Il y a quelques jours, je vous disais que The Playboy Club n’était pas si mal et que, pourvu de mettre ses exigences d’excellence de côté, on pouvait passer un bon moment à apprécier son folklore et son ambiance rétro.
Je m’apprête aujourd’hui à vous dire que pour les exigences d’excellence, sans brader le folklore et l’ambiance rétro, PanAm a parfaitement réussi. Si je devais absolument choisir entre les deux (ce qui, Dieu merci, ne se produira pas), c’est PanAm qui l’emporterait haut la main.
Pourtant le pilote n’est pas exempt de défauts.
Musicalement, par exemple, c’était assez dérangeant d’avoir cette musique dramatisante dés qu’il se passe un truc pour souligner exagérément que ohlala elle va être en retard, ohlala c’est le premier vol, etc… Les chansons d’époque, même en surnombre, ça ne me dérange pas, mais la musique tirée d’un mélodrame, ça, ça m’obstrue vite les conduits auditifs. Ce serait pas mal que la prod se calme un peu de ce côté-là.
Plus vicieux : les flashbacks. Je suis obligée d’admettre qu’un épisode se déroulant intégralement dans le huis clos d’un appareil serait forcément un peu étouffant (ce procédé pourra être utilisé à l’occasion, par exemple quand, et non si, un épisode implique des turbulances inquiétantes ou un grave incident à bord ; je compte sur la prod de PanAm pour jouer avec cet outil au besoin), en revanche le principe du flashback est tellement usé ces dernières années qu’au deuxième, je poussais déjà des soupirs frustrés. Non qu’ils soient inutiles, au contraire, et pas que narrativement : ils permettent de très bien présenter les personnages, de souligner leur background mais aussi quelques unes des réalités du métier des personnages, et le passage à Rome comme celui à Cuba avaient tous les deux, par exemple, une bonne dynamique, bien que pour des raisons diamétralement opposées. Le problème c’est peut-être juste de trouver un équilibre pour ne pas nous noyer sous les flashbacks, mais cet équilibre ne devrait pas être trop difficile à trouver. De ce côté-là j’ai confiance.
Pour finir, ma relation d’amour-haine avec Christina Ricci connait un nouveau rebondissement : d’un côté j’étais contente de la retrouver au début de l’épisode, elle semblait être un personnage un peu électron libre, mais au fil de l’épisode, son jeu m’a semblé d’autant plus caricatural que son personnage s’affadissait. Ma chérie, je te rappelle que le nom en premier sur le générique qui n’existe pas encore, c’est le tien, essaye de mériter le statut de « nana la plus célèbre du cast » s’il-te-plait.
Maintenant qu’on a passé la partie la moins agréable, laissez-moi vous dire pourquoi j’ai un petit faible pour les chapeaux bleus plutôt que les oreilles de lapin (bien que je sois décidée à regarder les deux pour le moment).
PanAm réussit là où The Playboy Club n’a pas vraiment su installer ses intrigues complémentaires. Parce qu’à la base, on a le même principe : prendre un outil à former les femmes dans les années 60, à la fois pour les conformer à un fantasme de la société de consommation et pour leur permettre de prendre leur indépendance. Sauf qu’aucune des deux séries ne se contente de cela : la vie au sein de cette institution.
Il faut donc des intrigues à suspense pour faire revenir les spectateurs : The Playboy Club a choisi un meurtre, la mafia, des jalousies. Un choix correct, je le répète. Mais PanAm a fait mieux et a décidé de se tourner vers l’espionnage. Beaucoup moins cliché, surtout dans le contexte des « petites mains » : d’ordinaire, les espions à la télévision sont ceux qui font les opérations. Ici, on a droit à quelqu’un qui participe (ou pense participer ?) à des missions d’espionnage, mais qui ne fait pas de grande mission, de chose incroyable. C’est sans doute ce qu’il y a de plus fascinant dans l’espionnage et, qui plus est, ça s’inscrit incroyablement bien dans l’époque, avec la Guerre Froide, tandis que le thème de la mafia est commun à de nombreuses époques, et donc plus passe-partout.
