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Après deux premiers épisodes oppressants, Oz s’offre une récréation. Une récréation à la Oz, toutefois : il n’est pas question de se taper un gros délire, mais seulement de relâcher un peu de pression, et encore, certainement pas pendant tout l’épisode.
La structure de l’épisode commence d’une façon qui nous est désormais familière : on prend le pouls de Beecher avant d’embrayer sur quelque chose d’autre. Mais, alors qu’on pourrait craindre que notre avocat propre sur lui s’est enfermé dans un cycle macabre de domination, on va découvrir que Beecher commence à se trouver des moyens de s’évader. Pour le moment ceux-ci ne sont pas la clé de ses problèmes (dont on va d’ailleurs apprendre qu’ils ont empiré après la visite conjugale de l’épisode précédent, puisque sa femme demande le divorce), mais ils lui offrent la possibilité d’échapper à Schillinger qui en est tout décontenancé, à croire que ses prags précédents ne lui ont jamais fait un petit coup de révolte. Cette échappatoire est d’ailleurs assez littérale puisqu’il s’agit de fumer un pétard avec O’Reily, ce qui a pour conséquence sur Beecher à la fois de ranimer sa foi éteinte, et de le faire sincèrement sourire pour la première fois depuis qu’il est pris entre les murs d’Oz.
O’Reily, justement, s’impose comme l’homme de toutes les situations. C’est, on le voit bien, à la fois un observateur attentif, un manipulateur relativement fin, et un petit combinard qui survit essentiellement parce qu’il est prêt à faire copain-copain avec tout le monde, pourvu d’avoir son petit cul à l’abri. Ryan est un personnage que j’ai toujours apprécié, notamment parce que la force brute, il laisse ça aux autres, et ne s’en sert qu’indirectement. C’est un lécheur, un hypocrite, un calculateur, et souvent un lâche, mais il a quelque chose d’éminemment sympathique de par toutes ses magouilles. Et on le voit bien, il tisse sa toile ici avec beaucoup d’aisance. Il est du côté de tout le monde… principalement parce que comme ça il n’a personne contre lui, mais aussi parce que quand il a besoin de se débarrasser de quelqu’un, il n’hésite pas à balancer les petits copains. Il a l’amitié très volatile, O’Reily…
L’autre homme de la situation à Em City, c’est définitivement Kareem Saïd, le leader charismatique des musulmans. Et à la vue de cet épisode, ma fascination envers ce personnage est revenue, aussi forte qu’au premier jour : Saïd est un beau parleur, un homme qui manipule les mots et donc les âmes, avec une conscience plus ou moins variable de la perversion qui se cache derrière son jonglage verbal ; la plupart du temps, ses intentions sont nobles mais il a la langue si habile qu’on ne peut s’empêcher de le redouter un peu. il pourrait faire absolument ce qu’il veut de ses hommes, et il en est conscient bien qu’il ne s’en serve pas et qu’il continue, patiemment, à essayer de ramener dans le droit chemin toujours plus de brebis égarées. Le problème c’est que ses paroles relèvent aussi d’une forme d’endoctrinement. Ca ne marche pas toujours, comme le prouvera sa tentative avortée de prendre le jeune Kenny sous son aile, mais force est d’admettre que son pouvoir est immense sur les esprits. La meilleure preuve, c’est qu’il n’est dans les murs que depuis quelques semaines, et il est déjà convoqué, aux côtés de Schibetta et Keane, dans le bureau du directeur Glynn pour participer aux discussions menées afin de préserver la quiétude d’Oswald.
Saïd n’est pas le seul homme de foi à prendre la parole dans l’épisode. Outre Sister Peter Marie, qui malheureusement ne trouvera pas auprès de Beecher le même genre d’écho que Saïd auprès de Keane, on a aussi l’opportunité de découvrir un peu plus en avant le père Mukasa, un homme parfois un peu transparent mais donc le rôle est primordial au sein de la prison. Entre les messes hebdomadaires et l’organisation d’un confessionnal, c’est un saint homme bien occupé.
