C’est une question qui revient régulièrement, et qui n’a que plus d’importance en ce moment : que font les Conseillers ? Concrètement ? A part se nourrir de ma jeunesse, mon énergie et ma santé ? En vrai ?
Derrière cette question légitime se cache pourtant une réponse dramatique : …ça dépend.
Oui à ce stade, j’avais aussi bien fait de vous répondre 42.
La vérité, c’est qu’il n’existe pas de journée-type pour un Conseiller en cabinet ministériel. Ca fait partie du job, pour tout vous dire : on ne travaille pas en cabinet pour le train-train quotidien ! Il n’y a pas deux journées qui se ressemblent, alors deux emplois du temps de Conseiller, sûrement pas.
Mais devant la récurrence de la question, j’ai décidé de vous emmener dans l’emploi du temps d’un Conseiller, pour une journée.
Pour les besoins de la démonstration, j’ai choisi de vous dépeindre la journée d’un Conseiller qui ne travaille pas avec moi au service de presse ; s’il y a de la demande en commentaires, je ferai cependant un second post sur ce cas particulier. Donc n’hésitez pas à vous manifester !
Préambule
…ou plutôt disclaimer. J’ai compilé cet agenda imaginaire en anonymisant totalement le ministère dont ressort notre Conseiller, et donc, par voie de conséquence, le domaine de compétence du Conseiller. Cela implique que le modèle a des limites, évidemment. Si quelque chose ne vous semble pas clair, demandez-moi des exemples, ok ?
08h17
Le Conseiller arrive au cabinet ; il s’est levé tôt en ce lundi matin, parce qu’il doit assister le Ministre lors d’un petit-déjeuner de travail. Il dépose donc ses affaires dans son bureau et s’empare du dossier que son assistante a préparé la veille en vue de cette réunion, déposé à côté de son clavier. Machinalement, il allume la télévision, coupe le son et choisit une chaîne d’information.
08h30
Début du petit-déjeuner de travail avec les partenaires sociaux. Trois représentants ont répondu présents à l’invitation afin de discuter d’une réforme future. Le Ministre, briefé également grâce au dossier préparé la veille, mène les discussions, mais le Conseiller intervient régulièrement sur les points les plus techniques. La discussion se passe bien, même si les invités font la grimace devant les tartines, qui, restrictions budgétaires obligent, ont remplacé les croissants frais. Le Conseiller s’évertue quant à lui à jongler entre son dossier et le coin de table où sont disposés son café, son assiette et son verre de jus d’orange. First world problem.
09h29
Après cet interminable petit-déjeuner, le Conseiller revient dans son bureau avec une furieuse envie de café. Il en profite pour passer une tête au secrétariat, dire bonjour, voir s’il a reçu des appels en absence, vérifier s’il y a des messages et/ou du courrier.
Et en effet, 4 personnes ont déjà tenté de le joindre de bon matin.
09h34
Le Conseiller rappelle quelques unes des personnes qui l’ont contacté, répond méticuleusement au 50 mails qu’il a reçus depuis hier (DirCab a la faculté improbable de ne dormir que 3h par nuit, et le reste du temps, il spamme les Conseillers avec des instructions et des idées), lit son courrier…
Si elle est déjà arrivée dans sa boîte Outlook, il jette un oeil à la revue de presse ministérielle diffusée par le service de presse ; comme on n’a pas non plus la journée, il lit en diagonale, s’arrêtant uniquement sur les articles touchant de près à son champs d’expertise.
10h32
Alors que le Conseiller allait enfin commencer à bosser concrètement, le Ministre le fait appeler dans son bureau afin qu’il assiste à un entretien. C’est impromptu. Le Conseiller râle, enfile sa veste et se dirige prestement vers le bureau du Ministre.
Il n’a pas de dossier, le Conseiller ne connait donc même pas les noms des invités, et ça l’agace. Il demande à sa secrétaire d’essayer de lui envoyer le plus d’infos possible en urgence sur son smartphone, laquelle laisse tomber la pile de journaux qu’elle était en train de ranger pour s’exécuter au plus vite.
