Quand j’étais petite, Spielberg, c’était un nom qui en jetait. Ca évoquait de grandes productions intelligentes mais sans être rébarbatives, de grands films devenus des classiques (même si je n’en avais pas vu la plupart), et un goût certain pour les effets spéciaux qui ont l’air naturels (par opposition à ce que peut évoquer le nom de Michael Bay). Du bon divertissement.
Quand j’étais adolescente, Spielberg, c’était un nom qui inspirait le plus grand respect. C’était Band of Brothers. C’était la grâce et le chaos tout à la fois. C’était la marque de l’excellence. Et dans une moindre mesure, il n’y a pas si longtemps, cette excellence se retrouvait dans The Pacific.
En 2011, Spielberg est un nom creux.
Quand il est associé à une série, on dirait qu’il n’y a plus rien à en attendre. Bien-sûr, quand son nom est associé à un projet, ce n’est pas toujours au même titre, objectivement je le sais bien, mais normalement on s’attendrait à ce qu’il cherche à produire quelque chose d’aussi bon que s’il le réalisait lui-même, parce qu’il a une réputation à maintenir. Mais non. Après Falling Skies, voilà Terra Nova. Et les mots me manquent pour vous exprimer combien je suis déçue par quelqu’un en qui j’avais confiance.
Ce qui s’est passé, c’est que déjà, j’ai adoré l’univers du début du pilote. Je n’étais même pas certaine de voir de quel monde les humains de Terra Nova arriveraient, et j’ai découvert un endroit noyé dans le chaos, certes caricatural en ces temps où plus personne ne recule devant des scénarios catastrophe pour le futur de notre planète, mais définitivement porteur de sujets que j’aimerais un jour voir une série aborder (PS : il est question d’adapter à nouveau du Asimov pour le cinéma ; les enfants, c’est pour la télévision qu’il faut l’envisager !). Rien que la question de minimiser la population de toute la planète est intéressante (rappelez-vous, j’ai déjà évoqué des sujets similaires), ce serait captivant plutôt que d’en faire un vulgaire prétexte qui sera balayé au bout de quelques minutes de pilote. Mais bon, pendant ce temps je me dis qu’il n’y a toujours pas de série qui fasse ce que j’écris avant que qui que ce soit ne le lise, alors c’est tout bon pour moi dans le fond.
Enfin voilà, grosse déception finalement parce que l’univers de Terra Nova qui m’a plu, c’est celui que les personnages quittent. Mais d’ici à ce qu’une chaîne ait le courage de ne pas forcément tomber dans le message d’espoir sur l’avenir, et de nous montrer une série d’anticipation où on soit dans la merde et où, plutôt que de fuir les problèmes, il faille les gérer, c’est pas demain la veille.
L’autre gros problème de ce pilote, c’est que chaque fois qu’il y est question de dinosaures, on a l’impression que le script de la scène a été pompé dans le premier Jurassic Park (j’ai même pas vu les suivants), accouchement du triceratops en moins, mais patience, c’est une série après tout. Les gentils herbivores à qui on donne à manger, le vilain carnassier qui s’attaque aux gens dans la voiture, c’est INSUPPORTABLE. Et la promo qui disait qu’on n’avait jamais rien vu de pareil, eh bah, manquent pas de toupet les marketeux de la FOX.
C’est tellement vu et revu que moi, la scène de la bagnole (la scène inteeeeeeerminable de la bagnole, devrais-je dire), je l’ai regardée en mangeant et vous pouvez-me croire, pas un instant je n’ai eu la fourchette en suspens. Terra Nova, la première série d’action et de suspense avec laquelle les cardiaques ne risquent rien ! C’est pas avec des scènes qu’on a l’impression de connaître par coeur qu’on va se mettre en émois…
Les gens qui avaient regardé les promos de Terra Nova et suivi le projet semblaient surtout craindre un côté trop gentillet, trop familial. C’est vrai qu’il y a deux personnages franchement chiants (les deux filles : l’une parce qu’elle n’est là qu’à titre de prétexte, on l’a dit, et l’autre parce que son super-cerveau n’aura de l’intérêt que plus tard dans la série, je le sens bien comme ça, et qu’en attendant il va falloir se la taper quand même), mais tout à fait entre nous, s’il y avait une meilleure alchimie dans le cast, à commencer par les parents, ça ne serait pas tellement un problème. Mais comme de toute façon leur dynamique est vite balayée d’un revers de la main derrière des histoires clichés (voir aussi : adolescent récalcitrant), on n’aura pas le temps d’apprécier le fait que cette famille est unique et qu’il y a une bonne raison de la suivre.
