C’est triste quand un téléphage en arrive à avoir ce genre de réflexes. Mais peut-être allais-je être détrompée ? Dans le fond, la première saison de For Better or Worse n’était pas si pire…
Les reviews de pilotes de soaps sont rares dans les parages ; il faut dire que d’une part, il n’en commence pas non plus tous les matins (un peu par définition !), et d’autre part, je ne parle pas l’espagnol et ne me rue donc pas sur les pilotes de telenovela, ce qui autrement aurait été une option. Mais quand le network flambant neuf de nulle autre qu’Oprah lance des séries, il semble important d’être au rendez-vous et de voir de quelle façon la chaîne commence ses affaires. Voilà donc The Haves and the Have Nots, qui… ah ? On me dit dans l’oreillette que The Haves and the Have Nots est techniquement un primetime soap, diffusé de façon hebdomadaire. Could have fooled me.
Pour moi qui me plains régulièrement que les Américains ne font pas assez attention à ce qui se passe à l’étranger pour renouveler leur propre paysage télévisuel, nul doute que Tyler Perry me met à l’amende avec The Haves and the Have Nots, qui pioche une grande partie de son inspiration dans les telenovelas. Ou quand un producteur célèbre pour avoir trouvé le succès auprès d’une minorité utilise les recettes populaires auprès d’une seconde minorité…
L’histoire est simpliste : une famille riche (blanche) et une famille pauvre (noire) voient leurs vie s’entremêler lorsque la mère de la famille noire commence à travailler comme bonne pour la famille blanche, parce qu’évidemment. L’autre employée de maison est une latina, pour aller plus loin dans les stéréotypes. Mais, histoire de sortir un peu des clichés (mais vraiment brièvement), la famille blanche a des amis noirs riches également, parce qu’on n’est pas racistes, quand même !
Avec ses faux-airs de Downton Abbey ou Upstairs Downstairs modernes, soulignés d’ailleurs par le « générique » un bien grand mot pour un truc de 5 secondes), The Haves and Have Nots va toutefois faire preuve d’assez peu d’originalité à partir de là, les personnages se conformant tous à la caricature dans laquelle ils ont été enfermés dés leur première seconde d’apparition. Cela permet de désigner rapidement une « méchante » qu’on va passer tout l’épisode à faire passer pour la pire des râclures, quand bien même c’est cette même attitude qui la pousse dans ses retranchements (et alors que finalement, beaucoup de choses, sur le papier, auraient plutôt tendance à en faire la victime) : les personnages de Tyler Perry semblent supplier en silence de ne pas se commettre dans des séquences prévisibles au possible, mais on imagine Perry, une main chargée de biftons, l’autre en train de faire danser les fils de ses marionnettes, s’esclaffer de rire et en remettre une couche dans la nullite et le stéréotype.
Non pas que les acteurs soient spécialement vibrants dans leur interprétation des personnages, ne me faites pas dire des choses pareilles ! Déjà parce que le cast fourmille de personnes dont c’est l’un des rares rôles notables (ceux qui ont un semblant de carrière viennent de soaps comme One Life to Live ou Passions, ça impressionne mon chat), hormis John Schneider qui trouve ici une reconversion après l’annulation de Smallville. Donc comme vous le voyez, il y a du niveau. Et ensuite, parce que la réalisation ne leur en donne vraiment pas l’occasion de briller par leur génie dramatique, avec des plans grossiers du style : « attends, on va filmer un plan où tu fais un clin d’oeil à la personne hors-champs, mais on va le faire durer 5 secondes parce que faut que l’épisode dure 40 minutes ». Tout dans la subtilité, on vous dit.
Faut-il noter qu’outre la production et l’écriture, Perry est aussi le réalisateur ? J’hésite à mettre tous ces titres entre guillemets.
Le résultat, c’est un pilote qui a de quoi faire se sentir mieux la production de Plus belle la vie. C’est vous dire si on touche le fond.
J’avais dit sur Twitter que si je ne trouvais rien de positif à dire sur The Haves and the Have Nots, j’aurais pour gage de regarder un deuxième épisode. Mais je vous rassure, j’en ai trouvé un : le seul point positif de ce pilote, c’est que j’en suis venue à bout. Ca compte, hein, dites ?