Après quelques jours de pause, les retrouvailles avec notre Ozmarathon relèvent de la jouissance la plus totale. Impossible de ne pas jubiler au moins une fois devant cet épisode qui conclut un certain nombre d’intrigues. Serait-ce déjà la moitié de saison ?
Mais d’abord, laissez-moi commencer par une ode à Andrew Schillinger, car à tout seigneur, tout honneur. Jeune homme, bravo : c’est à vous que revient la palme du meilleur monologue de l’épisode. On n’est pas tombés dans le misérabilisme : fiston mentionne effectivement que son père lui a mené la vie dure, mais plutôt que de le saquer en tant que père violent et/ou négligent, il opte pour le saquer en tant que nazi, de l’atteindre dans ses convictions-même. Eh oui connard de pseudo-schleu, la seule haine que ton fils ressent à présent, c’est contre toi qu’elle est dirigée, et ça, ça fait mal, hein. Surtout quand il est si proche de Beecher, qui se délecte de l’ironie de la chose. C’était une scène énorme, car Andrew a réussi à toucher son père de la seule vraie façon qui faisait mal.
Et la plus belle vengeance de Beecher, et elle est là : dans le fait que pas une fois elle se sera manifestée par de la violence envers Andrew. Et en cela c’est encore plus horrible, si on y pense, de voir comment Beecher a réussi à atteindre son ennemi de toujours sans faire le moindre mal, juste en lui volant son fils et en le cajolant comme jamais ; c’est terriblement pervers et seul lui pouvait penser à un stratagème aussi dérangé et inhumain (il a été à bonne école). Tout en faisant croiredans un premier temps à Vern qu’il allait simplement reproduire avec fiston ce que lui-même avait subi, il avait en réalité trouvé un plan infiniment plus efficace et diabolique, et le voir savourer sa victoire rend à la fois terriblement euphorique (sacré Beecher, t’as trouvé le moyen de vaincre comme un roi) et terriblement mal à l’aise, car c’est une victoire ignoble comme seuls les protagoniste d’Oz nous en fournissent. La réponse de Vernounichou ne se fera pas attendre, elle est aussi sordide que l’a été toute l’affaire Andrew, et elle nous rappelle qu’entre Schillinger et Beecher, le niveau de haine est si élevé que cette dernière transcende tout le reste.
Ce qui fait qu’à la place de Keller, bah je me sentirais pas tranquille, si chacun des deux opposants est prêt à tout sacrifier pour que l’autre n’ait pas le dessus…
And the eternal dance of death continues ! Allez, Vern, à toi le prochain coup.
Mais d’autres esprits malfaisants rôdent à Oswald, et croyez-moi ils ne sont pas en reste.
A commencer par Kenny Wangler. Pardon, Bricks.
D’accord, au début, je ne comprenais pas trop comment, à l’issue de l’épisode précédent, il pouvait être encore en vie. Un scénariste a changé d’avis au dernier moment ou quoi ? Mais admettons. Car le voir jouer la comédie face à McManus qui arrive avec sa face de cocker spaniel pour annoncer un tragique évènement (que Kenny a commandité), c’était royal. On a rarement eu l’occasion de voir Wangler dans une position trouble comme celle-là, tant il a semblé, pendant longtemps, si monochrome, mais le voilà qui fait preuve d’une certaine perversion et d’un sens aigu de la délectation du malheur qui lui sied formidablement bien.