Vous l’aurez compris, la religion, la foi, la perte de celle-ci, et Dieu, sont au centre de cet épisode. Un épisode qui, pourtant, est certainement le plus léger à ce jour.
Absolument chaque fois que Hill joue les narrateurs, il le fait avec un ton rieur, un air goguenard et énormément de moquerie. Dieu est partout, mais il n’y a plus grand monde à Oz pour croire en lui, et certainement pas notre philosophe handicapé, dont le langage devient encore plus familier que d’ordinaire, plus sarcastique encore qu’à l’accoutumée. La cellule hors du temps, de l’espace et de la gravité d’où il nous parle va même jusqu’à se parer de couleur, ajoutant à l’atmosphère étrangement légère d’un grand nombre de ses interventions.
Et c’est normal. Le sujet est tellement sensible que le traiter trop sérieusement aurait vite conduit à l’indigestion. Cela montre aussi bien que, même si les hommes (et femmes) du culte s’expriment énormément dans l’épisode, la majorité des prisonniers ne les prennent pas au sérieux, à l’instar des insupportables suprémacistes qui singent les prières musulmanes. La religion est l’objet de tensions entre les abstinents et les consommateurs de drogue, également, et ne pas le traiter par l’absurde aurait été franchement pesant.
Malgré tout, ce troisième épisode ne vire pas à la bouffonerie. C’est même l’occasion de passages franchement émouvants, à l’instar des tentatives, visiblement sincères, de Saïd pour aider Jefferson et Kenny, ou de ce cher Alvarez (l’un de mes chouchous de la première heure, n’ayons pas peur des mots) qui a découvert brutalement que la grossesse de sa copine, qu’il traitait par-dessus la jambe à peine un épisode plus tôt, l’a transformé. Et à quel point.
Comme toujours, Oz ne saurait se contenter « simplement » d’introduire et approfondir sans cesse ses personnages, perfectionner la toile de leurs relations, poursuivre ses questionnements sur la nature humaine et développer ses intrigues dramatiques. Pour une série telle qu’Oz, c’est uniquement le minimum syndical.
La critique politique s’accentue donc, ouvertement, à l’occasion de l’arrivée du gouverneur Devlin dans les locaux, suite à l’escalade de violence qui a commencé avec Dino Ortolani. L’air de rien, et en à peine trois épisodes, il est vrai que les meurtres se sont succédés à un rythme effreiné : l’euthanasie de Sanchez, la crémation de Dino Ortolani, l’exécution de Johnny Post, et enfin, la mort d’un dénommé Martinez lorsque Keane se défend comme il peut dans un piège qui lui a été tendu. Et c’est sans compter l’aggression du frère de Keane et les mille autres « mini » actes de violence. On peut comprendre que ça puisse vriller les nerfs de McManus, Glynn, et Devlin !
Placée sous surveillance policière accrue, la prison d’Oswald est donc officiellement en état d’alerte, et en parallèle, une enquête est menée pour comprendre comment cela a pu se produire. Et pour une raison que j’ignore, c’est le quasi-évangélique McManus qui est suspecté, ce qui confine à l’absurde alors que tant de gardes pourraient être soupçonnés de connivence avec les prisonniers ; quel serait le motif de McManus pour favoriser ce bain de sang, après tout ? C’est quand même bien « son » Em City qui est en première ligne dans cette affaire… Toujours est-il que la confrontation des trois (McManus, Glynn et Devlin) offre une savoureuse scène aux accents de manifeste politique. Explicitement, et c’est la première fois que c’est aussi clair, le message de l’épisode est que le tout-répressif est ridicule, et jusque là la politique du gouverneur Devlin a vraiment joué uniquement cette carte. A l’interdiction des cigarettes et la fin des visites conjugales, il faut en effet ajouter le rétablissement de la peine de mort.