11h03
La réunion n’a pas duré, ce qui tombe bien parce que le Conseiller s’y est senti parfaitement inutile. Mais il a relevé quelques points intéressants dans la conversation, et fait donc un passage au rez-de-chaussée, dans le bureau du Conseiller qui a monté ladite réunion, afin de faire un point sur ses connaissances sur le sujet abordé.
11h16
Le Conseiller sort du bureau de son collègue et en profite pour passer dire bonjour aux Conseillers du rez-de-chaussée qu’il ne voit jamais. Le fait que le thermos de café soit stratégiquement placée dans les parages par l’intendance est un pur hasard.
11h22
Retour à l’étage, où le Conseiller, en route pour son bureau, se fait interpeler par son assistante. Il a reçu 7 appels en absence et a reçu un mail urgent à traiter immédiatement. Il en profite pour lui parler d’une réunion du mois dernier dont il s’est souvenu dans les escaliers ; un planning avait été distribué et il voudrait remettre la main dessus. Il n’a pas le temps de lui expliquer pourquoi qu’elle prend déjà un appel au téléphone ; il lui fait signe qu’il file dans son bureau.
11h23
De retour dans son bureau, le Conseiller prend un premier appel que lui passe son assistante tout en répondant au mail urgent, le téléphone coincé par son épaule.
L’appel vient de son contact à l’association Y, avec laquelle le ministère essaye de monter une action d’information et de prévention ; le Conseiller communication les a mis en relation, afin d’ensemble rédiger un premier jet de plaquette, avec des éléments chiffrés. Ils en ont parlé la semaine dernière en réunion de cabinet, donc fort heureusement, le Conseiller a eu le temps d’y réfléchir un peu. Il promet d’envoyer des éléments écrits avant la fin de la journée. A ce stade il est convaincu que c’est faisable.
11h28
Le Conseiller n’a passé que 3 des 7 appels qui étaient sur sa liste que déjà il est attendu dans une salle de réunion au 2e étage. La Conseillère parlementaire veut faire un point sur le projet de loi qui sera présenté dans un mois devant l’Assemblée nationale ; la plupart des Conseillers, Conseillers techniques et quelques Chargés de mission ont été mis à contribution afin de définir la stratégie à adopter, connaître les Députés qui pourraient se laisser convaincre, ou opérer une dernière révision de certains termes du texte. Tout le monde essaye d’avoir quelque chose à dire, et finalement personne n’a vraiment le temps de s’exprimer. La Conseillère parlementaire arbitre les débats, et a l’air fatiguée. Le Conseiller se ressert une tasse de café en son nom.
12h47
Le Conseiller est en retard pour sa réunion avec son homologue d’un autre ministère, qui l’attend depuis presque 20 minutes dans son bureau. Leurs champs d’action étant occasionnellement voisins, il leur est parfois bien utile de faire un petit point. Lequel sera court en effet.
13h01
Après avoir raccompagné son homologue, un type fort sympathique mais avec une forte haleine de café serré, le Conseiller passe une tête dans le bureau de son assistante, qu’il découvre à genoux par terre avec une vingtaine de dossiers devant elle, en train d’ajouter des documents reprographiés. Ah oui, la réunion de demain, ça lui revient…
Il échange quelques plaisanteries de bon aloi avec elle, et elle en profite, lui désignant le bureau, pour l’avertir qu’il a reçu 14 appels en absence pendant ses deux réunions. Le Conseiller laisse échapper un soupir.
13h07
De retour dans son bureau, le Conseiller découvre qu’aucun de ses interlocuteurs n’est joignable. Il réalise alors que c’est l’heure de table et s’enquiert auprès de son assistante : « j’avais un déjeuner prévu aujourd’hui ? ». Non, il avait juste réservé un plateau-déjeuner auprès de l’intendance.
