A thank you note

30 septembre 2011 à 15:32

On a tous vu passer, en particulier si on est sur Twitter, des articles s’inquiétant plus ou moins (selon les auteurs et leurs convictions) du nombre de scénaristes de sexe féminin, de séries avec un personnage central de sexe féminin, et dans ce cas s’agit-il de personnages de sexe féminin forts, etc., dans les séries. Je vais être honnête avec vous : je ne les ai pas lus. Volontairement. J’en ai lu un il y a quelques mois, années peut-être, qui en gros tirait la sonnette d’alarme parce que, attention, il n’y a presque plus que des hommes qui écrivent, et quand des femmes écrivent c’est uniquement pour des séries de gonzesses et/ou pour ados, et je me souviens en essence m’être surprise à secouer la tête vigoureusement, en me disant qu’il n’y avait pire sexiste que certains féministes enragés.
Comme si être UNE scénariste faisait écrire différemment de si on est UN scénariste. Personnellement, 90% des histoires que j’écris s’intéressent avant tout à des personnages masculins ou à des ensemble shows mixtes. C’est une question de choix personnel et certainement pas de sexe que d’écrire sur quelque chose en particulier. Après, moi j’écris pour le plaisir et pas parce qu’on me paye pour le faire, et forcément c’est à prendre dans cette limite, c’est sûr ; peut-être que la réalité des choses c’est qu’on embauche plus facilement une femme pour écrire pour un show de la gamme de Desperate Housewives même si elle rêverait d’écrire un truc genre Oz. Mais dans ce cas le problème vient des exécutifs, pas des scénaristes, et je doute que leur opinion change grâce à un article de Jezebel ou autre.

C’est comme cette règle de Bechdel, ça me fait hurler tant c’est ridicule. Comme si pour se faire valider en tant qu’être indépendant, une femme devait faire abstraction des hommes. Ca ne représente jamais qu’environ 50% des êtres humains qu’elle rencontre dans sa vie, hein. Sans compter que si une femme parle avec une autre femme, elle ne sortira pour autant pas des stéréotypes liés à son genre, au contraire : plus une femme parle avec une autre femme, plus on est sûrs que, si elle ne parle pas d’hommes, elle parle d’enfants ou de fringues. Dans les fictions, ça n’est pas très différent.

Bref, on peut difficilement dire que je sois une féministe engagée. J’ai juste mes moments, quand certaines choses me chatouillent ou m’émeuvent. Parfois parce que je suis une femme. Parfois juste parce que je suis.

Et en cette rentrée, quelque chose m’a émue. La semaine dernière, déjà, j’évoquais dans le pilote de The Playboy Club une potentielle galerie de portraits de femmes, et de femmes dans les années 60, ce qui a forcément un sens particulier. Et pourtant, The Playboy Club est une série créée par un homme, Chad Hodge. Quant à PanAm, elle a été créée par un homme, Jack Orman. Pourtant, cela faisait bien longtemps qu’aucune série n’avait si joliment parlé de femmes, et en voici deux pour nous raconter l’histoire de jeunes femmes qui, en cherchant simplement à faire ce qui leur plait et leur convient dans un univers où ce qu’on attend d’elle est très limité, vont faire progresser toutes les femmes.

C’est en particulier devant PanAm (qui, comme je l’expliquais dans ma review du pilote, est plus explicite à ce sujet) que tout d’un coup j’ai eu cette révélation que, si des femmes comme Kate ou Laura n’avaient pas existé, je ne serais pas en train de regarder ce pilote dans mon nouvel appartement, pour lequel j’ai signé seule, pour lequel je prends des décisions seule, pour lequel j’ai fait une partie du déménagement seule, pour lequel je paye seule, moi, une célibataire de 30 ans. Il y a eu cet instant où j’ai vu les filles partir dans leur décapotable et où j’ai regardé autour de moi, en me disant subitement que parce que des femmes comme ça ont pris le risque de tout mettre derrière elles pour faire ce qui les rend heureuses, je n’ai pas à me poser la question de si moi, je peux le faire.
Devant des scènes comme celles-là, je regrette presque de ne pas être féministe tant j’ai l’impression d’avoir le vent dans le dos, d’être fière, d’être redevable. Je ne regrette pas de ne pas me passionner pour le débat Madame/Mademoiselle (en même temps on parle de quelqu’un qui n’a eu aucun problème à dire spontanément qu’elle avait 30 ans… depuis qu’elle en a 26 ou 27, et alors qu’elle en a actuellement 29, mais qui n’a aussi aucune envie de se marier, et qui entend donc indifféremment des deux tout le temps et se contrefous de savoir quel âge on lui donne, quel statut marital on lui donne, etc.), mais je regrette presque de ne pas me sentir plus solidaire de certaines de mes semblables qui ont toujours envie de changer quelque chose.

Pour revenir aux séries, je crois que c’est aussi quelque chose qui me plait que de me dire que je ne vais pas y chercher, jamais, une conviction politique ou sociale, avec la quelconque envie d’y voir se réfléter mes propres convictions politiques ou sociales. Je sais ce que je pense de la peine de mort, par exemple, et si je regarde une série pro- ou anti-, ce sera parce que j’espère un sujet porteur de thèmes intéressants et de bon drama, pas pour valider ma propre perception des choses (sur ce thème, mon épisode préféré est celui de L’Esprit de l’Amérique, dans The Practice, qui bien que finissant sur une hésitation, propose des points de vue suffisamment différents). Mais je suis contente quand une série, qu’elle soit pro- ou anti-, me permet d’être émue sur un sujet à propos duquel je ne me posais plus tellement de questions ; le féminisme en est un. Je mène ma vie sans militer, et soudain je réalise que certains combats me touchent personnellement, parce que j’en profite aujourd’hui avec un délice dont vous n’avez pas fini de m’entendre me vanter vu la lune de miel que je vis avec mon nouvel appart.

Alors je voulais consacrer ce post du vendredi à ça, à remercier les femmes qui ont fait les efforts qui à moi, semblent aujourd’hui couler de sources. Et surtout, parce que c’est un blog téléphagique, à remercier les hommes qui ont créé des séries qui me rafraîchissent un peu la mémoire. Chad, Jack, merci. Dans quelques semaines j’aurai peut-être un coup de coeur pour une série qui n’aura rien à voir, American Horror Story, ou Grimm, ou Runaway, ou une série à laquelle je ne m’attends même pas, et je me sentirais moins proche de tout cela, sans doute. Mais ce que j’ai ressenti en cette rentrée, je vous le dois quand même un peu. Merci pour The Playboy Club et PanAm.

D’ailleurs puisqu’on en parle, et pas uniquement pour la raison évoquée dans ce post : quand est-ce qu’on a la suite de PanAm ? Une semaine, ça commence à être long. Et je crois bien que je suis sous le charme…

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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