Le voyage intérieur

24 avril 2013 à 13:00

Qui n’a pas rêvé d’un jour tout changer ? Quand on habite dans un pays où les températures l’hiver sont glaciales, la tentation est grande de jouer les tournesols, et de suivre le soleil. Alors, direction la Thaïlande, où tout est possible !
Tout, vraiment ? C’est la question que pose 30° i Februari, série suédoise en 10 épisodes, dont les deux premiers ont été proposés hier après-midi aux festivaliers, sous le titre 30° in February. On y suit le parcours de personnages en proie à des remises en questions, et qui espèrent trouver leurs réponses sous le soleil chaleureux d’un pays exotique. Mais évidemment, ce n’est pas si facile.

30° i Februari fonctionne comme une série-chorale, où les personnages font leurs expériences sans se croiser, ou presque : chacun a son propre fardeau à porter.
Ainsi Kajsa, une architecte et une mère célibataire qui, sous le poids du stress, fait un AVC. Souffrant de séquelles invalidantes, elle décide d’emmener ses deux filles loin, très loin : tout recommencer ailleurs, si possible en plus simple, et en plus reposant ; sa relation proche avec sa fille aînée, Joy, une adolescente intuitive, et la tendresse qu’elle a pour sa cadette, Wilda, bercent une bonne partie de l’épisode. Outre ce trio, la série met également en scène un couple, Bengt et Majlis, retraités ; handicapé, cloué à son fauteuil roulant, Bengt, d’entrée de jeu, se pose comme le personnage le plus désagréable de la série, et n’a de cesse d’humilier sa vaillante épouse qui pensait bien faire en le surprenant avec un voyage au soleil. Mais sous les palmiers thaïlandais, Majlis va découvrir l’insoupçonné : elle existe ! L’occasion de se découvrir une faim de vivre que les invectives de Bengt ne peuvent plus faire taire. Quant à Glenn, cet homme fort conscient de n’être pas très agréable à l’oeil, il souffre cruellement de la solitude ; il suffit d’une conversation avec une inconnue sur internet pour qu’il se décide à la rejoindre à l’autre bout de la planète. Enfin, Chan, Thaïlandais exilé depuis plusieurs années en Suède, se décide à rentrer au pays et à recoller les morceaux d’une vie privée qu’il a laissée se briser, notamment en renouant avec son fils, Pang.

Cette galerie de portraits (à laquelle s’en ajoutent d’autres sur lesquels il vaut mieux tenir le secret pour le moment) crée une mosaïque de vécus. Toute la mission de 30° i Februari sera de nous immerger dans les sensations et ressentis de chacun. Outre une écriture pleine de tact, c’est sur une réalisation basée sur le sensoriel que la série repose : les couleurs, les sons, les odeurs, le toucher… voilà chaque scène devenue concrète pour le spectateur. Qu’il s’agisse de sentir le sable fin couler entre les doigts ou la douceur de l’eau salée caresser la peau, 30° i Februari se fait forte de nous dire que le rêve thaïlandais est, littéralement, à portée de main.

Mais le rêve thaïlandais ne fait pas tout. Le pays n’a pas pour vocation d’apaiser les blessures ; mais il offre un cadre enchanteur qui permet de tout mettre à plat, d’aller de l’avant. Progressivement, Majlis va s’éveiller à elle-même, et prendre conscience de la façon dont son mari la (mal)traite. Glenn va tester les limites de sa course désespérée vers le mariage et la paternité. Chan va apprendre qu’on ne revient pas chez soi après des années d’absence sans y avoir laissé une plaie béante. Joy va comprendre que, neige ou soleil, sa mère n’a pas changé, quitte à se surmener et se mettre en danger…
30° i Februari est un drama dans ce que le genre offre de plus pur, de plus émouvant, de plus humain. Derrière les décors colorés des plages, hôtels ou bars à hôtesses de Thaïlande, il y a la volonté de présenter au spectateur des personnages lancés dans une quête intérieure qui les transcendera. C’est, en définitive, le plus beau des voyages, non ?

Seulement deux épisodes sur dix ont pu être découverts par les curieux hier. Espérons que la projection de Séries Mania créera des vocations chez les diffuseurs : 30° in February en vaut largement la peine.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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