Quand le Maître d’hôtel lui apporte le plateau en question, sur le feu vert de son assistante, le Conseiller demande discrètement s’il peut avoir un café fraîchement préparé en plus de son dessert… Le Maître d’hôtel répond qu’il n’y voit pas d’inconvénient à condition que le ChefCab donne son autorisation. Le Conseiller demande donc à son assistante de faire le nécessaire.
13h16
Le Conseiller mange son taboulé de blé dur à la menthe et aux raisins secs tout en lisant ses mails sur son smartphone. Il sait très bien que c’est pas bon pour la digestion mais bon, il y a tellement de mails, sinon il n’en verra jamais la fin. L’un des messages est une confirmation de la part de son assistante sur l’autorisation du ChefCab à se faire porter un café. Soulagement.
13h45
Au moment où il repose sa tasse de café vide, une occurrence Outlook clignote sur son écran d’ordinateur pour rappeler au Conseiller qu’il a une réunion dans 15 minutes. Il profite de ces quelques instants pour aller faire un point avec son assistante sur le dossier qu’elle prépare sur la réunion du lendemain, et à laquelle il songe à rajouter une note qu’il n’a pas encore rédigée ; il lui avait demandé un document au sujet de cette note, mais il a oublié ce que c’était…
En arrivant dans le bureau de son assistante, il s’aperçoit qu’elles sont deux à présent. « Ah oui, le passage des consignes, c’est la relève ! ».
Il apprend au moment de repartir qu’il a eu 8 nouveaux appels. Il promet de rappeler 2 interlocuteurs dont la demande est urgente, et, sur le chemin de sa réunion, pianote sur son smartphone les instructions pour que son secrétariat réponde lui-même aux 6 autres.
14h07
Le Conseiller découvre que l’Huissière a accompagné les invités dans la mauvaise salle de réunion ; il fait le pied de grue depuis 5 minutes pour rien ! Tandis qu’il récupère ses invités dans l’autre salle de réunion, il envoie un mail agacé à son assistante afin qu’une meilleure coordination soit opérée à l’avenir à l’arrivée des invités. Ce n’est pas la première fois que ça arrive ! A peine le message envoyé, il se rappelle que l’Huissière confond souvent le nom des salles de réunion… il a engueulé son secrétariat pour rien. Il faudra qu’il se rappelle d’aller s’excuser dans l’après-midi.
Il commence donc, en retard, sa réunion avec les représentants de la Direction centrale des Affaires précises, afin d’établir un calendrier d’action réaliste pour une réforme à mettre en place. Pas celle-là, une autre.
14h45
Tandis qu’il explique au Sous-Directeur des Affaires précises un point particulièrement important de la réforme, le Conseiller reçoit sur son smartphone une alerte qui lui rappelle qu’il doit assister à une réunion « déplacement » avec le Ministre dans 15 minutes. Il commence déjà à songer à son autre réunion… Dans l’intervalle, il a remarqué que son secrétariat lui a envoyé des messages pour 7 nouveaux appels en absence, dont un venant de Matignon, et le Conseiller a maintenant toutes les peines du monde à finir ses explications au Sous-Directeur des Affaires précises tout en répondant par mail aux messages. En même temps, ça irait peut-être plus vite s’il envoyait une note à la Direction des Affaires précises, à la réflexion…
14h46
Le Conseiller vient de se rappeler qu’il doit écrire une note pour la réunion Ministre de demain. Merde, il avait bien failli oublier ça ! Discrètement, il se verse une tasse de café pour se donner du courage… avant de réaliser que c’est le thermos de café qui est dans la salle de réunion depuis ce matin, et que « tiédasse » ne commence même pas à décrire la température du liquide brun dans sa tasse.
14h58
L’oeil sur sa montre, le Conseiller valide quelques derniers points du calendrier d’action. Il faut VRAIMENT qu’il décolle, là.
15h02
Ce calendrier n’en finit pas d’être validé.
