Pour clore notre semaine sur les séries pour la jeunesse qui valent le coup d’œil, je me suis dit que j’allais faire quelque chose que je n’ai absolument jamais fait. Prêts pour l’inédit ? Car pour la première fois, je vais vous parler d’une série pour la jeunesse… québecoise !
Cette série, c’est Le Chalet, un téléroman dont la diffusion a commencé le mois dernier sur la chaîne VRAK, mais vous le saviez déjà parce que vous épluchez religieusement le Pilot Watch.
Mais avant toute chose, laissez-moi rappeler ce qu’est un téléroman, ou plutôt ce que ce n’est pas. Car j’ai souvent vu des gens faire la confusion (et moi-même au début, j’étais pas très au clair là-dessus) entre téléroman et telenovela. Or, les deux n’ont rien à voir, puisque les téléromans ne sont absolument pas des séries quotidiennes, et il ne s’agit pas non plus de séries créées pour durer des centaines d’épisodes (même si ça peut se produire pour les téléromans les plus populaires). Un téléroman, en fait, est tout simplement une série feuilletonnante dont l’objectif principal est de parler des personnages et de leurs relations ; c’est plutôt une façon pour les Québécois de désigner un drama pur.
Nous voilà donc un peu aiguillés sur ce que Le Chalet va accomplir.
Tout commence dans Le Chalet lorsqu’une bande d’amis débarquent dans… un chalet. Ahem, bref.
L’endroit est loué par son père à Sarah, chaque hiver depuis des années. C’est devenu une tradition pour elle d’emmener en vacances ses copains Antoine, Lili et Frank, ainsi que de retrouver son petit ami Charles, et de s’adonner alors à leur passion pour les sports de glisse. Mais cette année, pour couvrir les frais de location (puisque leurs salaires de profs de skis ne suffisent pas), elle a aussi invité une fraîche connaissance, Catherine… sans en toucher un mot à ses colocataires.
Le pitch du Chalet est simplissime, donc. Il ne va guère évoluer au-delà, pour ceux qui commenceraient à se dire que ça ressemble un peu à la situation de départ de Lost Days… a priori, il ne sera pas question ici de thriller ! On n’est vraiment pas dans du high concept.
La série ambitionne plutôt de chroniquer les hauts et les bas de la vie ensemble, des interactions entre ces personnalités souvent explosives, et de vivre à leur rythme un hiver inoubliable. Le Chalet prend le pari de rendre ces personnages chaleureux, de plaisanter avec eux, de s’émouvoir avec eux, de juste prendre du plaisir à être ensemble. Et c’est d’autant plus facile qu’on nous évite la plupart des clichés dans ce premier épisode.
La première journée de la bande à la montagne est jalonnée de petites bisbilles et de grands moments de convivialité. Tout en ménageant quelques pauses pendant lesquelles certains personnages se parlent en tête-à-tête, l’épisode s’intéresse surtout aux interactions en groupe, aux dynamiques qui se mettent en place ou existent de longue date, aux échanges gais. Ici, très peu de romance, pas de secrets, pas franchement de haines et de passions : juste des vacances, ensemble, à la neige.
Je vous ai dit au début de cette review que c’était la première fois que je m’attelais à vous parler d’une série québécoise pour ados. Eh bien, je ne suis pas la seule pour laquelle il s’agit d’une grande première !
Le Chalet est en effet le tout premier téléroman de la chaîne VRAK, destinée aux 9-17 ans et actuellement en train de développer son offre de fictions originales (elle propose aussi la série MED depuis janvier dans son bloc « VRAK2 » réservé à la tranche haute de son public, où l’on peut suivre les tribulations de Medhi et ses copains, et qui est une adaptation de Soda). La commande du Chalet émane d’ailleurs de plusieurs constatations : d’une part, le fait que les jeunes québécois ont très peu de séries dramatiques nationales créées pour eux (les chaînes ayant jusque là préféré leur proposer soit des comédies québécoises, soit des dramas importés), et d’autre part, le fait que la chaîne voulait étoffer son offre pour les 13-17 ans, alors que l’essentiel de son public pour le moment est plutôt formé par les moins de 12 ans. La démarche est, qui plus est, servie par l’embauche de la jeune scénariste Kadidja Haïdara, repérée en 2011 à l’occasion d’un concours de la plateforme tou.tv et depuis à l’origine de la création de deux webséries (l’une d’entre elles, Quart de vie, reviendra d’ailleurs pour une deuxième saison au printemps). Son ton authentique permet d’éviter de s’adresser aux spectateurs avec condescendance ou simplification, en parlant leur langage.
Le résultat c’est que, contrairement à la plupart des séries que nous avons évoquées pendant la semaine écoulée, et qui essayaient de ratisser large, Le Chalet s’applique à s’adresser à son public-cible (les 13-17 ans) et à lui seul. L’idée n’est pas d’essayer de parler à tout le monde, et certainement pas d’essayer activement d’attirer un public plus âgé. Les personnages sont propres sur eux, ne jurent pas spécialement, les rares interactions amoureuses restent chastes… De toute évidence, Le Chalet ne tient pas à tout prix à élargir sa cible, et en tous cas pas à n’importe quel prix.
Le Chalet fait le pari qu’une niche peut être particulièrement porteuse, pourvu de la considérer pour un peu plus qu’une cible commerciale : un auditoire de personnes sensées…
C’est sur cette note de bon sens que finit notre semaine sur les séries pour la jeunesse… ou bien ?