Comme c’est désormais la tradition, à la fin de ce post, vous trouverez le logo de ce défi, sur lequel il vous suffira de cliquer pour accéder à la critique du pilote de Copper écrite par whisper (sitôt qu’elle sera en ligne), et ainsi lire nos deux avis sur ce même épisode.
Parfois, quand je m’attaque à la rédaction d’un post, je m’imagine quelle est votre réaction en l’abordant. Peut-être que certains d’entre vous commencent la lecture en se disant : « ah, voyons ce qu’elle en a pensé »… et j’aime, en prévision de ces circonstances, attendre la fin de mon post avant de délivrer une conclusion. Je sème des éléments positifs, avance des arguments négatifs, tant et si bien qu’il faut lire les derniers paragraphes pour connaître mon opinion définitive sur un pilote. Une fois de temps en temps, écrire ma review sous forme de jeu de piste m’amuse, que voulez-vous.
Ce ne sera pas le cas aujourd’hui. Non, aucun suspense, alors que mon post commence ainsi :
Je voulais vraiment aimer Copper.
Voilà, tout est dit, vous pouvez rentrer chez vous.
Levinson et Fontana, c’était l’équipe de la série Oz. Deux noms qui, mis ensemble, envoyaient de la magie téléphagique. J’avais cessé de croire à leurs talents en solo (notamment après que Fontana nous ait pondu Borgia), mais j’espérais qu’en travaillant à nouveau en duo, ils seraient capable de produire de la fiction de qualité.
Mais il n’y avait pas que ça. Le contexte historique de Copper me plaisait, et quand on sait que je n’aime pas trop les séries historiques, ni même ne suis captivée par l’Histoire, ça n’était pas anodin. Un peu de la même façon que sur le papier, Hell on Wheels m’avait séduite (là aussi ce fut d’ailleurs une sacrée déconfiture), le décor new-yorkais de Copper me faisait rêver. J’aime quand une fiction s’intéresse aux vagues d’immigration aux Etats-Unis, je me rappelle avoir dévoré la mini-série Ellis Island quand j’étais plus jeune par exemple, ça me fascine, il y a un côté typiquement rêve américain (avec tout ce que cela inclut de rêves déçus !) et de cosmopolite qui me ravit. Et puis, pour être également amatrice de séries policières en uniforme, notamment à New York (je vous dois d’ailleurs un bilan de NYC 22 mais, je viens de retrouver le net, alors ça va me demander un peu de temps pour boucler tous mes rattrapages), la perspective de voir comment la communauté irlandaise et la police métropolitaine se sont liées avait quelque chose d’excitant.
C’étaient d’ailleurs les seuls éléments que j’avais : le duo Levinson/Fontana, et le contexte historique. Comme c’est mon habitude, afin de garder la découverte pour le pilote, j’avais évité les affiches, les trailers, et même la page Wikipedia, histoire de vraiment prendre la série comme elle viendrait. Mais j’avais en tous cas envie de me mettre devant le pilote, ça c’est sûr.
Alors du coup, je dois dire que j’ai eu du mal à réprimer des grognements de mécontentement devant le pilote de Copper, déjà parce que l’écriture n’a rien de l’intelligence de Oz, mais ça à la rigueur, j’aurais dû savoir que c’était trop en demander, et surtout, oh oui, surtout : ce n’est qu’une putain de série policière à la con comme on en a déjà cent à la télé.
Et à mesure qu’on avançait, je me mettais un peu plus en colère (et je jurais un peu plus comme un charretier). Les problèmes avec la hiérarchie, la visite chez le médecin légiste : on a eu droit à la totale des clichés de la série policière moderne. D’accord, à l’issue de ce pilote, il est clair que la série s’oriente vers quelque chose d’un peu feuilletonnant, et pas versun bête procedural. Mais ça ne sauve pas les meubles pour autant. L’objet de mon ire, ce n’est pas les procedurals (ou disons, pas seulement), c’est aussi que les enquêtes policières, même menées sur plusieurs épisodes à la Forbrydelsen (ou feu The Killing) et Bron/Broen, eh bah yen ras le képi, c’est plus tolérable. Si vous n’avez rien de nouveau à raconter, alors dans ce cas-là ne racontez rien du tout.
