Jusque là j’avais prêté assez peu d’attention à l’Obitel, l’Observatoire ibéro-américain de Fiction télévisée. Mais la sortie de son rapport 2014 m’a donné du grain à moudre et j’ai décidé de vous en faire une petite fiche de lecture, car il s’y dit plein de choses intéressantes sur la télévision de pas moins de 12 pays, on s’excuse du peu.
Mais d’abord, une brève mise à niveau pour qu’on parte tous sur les mêmes bases.
L’Obitel suit les fictions diffusées sur les chaînes gratuites dans 12 pays, qui sont l’Argentine, le Brésil, le Chili, la Colombie, l’Équateur, l’Espagne, le Mexique, le Pérou, le Portugal, l’Urugay et le Venezuela. Plus surprenant, l’Observatoire inclut les fictions des chaînes hispaniques diffusées aux USA. Cela signifie qu’en tout, l’Observatoire suivait les fictions de pas moins de 76 chaînes cette année (et je rédige ma candidature à l’heure où l’on parle), ainsi que leur impact et leurs audiences. C’est une chaîne de plus que l’an dernier.
Le rapport annuel de l’Obitel, qui fait gentillement dans les 500 pages actuellement, consiste à la fois à étudier la fiction de chacun des 12 pays de sa sphère de compétence, mais aussi à dresser des liens entre ces différents pays pour établir des tendances.
Par-dessus le marché, le rapport a aussi un thème annuel, et cette année c’était les stratégies de production transmedia (que je laisse de côté à des fins de brièveté ; le rapport s’intéresse par exemple aux tentatives de webisodes d’Aliados, dont je vous ai déjà parlé, qui ont eu d’épatants résultats en ligne… mais de très faibles résultats sur les audiences).
Évidemment, l’article ici présent n’a pas vocation à vous répéter les 500 pages du rapport, mais plutôt à en faire une synthèse rapide à lire et mémoriser, pour ceux d’entre vous, et je les sais nombreux, qui ont de la curiosité à revendre mais pas de temps à perdre.
Mais d’abord, LE chiffre de l’année : en 2013, l’Obitel a mesuré que 33 919 heures de fiction ont été produites dans les 12 pays observés. Non, vous ne verrez jamais tout ce que la télévision a à offrir, même quand votre compte Beta Series prétend le contraire.
Ce sont 4 000 heures de plus que ce que l’Observatoire relevait dans le rapport de l’an dernier ; on vient donc de vivre une année record, du moins depuis que l’Observatoire a commencé ses relevés en 2005. Les bons élèves sont le Mexique, plus grand producteur de fictions de la zone en termes de volume, suivi par le Brésil et la Colombie ; à l’inverse, l’Équateur, le Venezuela et l’Uruguay sont bons derniers.
A noter que seuls 4 des pays suivis par l’Obitel produisent plus d’heures de fiction nationale qu’ils n’en importent : le Brésil, le Mexique, l’Argentine et l’Espagne. Cela s’explique facilement par les mouvements de séries, et notamment telenovelas, dans toute la zone : la plupart des fictions naissent dans un pays et sont diffusées ensuite dans une poignée d’autres, une fluidité due en grande partie au socle linguistique commun de 10 des pays étudiés.
Ces 4 pays sont également ceux qui produisent le plus de séries, ce qui veut dire que ce ne sont pas simplement quelques fictions à rallonge qui leur permettent d’atteindre ce chiffre, mais bien une offre plus large de fictions. A titre d’exemple, le Brésil, qui est le meilleur élève de l’Obitel sur le nombre de séries nationales, a mis à l’antenne pas moins de 35 fictions nationales en 2013. A titre de comparaison, le cancre de la classe, le Venezuela, n’a produit que 4 fictions nationales sur la même période ! Et vous vous étonnez que ce pays apparaisse peu dans les tags…
D’ailleurs, l’Observatoire souligne une part grandissante de séries, par opposition aux telenovelas, dans les offres des chaînes ; dans ce domaine, c’est l’Espagne qui est en tête, avec 22 séries. Désormais, il y a dans la région étudiée par l’Obitel presqu’autant de séries diffusées que de telenovelas ! Les clichés en prennent peur leur grade !
D’après l’Obitel, les fictions les plus regardées ont employé pour tout ou partie des intrigues relatives aux questions socio-économiques, dont la progression socio-économique, les relations de classe, les inégalités sociales et la crise économique.
Les thèmes les plus empruntés par les fictions des 76 chaînes observées ont été : l’homosexualité, le trafic de drogues, l’addiction à une drogue, les relations familiales, les relations amoureuses, le sport et les problématiques de genre.
Des variations existent évidemment selon les pays : la violence et le narcotrafic étaient prédominants en Colombie ; l’Argentine a fait une large place à la famille, au sport et aux troubles mentaux ainsi que leurs traitements ; le Chili a mis l’accent sur les productions historiques, tout comme ça a été le cas de l’Espagne ; l’homosexualité a été abordée dans un grand nombre de fictions et notamment telenovelas du Brésil ; etc.
Si on regarde le palmarès des 12 pays, voilà les fictions les plus regardées de 2013 :
1 | Salve Jorge (Brésil) Telenovela |
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2 | Amor à Vida (Brésil) Telenovela |
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3 | Al Fondo Hay Sitio – saison 5 (Pérou) Telenovela / Comédie |
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4 | Sangue bom (Brésil) Telenovela / Romcom |
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5 | Guerra dos Sexos (Brésil) Telenovela / Comédie |
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6 | La reina de las carretillas (Pérou) Mini-série |
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7 | Mi amor el wachimán – saison 2 (Pérou) Comédie / Romance |
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8 | Tapas & Beijos – saison 3 (Brésil) Dramédie |
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9 | A Grande Família – saison 13 (Brésil) Comédie |
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10 | Flor do Caribe (Brésil) Telenovela |
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11 | Lado a Lado (Brésil) Telenovela / Historique |
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12 | Los 80 – saison 6 (Chili) Dramédie / Historique |
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13 | O Canto da Sereia (Brésil) Mini-série |
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14 | Além do Horizonte (Brésil) Telenovela |
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15 | Corazón indomable (Mexique) Telenovela |
Vous l’aurez compris, le Brésil est aussi le pays qui produit les fictions les plus regardées !
Même si les 12 pays ont produit pendant cette période un nombre grandissant de séries, comme on l’a dit plus haut, les telenovelas restent reines en matière d’audience, avec 77 telenovelas parmi les 120 fictions les plus regardées en 2013, soit 65% d’entre elles.
Il faudra voir si les séries produites gagnent de l’ampleur (c’est ce que croît Globo par exemple)… mais ce sera sûrement l’affaire d’un rapport ultérieur !