15h11
Le Conseiller salue rapidement la délégation de la Direction centrale des Affaires précises… c’est bon, hein, ils retrouveront le chemin. Il se précipite dans le bureau du Ministre où trois autres membres du cabinet sont déjà assis, dont le ChefCab et le Conseiller presse, parlant du déplacement du surlendemain, mercredi donc. Il n’a pas raté grand’chose, puisque le lieu du déplacement n’est pas encore fixé ; il s’assied donc discrètement, attrapant au vol une tasse de café sur la desserte, et écoute quelques minutes les autres membres du cabinet, ainsi que le Conseiller presse, débattre de l’entreprise locale idéale pour rencontrer des ouvriers sur la problématique soulevée par le déplacement en question.
15h27
Le Conseiller peut enfin aborder les problématiques du déplacement, ainsi que les déclarations sur lesquelles le Ministre devrait insister pendant le point presse. Il explique les enjeux du déplacement au Conseiller presse afin que celui-ci puisse « vendre » le déplacement à la presse. Il s’enquiert des journalistes qui seraient susceptibles d’être présents au déplacement, mais le Conseiller presse lui indique que l’invitation presse n’est pas encore partie, puisqu’on ne connaissait pas encore le lieu exact du déplacement. « Eh oui, forcément », pense le Conseiller dans un soupir.
15h31
Le Ministre se prépare à tourner une interview pour la télévision, et chasse donc tout ce petit monde du bureau. Sur le pas de la porte, le ChefCab passe déjà des coups de fil à la préfecture afin d’organiser la sécurité du déplacement ; le Conseiller, quant à lui, consulte son smartphone et découvre que son assistante lui a envoyé 11 messages lui indiquant des appels en absence. Ah non, 9 seulement, l’un des interlocuteurs a relancé 3 fois.
15h33
En passant à son secrétariat, le Conseiller récupère le planning qu’il cherchait depuis ce matin. Il apprend que pendant les 2 minutes que le trajet lui a pris, il a déjà reçu 2 nouveaux appels. Il donne pour nouvelle instruction à son assistante de dire dorénavant qu’il est en déplacement, et qu’il ne peut pas prendre d’appels. Il lui explique dans les grandes lignes la réponse à donner aux questions les plus récurrentes, et, pour les autres cas, de tout simplement fixer un rendez-vous aux interlocuteurs, après le déplacement du surlendemain.
15h37
De retour dans son bureau, le Conseiller se découvre un mal de crâne qu’il n’avait pas senti venir. Depuis combien de temps a-t-il mal à la tête, d’ailleurs ? Il ne va jamais réussir à se concentrer sur sa note ; il envoie un SMS au ChefCab pour lui demander s’il peut se faire servir un café dans son bureau par l’intendance, ça évitera à son assistante de s’en occuper.
En attendant la réponse, il sort le planning que son assistante lui a retrouvé, et commence à rédiger sa note pour la réunion du lendemain.
Il garde un oeil sur ses mails, car depuis quelques minutes, le DirCab lui envoie des questions au sujet d’une réunion interministérielle (RIM) à laquelle le DirCab doit participer dans la soirée. Après quelques échanges de mails, le Conseiller finit par promettre de préparer une note pour le DirCab avant 18h.
Et allez, une de plus.
15h49
Le Maître d’hôtel apporte un café bienvenu, et échange une petite plaisanterie avec le Conseiller dans la foulée. Ca fait du bien.
15h50
Fin de la pause café.
16h15
Alors qu’il termine de relire sa note pour la réunion de demain, une alerte barre l’écran de l’ordinateur du Conseiller : il a un rendez-vous téléphonique dans un quart d’heure avec un Député de l’opposition qu’il connait bien (il a travaillé sur sa campagne il y a trois ans). Il avait promis à la Conseillère parlementaire de passer un coup de fil au Député afin de lui parler du projet de loi.