Et tout cela avec un manque de finesse insultant. Que celui qui, à mi-parcours de l’enquête, n’a pas déjà deviné qui est le meurtrier de la petite victime de ce pilote, se déclare immédiatement : il faut absolument se cotiser pour lui acheter un cerveau. L’intrigue est visible comme le nez au milieu du visage et délayée sans raison, simplement parce que nom d’un chien, il faut que l’épisode dure 43 minutes, même si en réalité 20 minutes suffisent.
Il existe encore, même après une douzaine d’années d’invasion de poulet, des séries capables de nous surprendre, nous émouvoir ou nous captiver, tout en proposant des enquêtes et/ou des mystères. C’est le cas de Sherlock qui y parvient formidablement, avec un talent sans pareil pour jouer les prestidigitateurs et nous offrir des intrigues ayant l’air complexes ; même quand elles ne le sont pas, les éléments sont maniés de telle façon qu’on y voit que du feu, et à vrai dire, on s’auto-convainc même d’être aussi intelligents que Sherlock Holmes. Mais rien de tout ça ici, alors que Copper est dans l’indigence la plus totale, non seulement sur le fond de notre affaire que sur la façon dont elle est menée par son héros.
Mais le pire, je crois que c’est justement la façon dont Copper nous sert son exposition en pensant dur comme fer qu’il suffit d’avoir des décors (ou l’illusion de décor) épatants, des figurants en hâillons et des pubs irlandais où on chante en agrippant sa pinte de bière, pour planter le décor. La présentation du personnage central, le capitaine Corcoran, est une compilation des plus abrutissants clichés qui soient. Pour le rendre, je suppose, un peu plus abordable, on lui a inventé une femme qui a mystérieusement disparu, par exemple ; on imagine que ça doit un peu le travailler, surtout que ça ne fait que deux mois, au lieu de ça il se tape la moins excitante de toutes les prostituées du bidonville de Five Points, qui est son attitrée. Et quand un personnage essaye d’interroger la raison de cette préférence, il se fait renvoyer dans les cordes, laissant le spectateur sans la moindre explication. Ecoutez, on vous dit qu’il est tout triste, mais prenez-le pour argent comptant et arrêtez de poser des questions, quoi !
Les scènes d’exposition de Copper sont toutes dans cet esprit. On s’y hâte de mettre les choses en place en les tenant comme évidentes. Ce sont des clichés éculés dont on n’a même pas l’impression que les scénaristes ont l’intention de les développer. Les personnages n’ont qu’une dimension (quand ils ont une dimension tout court, parce que le meilleur ami de Corcoran n’existe que parce qu’il a un oeil en verre) et ne sont là que pour jalonner l’intrigue policière vue et revue d’avance.
Alors dans mon dernier paragraphe, il n’y aura aucune sorte de surprise, pas aujourd’hui. Il n’y aura que de la colère. Je pensais que ce qui avait encouragé BBC America à se lancer dans la production de séries, c’était afin de profiter du succès grandissant des séries britanniques outre-Atlantique (un succès qu’elle avait en plus dû partager avec PBS, diffuseur aux USA de séries comme Downton Abbey), pour imposer la marque BBC sur le territoire américain. Même produite sur le sol US, une série de BBC America aurait dû répondre à ces standards, non ? Au lieu de ça, BBC America nous a fait du CBS, mais du CBS vaguement câblé parce que faire une série historique, ça donne l’impression d’être sérieux et ambitieux. Eh bien non. Pas du tout.
Et le pilote de Copper est certainement la déception la plus rageante parce qu’on ne comprend pas ce qui a pu clocher, entre BBC America qui aurait quand même pu s’appuyer sur le savoir-faire des grandes soeurs britanniques, Levinson et Fontana qui sont supposés connaître leur boulot, et le contexte historique absolument unique qui donnait une longueur d’avance à la série. Avec toutes les cartes en main, Copper a quand même trouvé le moyen d’échouer lamentablement.