On va vite découvrir que les personnages ne cherchent pas à sortir de la caricature, aucun. C’est vrai pour notre petite famille et pour les autres. C’est assez assomant, dans l’ensemble. Et du coup la série n’est pas vraiment gentillette, pas autant que les personnes dont j’avais lu les réactions semblaient le craindre, mais ça reste très unidimensionnel. Evidemment, ce n’est qu’un pilote (il faudrait mettre ce disclaimer chaque fois qu’on parle d’un pilote même si ça devrait tomber sous le sens), cela dit on a vite le sentiment que la série ne se cherche pas du tout de ce côté-là, de la même façon que le ton de Falling Skies était très similaire et n’a jamais eu l’envie ensuite d’aller vers quelque chose de plus complexe et développé. Il faudra vraisemblablement en faire notre deuil : il n’y a guère de place pour la nuance dans les personnages qui peuplent ces séries.
Parce qu’il faut bien vivre, Terra Nova introduit rapidement une petite mythologie avec les Sixers, ce groupe dissident qui ne va pas manquer de venir foutre le bordel du côté de Terra Nova, et ce dés le pilote. Le problème ce n’est pas que cette mythologie soit introduite dés le pilote (surtout vu qu’il a une durée double), c’est qu’elle soit aussi développée pendant la seconde partie alors qu’on méritait un meilleur traitement. Les spectateurs étaient en droit d’avoir leur content d’installation, de visites, et pourquoi pas, d’initiation avec les filles quand elle vont à la journée d’orientation (mais les scénaristes eux-mêmes reconnaissent que ce sont des boulets vu qu’à chaque fois qu’il se passe quelque chose, elles ne sont pas dans le coup), pour comprendre comment fonctionne Terra Nova, comment les gens y vivent, comment la colonie fait pour s’agrandir, etc… D’ailleurs un truc tout bête mais, est-ce réellement une colonie ? Je n’ai pas bien compris leurs objectifs : les gens qui sont envoyés dans le passé, ils sont supposés faire quoi ? Se multiplier ou pas ? Comment ils espèrent faire venir les milliards d’autres êtres humains à ce rythme ? EN 7 ans, il n’y a eu que 10 missions ? Mais euh, je sais pas, ça les panique pas un peu ?
Bon et tant qu’on en est à poser des questions… J’ai compris l’histoire des timestreams (même si la réponse à cette question a tardé à être explicitée), mais ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi avoir choisi de revenir 65 millions d’années en arrière. Je veux dire, oh, les mecs, vous le saviez qu’il y avait des dinosaures à l’époque, non ? Vous pouviez pas préférer les origines de l’Homme, tout simplement, une fois que les grands lézards avaient débarrassé le plancher ? C’était quand même plus tranquilou.
Réflexion faite, ça a peut-être été dit à un moment où je finissais mes pâtes, absorbée dans la contemplation de ma sauce à la tomate faite maison. C’était tellement captivant, ce pilote…
Enfin bon, pour le moment, je ne suis pas convaincue par cette fable écologique avec des morceaux de gros monstres dentu dedans (un peu comme si Jurassic Park s’était invité chez Wall-e), mais un peu à la façon de Falling Skies, j’ai envie de voir ce que ça va donner parce qu’il peut y avoir un ou deux thèmes intéressants s’ils sont biens développés (ils ne le seront pas, et ce sera tant pis pour moi, mais je DOIS le vérifier par moi-même). Ce ne sont pas forcément les aspects que je redoutais le plus qui se sont avérés plombants, mais plutôt l’impression que derrière les moyens colossaux, il n’y a pas beaucoup d’âme. Encore et toujours le même problème des mecs qui, parce qu’ils ont plein de fric pour s’en donner à coeur joie sur la forme (et je le leur concède, pour l’instant ça a plutôt de la gueule), pensent qu’ils sont dispensés de construire quelque chose de vraiment puissant sur le fond.