16h29
L’assistante du Conseiller lui passe le Député sur son portable : comme on est lundi, le Député n’est pas à l’Assemblée mais dans sa circonscription, où il est en train d’aller à la rencontre d’une classe d’école primaire. Le Conseiller peut entendre la sonnerie qui indique la fin des cours. Il pense à son fils qui avait contrôle de musique aujourd’hui. Bon c’était juste un contrôle de musique, mais il a répété tout le weekend, alors ce serait bien si ça s’était pas trop mal passé…
Tiens c’est peut-être là qu’il a commencé, ce mal de crâne, à la réflexion.
16h42
Le Député est sur le point de clore l’entretien téléphonique, et suggère qu’ils s’organisent un dîner au ministère à l’occasion. Les Députés et leurs dîners avec le Ministre…
Le Conseiller donne une réponse ouverte, mais n’avance pas de date ; dans la foulée, il envoie un SMS au ChefCab pour demander si c’est faisable. Il sait que la Conseillère parlementaire n’y verra pas d’objection, en tous cas.
16h46
Ignorant les appels de son assistante qui tente sûrement de lui passer un appel urgent, le Conseiller s’attèle à sa note pour la RIM de ce soir.
17h13
Le Conseiller technique qui travaille avec le Conseiller passe une tête dans le bureau : il doit préparer un courrier à la signature du Ministre, pour l’Elysée, mais hésite sur certains termes à employer, qu’il craint d’être trop brusques. Le Conseiller trouve quelques suggestions à lui donner, et en profite pour prendre quelques minutes pour s’étirer les muscles du dos, et parler de l’actualité, tout en jetant un oeil sur l’écran de la télévision, qui montre, toujours en silence, des images d’un plateau bleuté.
En voyant défiler le bandeau des brèves, le Conseiller technique lui parle d’une dépêche AFP importante qui est tombée en début d’après-midi, et que le Conseiller n’a pas lue. Celui-ci se promet d’y jeter un oeil.
17h21
Le Conseiller technique repart dans son bureau, avec de nouvelles idées de formulations pour son courrier. Le Conseiller appelle son assistante pour s’assurer que le dossier Ministre pour la réunion du lendemain est bien prêt, et lui indique que la tâche du lendemain sera de constituer un dossier pour le déplacement en entreprise du surlendemain. Avant de raccrocher, celle-ci glisse subtilement que le Conseiller a 3 appels urgents à retourner absolument.
Après une demi-seconde de réflexion, le Conseiller décroche à nouveau son combiné, et le pose à côté de sa tasse de café vide de ce midi, histoire de travailler au calme.
17h22
Le Conseiller se penche à nouveau sur sa note pour la RIM du DirCab. Il la lui a promise pour 18h. C’est faisable. Mais si, c’est faisable.
17h36
L’assistante passe une tête dans le bureau du Conseiller, car l’association Y a rappelé pour savoir si on ne les avait pas oubliés. « Ah, oui… les éléments écrits pour l’action d’information et de prévention ». Le Conseiller les avait effectivement oubliés.
17h38
Le Conseiller donne la dernière touche à sa note RIM pour le DirCab, qui explique au DirCab les grandes lignes de la position du ministère sur le sujet abordé, ainsi que les points à aborder devant les représentants des autres ministères. Puis il l’envoie à son assistante pour mise en forme, correction des inévitables fautes de frappe, et mise en dossiers.
17h42
Dans le doute, il envoie aussi la note par mail au Conseiller technique qui avait assisté à la réunion de préparation de la RIM la semaine dernière, au cas où il aurait des ajouts à faire.
17h43
Le Conseiller technique a trouvé trois points à corriger, et un quatrième à ajouter. Le Conseiller reformule sa note, et envoie une seconde version à son assistante pour le dossier RIM du DirCab.
17h44
D’un autre côté, si on détaille le quatrième point, il faut maintenant expliquer un aspect des problématiques qui n’était pas encore dans la note.
17h52
Alors que son assistante lui apporte une copie du dossier qu’elle s’apprête à descendre pour le DirCab, le Conseiller l’informe qu’il est en train de lui envoyer une troisième version. Elle repart donc au pas de course en direction de son propre bureau pour vite changer à nouveau le dossier.