Avec tous ces éléments en main et la tension qui monte, la même menace, encore et toujours, plane au-dessus des têtes, mais Devlin ne veut rien entendre. A ce stade, il est devenu impossible, pourtant, d’ignorer qu’on est entrés dans une spirale incontrôlable.
Alors, même quand Oz est décidée à se faire plus légère, elle ne perd donc pas de vue un seul instant ses thèmes les plus sombres. L’épisode s’achève d’ailleurs avec une scène de mutilation littéralement déchirante…
Crises de foi (God is the ultimate gangster!)
Après avoir abordé la question du sexe dans l’épisode précédent, quoi de plus naturel ensuite pour Oz que de se pencher sur le délicat sujet de de la religion ?
Pour moi qui me définis comme athée, l’épisode avait la lourde tâche de parvenir à ne pas me faire décrocher en m’exposant les errances spirituelles des divers protagonistes de la série. Je ne saurais faire durer le suspense plus longtemps, le pari est remporté haut la main, notamment grâce à ces notes d’humour dont je parlais à la fin de mon commentaire précédent : la scène où O’Reily se confesse ou encore celle où le cannibale Groves est exalté à l’idée de manger le corps et boire le sang du Christ sont tout simplement très bien écrites, presque jubilatoires pour le mécréant que je suis ! XD
Mais comme tu le soulignes si bien, la force de la série est de ne surtout négliger aucun point de vue. À ce titre, je trouve la scène d’ouverture entre Sœur Peter Marie et Beecher particulièrement réussie. Il lui expose les raisons pour lesquelles ses croyances sont mises à mal, elle lui rétorque grosso modo que les voies du Seigneur sont impénétrables et que tenter de rationaliser sa foi en terme de quantité de prière est une entreprise vaine. Pour le coup, j’avoue que j’aime beaucoup le personnage de la religieuse et j’espère déjà voir son rôle plus développé à l’avenir.
Concernant Beecher, je m’aperçois que toi et moi ne voyons pas nécessairement son rôle de la même façon. Arrête-moi si je me trompe surtout, mais j’ai l’impression que c’est presque un personnage secondaire pour toi, entends par-là qu’il n’est clairement pas celui dont le cheminement te passionne le plus et que tu vois le fait qu’il soit mis en avant en début d’épisode comme un moyen de nous dire que ce qui lui arrive est d’une importance moindre par rapport à ce qui suit. Je pense a contrario que si Beecher est le personnage employé pour introduire chacun des thèmes principaux des épisodes, c’est justement parce qu’il est le personnage auquel il est le plus aisé de s’identier pour le téléspectateur moyen. Il sert en quelque sorte d’appât pour ferrer le poisson, si tu vois où je veux en venir.
Comme religion et politique font souvent bon ménage en matière de fiction, voici que le gouverneur qui se prend pour Dieu le père décide de contrecarrer les projets de McManus, lequel a tôt fait d’endosser le rôle du bouc émissaire.
Tu as assez bien évoqué le cas de Kareem Saïd, aussi je ne reviens pas dessus, si ce n’est pour dire que j’ai été assez agréablement surpris par le cheminement de Keane, que j’avais sans doute un peu trop vite classé parmi les âmes perdues irrécupérables et dont le désarroi est finalement fascinant. Sans oublier Alvarez, bien entendu, dont la scène de confession avec le prêtre au sujet des maigres chances de survie de son fils à la fin de l’épisode est très émouvante.
Finalement, comme tu le démontres avec brio, le seul véritable pourri de l’affaire, c’est peut-être bien O’Reily !