Ne pensez pas pour autant que la baston soit fini du côté d’Adebisi, car en matière d’esprit tordus, il a lui aussi pas mal progressé ces derniers temps. Son regard en biais lorsque Wangler part aux funérailles de feue sa chère et tendre nous a d’ailleurs vite indiqué qu’il n’attendrait pas plus longtemps pour se venger des Homeboys. La cuisson à point de Poet et Pierce, qui m’a fait littéralement hurler d’horreur (c’est fréquent dans cette série et pourtant on ne s’y fait jamais) tombe comme un terrible avertissement à Wangler. Il est le suivant sur la liste, ça ne fait aucun doute. J’apprécie la façon dont Adebisi avance ses pièces tout en prenant son temps…
Dans un autre registre de perversion, Chris Keller se défend bien en solo également. La première fois qu’il a retourné les questions de Sister Pete contre elle, je me suis demandé pourquoi il essayait de la manipuler de la sorte. Mais là c’est clair : en fait, il ne cherche pas à la manipuler ou lui faire peur, il l’allume sauvagement ! J’ai bien cru que Sister Pete allait s’allumer une clope après leur entrevue ! Mais en tous cas il est clair que ce mec est un aimant à gonzesses, qu’il le sait, qu’il en use et abuse, et que ça lui donne un côté borderline différent de celui qu’on lui a vu avec Beecher, tout en n’étant pas tout-à-fait sans rapport. Mais c’est qu’il chasse pour le plaisir, ce con !
Sister Peter Marie n’en garde pas moins la tête froide lorsqu’il s’agit de conduire les entretiens préparant la rencontre Alvarez/Rivera. On sait tous que ça ne donnera rien de bon, puisqu’on a d’un coté un Alvarez qui se saborde s’il mouffte, et de l’autre une victime qui déborde (à raison) de rancoeur. Comment voulez-vous que cette rencontre aboutisse à quoi que ce soit de positif ? Il faudra bien plus que la patience de notre chère soeur pour accomplir ce miracle.
Pour rester dans le domaine du sacré, on a droit à un rapide petit détour du côté de Kareem Saïd et de ses intrigues amoureuses. Lesquelles commencent à donner un sérieux plomb dans l’aile à son street cred, surtout maintenant qu’il a été affiché devant l’intégralité des prisonniers. Mais pour la première fois, et c’est magnifique, Saïd met de côté son ego, sa soif de pouvoir, ses belles paroles, et choisit la femme plutôt que la cause. Certes, il n’est pas prêt à servir de paillasson aux autres Muslims, ni à qui que ce soit d’autre, et ne l’envoie pas dire à ceux qui envisageraient de causer du tort, mais il fait un choix qu’en toute franchise, on n’attendait pas de lui.
On ne peut pas dire non plus que les échanges entre Ryan et Cyril O’Reily soient très approfondis non plus dans cet épisode, et ça tombe bien parce que la boxe commence à être un sujet légèrement réchauffé. C’est intéressant de voir comment Cyril tente de s’affirmer face à l’autorité de son frère, et comment Ryan, fidèle à lui-même c’est-à-dire entier et pragmatique, va trouver la solution pour arriver à ses fins, nom de nom, c’est pas une saloperie de catho bourreau d’enfant qui va faire la loi ! J’aime toujours autant leur dynamique, elle souligne à la fois la façon dont Cyril est toujours en position un peu enfantine, et aussi comment Ryan le voit. D’accord, Ryan a quelque chose à gagner des combats de Cyril, ne pas en tirer profit serait épouvantablement hors-personnage ! Mais il y a aussi quelque chose d’attendrissant dans la façon dont il a totalement intégré le fait que son frère se comporte comme un enfant, et le traite comme tel. Sans l’humilier, sans lui hurler dessus, il lui annonce qu’il a raison d’écouter le catho, et là-dessus va tout simplement demander au dit catho, à coups de Bible sur la tête, de dire à Cyril ce que Ryan veut qu’il entende. Je sais que les spectacteurs de ce Ozmarathon ne sont pas tous d’accord avec ma façon de voir le tandem O’Reily, mais pour moi c’est vraiment un gros plus, cette façon qu’a Ryan de gérer les choses.
Bon, et ne revenons pas sur le coup du tatouage, car j’ai là encore hurlé devant l’acte comme devant le visage impassible de Ryan sous la douleur. Vous voyez la tête de Saïd ? Bah la même, tout en répétant « omandieumandieumandieu ».