Pendant ce temps, le Conseiller décide d’aller payer une petite visite à la Conseillère parlementaire au rez-de-chaussée, pour lui parler de son entretien téléphonique avec le Député. Ca lui permettra de se dégourdir les jambes. Et puis avec un peu de chance, il y aura du café dans le thermos.
17h57
Le Conseiller se sert une tasse de café au thermos. Ah, quel bonheur, il est chaud, l’intendance a dû passer récemment.
17h59
En remontant dans son bureau, le Conseiller croise son assistante dans les escaliers, qui le cherchait désespérément. Le Conseiller s’aperçoit alors qu’il a oublié son smartphone dans le bureau de la Conseillère parlementaire.
Il apprend que le DirCab voudrait que le Conseiller l’accompagne finalement à la RIM.
MAINTENANT.
18h00
Tandis qu’il se dirige vers la cour afin de monter dans la voiture du DirCab en partance pour Matignon, il charge son assistante de foncer lui chercher son smartphone. Il l’attrapera au vol avant de passer la porte de la cour, promis.
L’assistante est déjà en train de courir vers le bureau de la Conseillère parlementaire. « Zut, j’ai oublié de m’excuser auprès de mon assistante pour tout-à-l’heure… mais je devais m’excuser pour quoi, déjà ? ». Gros blanc.
18h01
Le Conseiller se fait passer par la portière de la voiture son smartphone par son assistante, essoufflée.
Tout d’un coup, ça lui revient : le Conseiller se dépêche d’en profiter pour demander à son assistante de retrouver la dépêche AFP évoquée par le Conseiller technique tout-à-l’heure.
18h02
La voiture prend la direction de Matignon. Ils sont déjà en retard. Le DirCab n’insiste pas, et lit sa note (v3) en silence, le dossier sur ses genoux.
Le Conseiller sent son rythme cardiaque se calmer. Il remarque qu’il fixe le volant pendant tout le trajet ; ptit coup de fatigue ?
18h08
La RIM commence. Sont présents les DirCab de sept ministères différents, généralement accompagnés par un Conseiller. La RIM est présidée par le Secrétaire général du Gouvernement (SGG), ainsi que deux Conseillers du Premier ministre.
Le Conseiller n’a pas trop l’occasion de parler, mais ponctuellement, il glisse au DirCab, à voix basse, quelques éléments précis à la demande de celui-ci.
18h37
Le Conseiller répond par mail, sur son smartphone, aux messages téléphoniques que son assistante a relevés plus tôt, et qui n’ont toujours pas reçu de réponse. C’est un peu du language SMS parce qu’il écoute la RIM en même temps, mais elle a l’habitude de reformuler ça poliment.
18h52
Tout compte fait, le Conseiller calcule qu’il n’a qu’une douzaine d’interlocuteurs environ qu’il doit absolument rappeler. Si cette RIM finit un jour.
19h07
Le DirCab du ministère des Finances est très en forme, et semble impossible à couper. Le Conseiller profite de cette longue intervention pour se servir une tasse de café, puis pour griffoner, au dos de la note imprimée par son assistante pour le dossier RIM (v3 !) un début de note pour la Direction centrale des Affaires précises, tant qu’il a encore les idées fraîches suite à la réunion du jour. Enfin, « fraîches », si on veut ; il organise ses idées de façon un peu désordonnées parce qu’il garde une oreille sur la RIM, et s’interrompt régulièrement pour répondre à voix basse aux questions du DirCab. Il rajoute des astérisques régulièrement pour insérer des paragraphes… C’est pas très lisible, mais de toute façon c’est son assistante qui s’occupera de la frappe ; elle a l’habitude.
