés par des fictions stéréotypées qu’ils ont reproduites dans leurs propres films sans finesse, les frères vont échafauder un plan irréaliste, en prétendant que l’un d’entre eux est accro à la drogue et menacé par un dealer violent, incarné par un acteur de seconde voire troisième zone découvert par hasard. Et ce n’est que le début d’une spirale, parce que le problème, c’est que chaque fois qu’ils se raccrochent à leurs fictions démesurées, ils sont rattrapés par une réalité qui… surenchérit. Ce n’est pas pour rien qu’on dit que la réalité dépasse la fiction.
A la fin du premier épisode de Big Time in Hollywood, FL cependant, on n’a plus vraiment une comédie de losers sur les bras, mais une série qui tourne au cauchemar. On est moins dans l’esprit de The Drunk and On Drugs Happy Funtime Hour, mettons, qui se résumait à dépeindre toutes les façons dont la situation de départ pouvait s’avérer drôle quoiqu’exagérée, que dans celui de The Wrong Mans voire peut-être même de Dead Set : ce qui importe n’est pas tant le délire, que la façon dont la réalité dérape et entraine les deux héros dans une catastrophe quasiment impossible à arrêter.
Malgré une situation de départ intéressantes, et la perspective d’une comédie feuilletonnante dont les tours et détours sont impossibles à prévoir à ce stade, le pilote de Big Time in Hollywood, FL présente un gros inconvénient : ses deux héros. C’est bien simple : la seule chose qu’on sache d’eux, c’est leur obsession pour leurs films. Ils n’existent qu’à travers cela et la série, si elle présente plutôt bien les personnages hauts en couleurs qui les entourent (principalement leur mère Diana, dont l’inflexibilité est glaçante ; leur père Alan, une pauvre chose pour qui la pire des horreurs est un sac poubelle qui s’éventre avant d’être arrivé à la benne ; et leur meilleur ami Del, dont le QI est probablement négatif…), eux sont totalement transparents.
En particulier, rien ou presque ne les différencie l’un de l’autre. Ben a l’air légèrement moins futé que son frère Jack, mais en pratique, leurs interactions ressemblent à un même personnage qui se serait cloné et se parlerait à lui-même. Niveau promesses humoristiques, on a vu mieux.
C’est ce qui empêche Big Time in Hollywood, FL de vraiment fonctionner comme une comédie : je n’ai pas vraiment trouvé à rire ni même sourire pendant ce premier épisode.
Comme un nombre croissant de comédies américaines, il s’agit plus de partir du principe que l’humour émane de la surenchère scénaristique, que de s’embêter à écrire des dialogues ou des situations drôles. Plus on en fait, plus c’est supposé remplacer le concept d’humour. J’ai vraiment du mal à adhérer à cette tendance, je ne pense pas que ce genre d’escalade (« mais attendez, ça devient de plus en plus dingue ! ») soit de la comédie. Ce n’est pas mauvais, franchement pas, mais voilà, ce n’est pas de l’humour. Certes, c’est compliqué de répondre à la question « c’est quoi l’humour ?« , mais disons c’est comme le porno : j’en reconnais quand j’en vois. Et dans Big Time in Hollywood, FL, eh bien, je n’en vois pas.
Ça n’enlève rien à ses bonnes idées. D’ailleurs, on ne suit pas forcément une série parce qu’elle se dit être d’un genre donné, le résultat importe plus que les classifications, et Big Time in Hollywood, FL pose les bases d’une série plus que regardable. Reste que la voir comme une comédie me semble très difficile.
Ne vous attendez pas à vous taper une crise de fou-rire devant Big Time in Hollywood, FL, mais pour autant, cet avertissement bien en tête, n’hésitez pas à la tenter. Ses développements peuvent être intéressants et originaux, et, à défaut de faire s’esclaffer dans les chaumières, ça reste une propriété rare de nos jours parmi les séries d’une demi-heure venues des USA.