Ce n’est pas exactement que pour moi ce soit un personnage secondaire, c’est que pour l’instant il est traité comme tel afin de pouvoir s’installer SANS occuper les premiers épisodes. La première saison est courte, et je sais gré aux scénaristes de ne pas la passer à suivre la façon dont Beecher s’adapte tant bien que mal à la prison. C’est un personnage important parce que j’aime son background, son parcours, et par la suite, nombre de ses évolutions (celles dont je peux me souvenir en tous cas), mais ça m’aurait irritée que des épisodes lui consacrent autant de temps que ce qu’on a pu dédier à Keane dans cet épisode, par exemple. On a besoin d’expliquer par quoi passe Beecher depuis son arrivée pour que ses évolutions futures prennent toute leur force, mais y passer trop de temps m’énerverait parce que ce serait simpliste, quand on a tant d’autres choses à faire et à voir pour se coller dans l’ambiance de la prison. Oz est un ensemble et je suis assez contente que la place de Beecher permette à tant d’autres profils de s’exprimer. Ce n’est pas souvent possible dans une série qui commence par inclure un « newbie » dans le pilote.
Ah mon Dieu, Groves, c’était excellent. La tête de Mukada quand il distribue les osties !
C’était l’épisode de Keane, c’est évident. Le sujet de la religion est très délicat à aborder {Dexter si tu m’entends} mais ici encore on arrive à traiter différents aspects. Du converti, au désespéré, j’ai trouvé ça plutôt juste. Le cas de Beecher étant le plus facile et superflu, heureusement on ne s’y attarde pas trop.
Le cas de Keane est intéressant, il rejoint un peu Ortolani. Deux criminiels qui vont payer pour s’être répenti.
Par contre là où j’ai plus de mal, ce sont les flashbacks. Pas ceux qui nous dévoilent le passé des prisonniers qui sont excellents {surtout ceux du pilot qui était en accord avec le dialogue de Hill}. Je parle des flashbacks qui reprennent les intrigues des épisodes précédents pour éviter qu’on soit perdu. J’aime pas du tout ce procédé, et je pensais pas le trouvé dans cette série. En ce moment c’est Ringer qui en abuse, c’est dire le niveau !
S’ils pensent vraiment qu’on est aussi peu attentif, un bon vieux « Previously on Oz… » ferait l’affaire.
En tout cas j’aime beaucoup la tournure politique que prend l’intrigue avec l’arrivée du FBI (et de « Max Medina » ^^ décidément on en trouve des têtes connues en quelques épisodes}
Qu’est-ce que vous voulez qu’on rajoute après vos passages xD ?
Je n’avais pas remarqué de construction particulière d’épisode (j’entends par là, une intro avec Beecher par exemple). Par contre, les moments « confessions » avec la Père Masuka étaient vraiment top pour nous montrer l’appréciation de chacun sur la question. C’est particulier mais le cannibale (qui est le seul à ne pas avoir été humanisé pour le moment) me fait vraiment rire. Lui et le papy sont particuliers dans cette ambiance, ce sont eux, mes récrés de Oz.
Sinon, je vous avoue que je les ai vu dimanche dernier donc la mémoire me fait défaut mais je reste focalisée sur O’Reilly, qui ressemble à Ortolani et du coup mon esprit reste focalisé sur le fait qu’il lui arrivera la même chose (on peut spoiler dans les commentaires ou pas ?). Et malgré le discours de Saïd lors de son arrivée, je le vois à chaque fois sincère dans ses démarches. Je sais pas pourquoi mais on ne le voit qu’à travers les yeux des autres pour le moment et ses seules actions sont de vouloir mettre tout le monde sur « son » droit chemin qui ressemble à une bonne purification de la vie. Il est d’ailleurs à rapprocher de Mc Manus qui n’as pas les mêmes méthodes mais agit pourtant avec l’approbation de l’autorité et de la justice…
Beecher est définitivement notre repère concernant les évolutions de chacun (la sienne en premier), il m’arrache toujours beaucoup de larme vu ses revers de fortune et Sister Peter me fait bien rigoler !
J’ai pas détesté le cheminement de Keane mais son ultime confrontation reste grandiose.
RDV sur le 4 !