19h34
Fin de la RIM. C’était interminable. Le Conseiller a vraiment envie d’un café. Avec le DirCab, il se dirige vers la voiture qui les raccompagne au cabinet. Dans la voiture, il consulte son smartphone et découvre qu’il a… oh non, il ne veut même pas compter les messages pour des appels en absence à son bureau. Pour aujourd’hui, les appels, c’est fini.
19h39
Le Conseiller passe une tête dans le bureau de son assistante, à laquelle il confie ses notes prises pendant la RIM sur la note pour la Direction centrale des Affaires précises.
Il salue au passage la stagiaire qui est là depuis ce matin mais que, pour une raison étrange, il n’avait pas encore vue. La stagiaire est occupée à compiler les infos qu’elle a trouvées pendant sa veille du jour sur un thème qu’il lui avait précisé la semaine précédente ; le Conseiller lui demande si elle pourrait faire des recherches sur les éventuelles actions de prévention et d’information qui auraient été lancées par le ministère avec des associations autres que l’association Y. Ca serait pas mal de s’inspirer des plaquettes qui ont peut-être été éditées à l’occasion.
Ce serait bien aussi qu’il prenne le temps de faire un bilan à mi-parcours de son stage avec la stagiaire, à l’occasion ; mais, mon Dieu, pas aujourd’hui.
19h43
De retour dans son bureau, le Conseiller découvre, déposée sur son clavier, la dépêche AFP qu’il avait voulu retrouver il y a une éternité, et que son assistante a dû imprimer pour lui pendant qu’il était à la RIM.
Il commence à rédiger les éléments chiffrés pour la plaquette co-rédigée avec l’association Y. Dans un monde idéal, il faudrait qu’il fasse un point avec le Chargé de mission communication qui suit le dossier avec le Conseiller communication. Il l’appelle donc dans son bureau histoire d’avoir bien en tête en quoi l’action consistera.
20h01
Après avoir rédigé les éléments chiffrés, le Conseiller les envoie à son contact à l’association Y. Une bonne chose de faite ! Le Conseiller se masse les tempes ; et ce mal de crâne qui ne disparaît pas…
20h02
Le Conseiller voudrait jeter un dernier oeil au dossier pour la réunion Ministre de demain. Il appelle son assistante, qui ne répond pas. Ce n’est qu’après trois essais (le dernier sûrement plus nerveux que les précédents) que le Conseiller réalise qu’il est 20h et qu’elle est probablement rentrée chez elle.
20h03
Le Conseiller se dirige vers le bureau de son assistante pour regarder les dossiers Ministre de la réunion de demain. Il croise alors son assistante qui était en fait en train de changer le toner de l’imprimante dans le couloir, et qui est passée par les cuisines pour récupérer l’air de rien un café auprès du Maître d’hôtel.
Tandis qu’il sirote son café, le Conseiller revoit avec elle le contenu des dossiers en question. Il réalise alors qu’il n’a pas envoyé à son assistante la note qu’il a rédigée cet après-midi. Il s’excuse de la retenir et file vers son bureau pour la lui envoyer, pour qu’elle corrige les fautes et révise la mise en page, avant de l’imprimer et la reprographier en 20 exemplaires.
20h05
Après avoir envoyé la note à son assistante, le Conseiller fait un tour dans ses mails. Il vaut mieux ne même pas compter combien il en a reçu, ça serait trop déprimant.
20h18
L’assistante passe une tête par la porte, son sac à main sur l’épaule, pour confirmer qu’elle dépose les dossiers pour la réunion Ministre avant de partir. Le Conseiller lui souhaite une bonne soirée.
Ce n’est qu’une fois qu’il entend ses pas dans l’escalier qu’il réalise qu’il a oublié de s’excuser pour l’histoire de l’Huissière tout-à-l’heure. Bon, il faudra qu’il y pense demain.
20h22
Le Conseiller presse appelle le Conseiller depuis son portable : il est en route pour l’enregistrement d’une émission et n’est pas très audible. Le Conseiller comprend en tous cas l’essentiel : le Ministre est l’invité d’une matinale radiophonique le lendemain, et il voudrait des éléments sur un sujet qui sera sûrement abordé par les auditeurs appelant par téléphone. Dans un soupir, le Conseiller délaisse donc ses mails et commence à rédiger une note.