Je conçois qu’on donne dans le « grand public », mais il fut un temps où il n’était pas impossible de proposer plusieurs niveaux de lecture pour que tout le monde ait son content. C’est aujourd’hui devenu rare, et les deux séries accolées au nom de Spielberg cette année l’ont prouvé.
En 2012 viendra l’heure de Smash. Avec un peu de bol, il va se resaisir. Mais si, vous allez voir. Il faut y croire.
Même sentiment de frustration pour le monde du futur… Et bonne idée d’adapter Asimov en série, c’est vrai.
J’ai compris qu’ils n’avaient pas eu le choix pour la date, mais je sais plus pourquoi/comment (c’est d’ailleurs peut-être juste moi qui ai interprété ça comme ça, si ça se trouve, ils n’expliquent pas).
Outre les défauts que tu as cité, j’ai l’impression d’avoir été la seule à trouver que Terra Nova était moche… C’est possible aussi que je ne l’ai pas vu en HD (me rappelle plus) m’enfin le fond vert est extrêmement voyant, surtout quand les dinos sont dans la place. A la rigueur, la seule scène Jurassikienne bien faite, c’était dans le noir, parce qu’on en voyait très peu et que du coup, ça collait un poil les chocottes mais le reste…
Je lui ai trouvé plus de points communs avec Avatar que Jurassik. Pas convaincue par ce LONG pilot mais c’est un univers que j’ai pas encore vu à la TV, c’est un peu des vacances. Cerveau étaint.
Je pense qu’il y a méprise avec l’implication de Spielberg en tant que producteur. Si la filliation avec Jurassic Park est une évidence, malgré qu’il soit le plus prominent, il ne reste qu’un producteur parmi tant d’autres, il faut plutôt le traiter comme un parrain, que comme un des géniteurs de la série…
Rappellons que ces dernieres années, y compris ses propres réalisations, tonton Steven produit entre 3 et 6 films, et 2 nouvelles séries par an…
S’il faut jeter la pierre à quelqu’un c’est plutôt à Bragga, qui, s’il est spécialiste des concepts forts (Treshold, Flash « Because I was loaded!!! » Forward), et aussi brillant, sympathique et éloquent qu’il puisse être, tire souvent à côté de sa cible. Tant que l’on échappe au final involontairement hilarant de FlashForward, il faut s’estimer heureux.
« je ne comprends pas, c’est pourquoi avoir choisi de revenir 65 millions d’années en arrière »
C’est 85 millions, et non 65, l’extinction n’est donc qu’un lointain problème.
Ils n’ont pas choisi cette période, et n’ont pas de contrôle, autre que d’agrandir le portail.
« Vous pouviez pas préférer les origines de l’Homme, tout simplement, une fois que les grands lézards avaient débarrassé le plancher ? »
Sans la citer, pour cause de spoiler massif, c’est déjà le concept qu’avait -tardivement- utilisé, il n’y a pas si longtemps, une autre série de science-fiction…
« les gens qui sont envoyés dans le passé, ils sont supposés faire quoi ? Se multiplier ou pas ? Comment ils espèrent faire venir les milliards d’autres êtres humains à ce rythme ? En 7 ans, il n’y a eu que 10 missions ? »
Il n’a jamais été question de faire venir tous les humains, le seul but semble être, pour le moment, de rebâtir un semblant de civilisation et d’assurer le futur de la race humaine, sans empressement, et dans un environnement pour le moins hostile.
La société de 2149 étant notamment traumatisée par la surpopulation, il n’est pas étonnant que toutes les précautions soient prises pour limiter au maximum une expansion démographique trop rapide et mal maitrisée.
A part si on souhaite réduire drastiquement les chances de survie ou à faire du burger d’humain le nouveau plat à la mode et disponible jusqu’à satiété pour les dinosaures, envoyer dix fois plus de colons serait irresponsable, les infrastructures ne pouvant probablement pas suivre non plus.
Ce qui prouve que ma sauce à la tomate était quand même drôlement plus fascinante que le pilote parce que tout cela m’avait totalement échappé.
Ou ce qui prouve que j’ai les facultés de concentration d’un spectateur de TFHein. Je sais pas ce qui est pire.
Dans tous les cas, merci pour tes précisions.