Les intrigues personnelles des hôtesses (et de l’un des pilotes) sont assez peu originales pour le moment : celle qui a eu une aventure avec un homme marié, celle qui a pris son indépendance contre la volonté de sa famille (les hôtesses de l’air ne sont pas mieux considérées par leurs proches que si elles étaient des Bunnies), celle qui a une histoire avec un autre employé de PanAm… De ce côté-là, le match est nul même si PanAm parvient à fournir un peu plus de fond avec des intrigues tout aussi peu développées que The Playboy Club.
Le discours sur l’indépendance des femmes est plus significatif, plus explicite ici, grâce à l’intrigue de l’une des hôtesses, et parce que, tout simplement, un personnage leur rend hommage à la fin de l’épisode :
« They don’t know that they’re a new breed of women ».
Je trouve très belle cette réplique qui nous invite à regarder des femmes être dans le rôle prévu pour elle par la société (elles peuvent être hôtesses de PanAm jusqu’à leur mariage OU leurs 32 ans, ce qui vient en premier), mais qui vont tout de même évoluer sous nos yeux en des femmes indépendantes et faire la révolution à leur façon. Peut-être un peu plus discrètement que des Bunnies, mais qui vont faire la révolution tout de même. Et qui ont déjà commencé. Mais qui ne le savent pas.
Alors bon, bien-sûr c’est plus facile d’admirer des femmes qui se libèrent sans porter une queue en peluche et des décolletés plongeants. Mais quand même, il est plaisant de voir combien ce thème est bien abordé dés le pilote.
Et puis, il y a le folklore. Le fantasme de l’hôtesse de l’air, d’une part, vivant chez bien des hommes mais aussi des femmes (pour les raisons énoncées plus haut). Et le fantasme PanAm. C’est l’incarnation de toute une partie de cette époque, une formidable façon de cultiver l’esprit d’entreprise des années 60, quand PanAm en était déjà à rêver d’emmener ses voyageurs sur la lune, de proposer le service le plus luxueux des airs, et d’entrainer des cohortes de jeunes gens à devenir l’élite de l’aéronautique. Cet aspect-là (qui rappellera aux spectateurs nipponophiles ce qu’on a pu observer dans Attention Please, suivez les tags pour en savoir plus) n’est pour le moment qu’à moitié développé mais la série a tout son temps pour revenir dessus, surtout si elle s’accroche à ses flashbacks ; je suis spécialement intéressée par la formation tant des hôtesses que des pilotes, et j’espère qu’on en saura plus via au moins un personnage. Personnellement je connais moins le mythe de PanAm que je ne connais celui de Playboy, mais le peu que j’en sais rend les choses excitantes de ce point de vue quand même, tant il est évident que ces jeunes gens sortent d’un moule à façonner l’excellence dont il me tarde de connaître les moindres détails, fussent-ils mieux connus du spectateur américain, forcément plus au fait de la légende.
Donc oui, le pilote de PanAm est une réussite, sans conteste. L’épisode ne perd pas son temps, sans pour autant partir dans tous les sens, il y a une véritable mythologie de la marque qui se dessine, des personnages potentiellement bons à développer. Les quelques égarements (musique, flashbacks) peuvent être atténués sinon corrigés facilement. Le cast est plutôt solide, la porte est ouverte à de nombreux guests, et ce sera facile de jouer avec la formule pour des stand-alones intéressants, originaux et/ou exotiques.
Il y a beaucoup de potentiel dans ce pilote. Tellement, que pour un peu, je regretterais presque que ce blog ne soit pas bleu. En tous cas et à défaut, mes cagoules seront définitivement, cette saison, aux couleurs de PanAm.