20h31
Le téléphone sonne, normal puisque l’assistante a enlevé le filtrage avant de partir. Voilà qui fait sursauter le Conseiller, concentré sur sa note pour la matinale.
Au téléphone, la Conseillère parlementaire, qui voudrait voir le Conseiller dans la journée de demain à propos du projet de loi ; elle a quelques questions que des parlementaires lui ont posées et pour lesquelles elle n’a pas forcément l’expertise requise pour répondre en détail. Il promet de passer la voir dans la matinée, après la réunion Ministre.
20h37
Cette fois c’est son portable perso qui sonne. Le Conseiller échange quelques mots avec son épouse, puis avec son fils qui pense avoir totalement raté son contrôle de musique. De son autre main, le Conseiller zappe sans trop réfléchir et fait défiler les images muettes sur sa télévision.
21h46
La note pour la matinale est presque finie.
22h13
La note pour la matinale est ENFIN finie.
22h16
Le Conseiller décide d’aller faire un tour aux cuisines dans l’espoir de quémander un café. Et peut-être un morceau de pain histoire de se caler l’estomac. Manque de chance, la porte des cuisines est fermée : comme il n’y a pas de dîner officiel ce soir, le Maître d’hôtel et les intendants sont rentrés chez eux.
22h17
De retour dans son bureau, le Conseiller se promet de terminer de lire tous ses mails en souffrance. Il envoie aussi quelques instructions pour son assistante quand elle arrivera le lendemain matin. Il voudrait recevoir le script de la matinale dés que le Service d’Information du Gouvernement (SIG) l’aura diffusée dans les ministères, et charge son assistante de la récupérer auprès du service de presse qui en est généralement destinataire.
En jetant un coup d’oeil à son agenda du mardi, le Conseiller commence aussi à réfléchir à son interview téléphonique avec la journaliste du Gifaro, organisée par le Conseiller presse parce que le Ministre n’avait pas le temps de donner l’interview lui-même cette semaine. Le Conseiller prend en note quelques points qu’il doit absolument mentionner.
22h29
Sur le point de partir, le Conseiller découvre dans sa boîte Outlook le billet électronique du déplacement du surlendemain. Il avait entendu le nom de l’entreprise pendant la réunion du matin, mais n’avait pas réalisé que l’entreprise se situait dans le Sud. Départ mercredi à 12h07, arrivée à Nîmes à 14h06. Retour dans la soirée. Il envoie un mail au ChefCab pour vérifier qu’il a bien une voiture pour l’amener à la gare à l’issue du Conseil des ministres, qui est toujours un moment chargé pour les chauffeurs du cabinet.
Il faut vraiment que demain il prenne le temps de préparer la table ronde avec les partenaires sociaux qui est prévue jeudi, car ça ne sera pas jouable le jour du déplacement.
22h43
Le Conseiller commence à ramasser ses affaires pour quitter son bureau, quand il découvre que Cots Moisés, l’émission-débat de France Duh, est sur le point de commencer. Le Ministre a enregistré une intervention dans l’émission quelques jours plus tôt.
Sans même réfléchir, mais avec les épaules peut-être un peu basses, il repose sa serviette et son imperméable, et cherche la télécommande pour rétablir le son sur la télévision.
C’est pas grave, demain, il n’a pas de petit-déjeuner de travail, il peut arriver à 9h30…
Merci pour ce post! On voit que nos impôts ne sont pas inutiles ^_^
Sinon j’ai lu tout le billet avec Josh dans le rôle du Conseiller et Donna dans le rôle de l’assistante, et c’était très bon! et très instructif!
et soudain, le temps s’accélère….et on comprend mieux, dans cette précipitation, comment des décisions parfois incompréhensibles (voir incohérentes) peuvent être prises 😉