Enfin, un petit mot sur McManus et son affaire de harcèlement. S’il m’avait écouté depuis le début, il aurait tout de suite signalé le comportement de Claire et on n’en serait pas là. Mais nooooon, il fallait qu’il laisse filer, et maintenant c’est lui qui est dans la panade. Humilié par la façon dont l’administration a réglé la plainte de Claire à l’amiable, il envisage donc de porter l’affaire devant les tribunaux, mais découvre, effaré, que ça alors, coucher avec les deux femmes baisables d’Oswald ne joue pas en sa faveur. Je comprends complètement qu’il se sente trahi par Gloria Nathan lorsqu’elle se montre incapable de lui dire qu’elle témoignera en sa faveur dans le cas d’une enquête de probité. C’est humiliant au possible qu’elle cherche à se réfugier derrière une semblant d’objectivité ; il lui demande de dire ce qu’elle pense de lui, et en gros elle lui répond « euh, faut voir, je vais d’abord écouter ce que Claire a à dire ». C’est infâmant et je comprends sa colère, il lui parle de ce qu’il est, elle lui parle de ce qu’il a pu faire ou non. Par contre, la même conversation avec Diane tourne étonnamment bien. C’en était presque touchant.
Pour conclure ce post, je voudrais souligner quelque chose qui, de par sa nature-même, n’a jamais été abordé jusque là dans mes compte-rendus de visionnages, mais qui a une importance capitale dans cette série : le langage non-verbal de ses protagonistes. On le sait, Oz est une série exceptionnelle en termes d’écriture (d’ailleurs, net mieux du côté des soliloques de Hill dans cet épisode), de réalisation, de performances d’acteurs… on a déjà évoqué tout ça. Mais la façon dont certains plans sont chorégraphiés de façon à nous laisser entrevoir un regard, un geste presque invisible, en une fraction de seconde, pour attirer notre attention en permanence sur des détails formidables, restait à souligner. Précédemment, par exemple, l’un de ces plans qui m’a impressionnée a eu lieu pendant une bagarre à Em City, quand l’officier Murphy a jaugé la situation en un coup d’oeil avant de décréter le lockdown. On a senti en une oeillade tout le talent de cet officier émérite, son sens du discernement et son sang-froid. Ce sont ce genre de plans à la fois rapides et essentiels qui donnent tant de force à certaines scènes. Ici, même chose : le bref instant pendant lequel Ryan O’Reily a écarté Cyril de la cuisine pour qu’Adebisi et les Latinos se lâchent sur Poet et Pierce était grandiose. On a senti à la fois dans cette scène l’essence de la relation entre les deux frères, et en même temps, eu la possibilité de sentir avec les prisonniers l’un de ses signes avant-coureurs des grandes catastrophes de la prison, ces indices fugaces, quasiment imperceptibles, qui nous indiquent que tout va basculer, et qui jouent un rôle si grand dans l’ambiance étouffée de la série. Pour toutes ces fugitives images de génie passées et à venir, je voulais dire un mot, parce que ce qui est fait dans ces moments-là relève de la pure magie télévisuelle…
Sisi, je te rejoins sur la relation Cyril/Ryan, j’étais d’accord jusqu’à maintenant sur la vision enfantine que Ryan a de son frère. Mais jusqu’à maintenant, il le poussait à se lever, l’ignorait pour que son frère se sente mal et ainsi de suite, dans le seul but de le faire boxer.
Là, effectivement, c’est intelligent et on sent que c’est pas franchement la boxe qui est en jeu ni même un quelconque ascendant mais bien une peur que Cyril ne l’écoute plus, lui, mais une mauvaise personne.
Sinon d’accord avec tout ce que tu dis donc je ne vais rien rajouter sauf : je suis la seule à ne pas aimer l’intrigue amoureuse de Saïd ? Je veux dire que je comprends son intérêt (tout comme le fait de montrer sa déception vis à vis du Poète, on essaye de le rendre humain et l temps d’une rencontre avec sa soeur, on plonge un peu dans le coeur de sa famille) mais je n’arrive pas à accrocher. J’aime le Saïd dominateur ou quand il se prend des roustes dignes d’une chute de l’Everest mais le voir si humain, attaché à quelqu’un qu’on ne doit pas blesser… Vivement que ça s’arrête définitivement….
Beau billet !