Frantically fan

17 juin 2011 à 23:29

1993 était une grande année. Téléphagiquement, pour moi, en tous cas. Mais je ne l’ai pas immédiatement su, parce que, bien que je ne connaisse pas la date exacte à laquelle j’ai découvert la série, je suis à peu près sûre de n’avoir pas découvert Une Nounou d’Enfer cette année-là.
N’empêche qu’il s’est passé quelque chose en 1993 qui a changé ma téléphagie, à sa façon.
Parce que c’est aussi avec cette comédie que mon regard sur les séries a changé, et que c’est probablement l’une des premières dont j’aurais pu me dire fan, si à l’époque j’avais utilisé le mot, et déjà que maintenant…

Voilà donc pas loin de 20 ans  et, depuis, Fran et moi sommes inséparables.
De Fran Drescher, j’admire l’envie si puissante de rire et faire rire, après tout ce qui s’est passé : le viol, le cancer, le divorce. Et chaque fois, cette énergie bouillonnante de rebondir et de rire. Alors je ris avec Fran, parce qu’elle-même en est capable et que ça ouvre en moi une sorte de verrou, celui qui, d’ordinaire fermé, trouverait que les gags sont ci ou que l’interprétation est ça, et qui cède face à elle pour simplement profiter de la bouffée d’optimisme combattif qui se dégage de ses sitcoms.
J’aime ses moues, sa voix, son rire (du jour où j’ai découvert Fran en VO, mes facultés d’auditions n’ont plus jamais été les mêmes, et je ne regrette rien), j’aime aussi que ses personnages s’appellent toujours Fran et réagissent tous de la même façon, pour la bonne raison qu’ils évoluent tous dans des contextes qu’elle tire de sa propre expérience et qu’elle y va franchement, sans s’en cacher. Il y a quelque chose d’honnête et sincère dans cette démarche qui est la sienne, comme si elle avançait à visage découvert pour dire : « ouais, tout-à-fait, je ne suis pas une créative à la base et j’ai pas été chercher tout ça très loin, et alors ? J’ai quand même envie de vous faire rire avec ce que je connais ».

Oui, il y a des pitches originaux et des synopsis de comédies révolutionnaires, mais un projet de série ça peut aussi être ça : quand on n’a pas de message à faire passer ni de média à révolutionner, qu’on a juste envie de divertir les gens et que pour ça on donne tout ce qu’on a, sans se cacher, sans en rajouter, à prendre ou à laisser. Moi ça me donne envie de prendre, pareille sincère générosité.


Fran lance donc des séries où elle est Fran, toujours, inconditionnellement, tout le temps, et je l’aime aussi pour ça, pour la volonté qu’elle a de simplement venir me faire rire en se foutant du reste, et surtout de ceux qui veulent faire croire que le rire c’est FORCEMENT autre chose qu’avoir de l’énergie à revendre et la volonté de divertir. Ca peut, mais ce n’est pas obligatoire.
Elle se rendra ridicule s’il le faut, elle se répètera s’il le faut, elle utilisera toutes les anecdotes qu’elle a vécues s’il le faut, mais elle viendra à nous nue et sans artifices… spirituellement en tous cas, parce que Fran sans maquillage à la truelle, cheveux en contreplaqué et garde-robe pléthorique, ça n’est pas vraiment Fran.

Et c’est aussi pour ça qu’elle ne connaitra plus jamais le succès qu’elle a rencontré avec Une Nounou d’Enfer, parce qu’en-dehors des fidèles qui, comme moi, lui conservent toute leur entière et indivisible affection, et n’attendent que de la retrouver, les gens en général ont tendance à attendre de la nouveauté. C’est la seule chose qu’elle ne leur donnera pas.
C’est pas le plan, c’est pas comme ça qu’elle fonctionne. Elle n’est pas une créatrice de série qui cherche un pitch ou un personnage qui vous happera ; c’est une personne qui vient et qui sait que ce qu’elle a à offrir, c’est elle et rien qu’elle, et que ça, ça ne change pas, alors comment les projets successifs le pourraient-ils ?


Alors oui, j’ai regardé Happily Divorced. Et je sais bien, c’est exactement tout ce que Fran faisait déjà il y a presque 20 ans. Pour une raison simple et évidente, que tout le monde connait : le mari qui découvre qu’il est gay, c’est son histoire comme l’étaient, avec Living with Fran, les expérimentations de cougar, ou avec Une Nounou d’Enfer, une radiographie du passage à l’âge adulte quand on essaye de prendre du recul sur notre éducation.
Non bien-sûr, ça ne s’est pas passé exactement comme ça, à chaque fois, mais Fran sait prendre ces étapes fondatrices de sa vie et en rire, c’est sa thérapie par le rire si on veut, en tous cas elle nous propose rien d’autre que ce que d’autres font sur des planches, les séries de Fran Drescher sont simplement des one woman shows télévisés et adaptés pour plaire au plus grand nombre (les mauvaises langues diront : le plus petit dénominateur commun, mais il n’y a pas de honte à faire un divertissement populaire, quand c’est fait avec sincérité). C’est aussi à ça qu’on la reconnaît.

Le pilote de Happily Divorced est un peu cliché par moments, le couple des parents est clairement sous-employé, les choses vont un peu vite pour mettre en place la situation sans trainer, mais ce n’est qu’un pilote et celui d’Une Nounou d’Enfer n’était pas parfaitement abouti non plus. Mais l’humour de Fran est intact et tout est là. Rien n’a changé, comme se plairait probablement à le penser le chirurgien qui s’est attaqué à ses pommettes.
Ce sont tout bonnement des retrouvailles. J’ai ri, et applaudi, et peut-être eu l’oeil vaguement humide, parce que je savais pourquoi je revenais, et c’est exactement ce qu’on m’a servi. On ne peut pas en dire autant de tous les comebacks télévisés, soit dit en passant.

Je vous avoue cependant que, si cette trilogie de comédies « à la Fran » m’enchante, parce que je suis tout sauf objective et ne le serai jamais pour quelqu’un qui a bercé près de 20 années de ma téléphagie et m’a accompagnée plus que quiconque ne peut l’imaginer… parfois, j’aimerais que quelqu’un dise à Fran de s’asseoir, lâcher du leste, laisser le contrôle à quelqu’un, et simplement se laisser embarquer dans une dramédie ou un drame, des genres où elle a beaucoup à donner mais où elle s’est peu risquée, car elle refuse de se mettre en danger.
C’est justement parce que j’aime Fran de tout mon cœur que je vais à la fois regarder Happily Divorced et espérer que la trilogie lui suffira pour passer à autre chose. Et accepter de ne pas rire. Juste une fois. Parce qu’elle le mérite. Et parce que tout le monde n’est pas fan et ne tolèrera pas ça indéfiniment.

C’est beau de vouloir rire de tout ce qui se passe dans ta vie avec nous, Fran, mais promis, si les défenses tombent, on t’aimera toujours. Moi, en tous cas, je serai là.
Bien-sûr, le vendredi. Évidemment que j’allais poster sur Fran le jour sacré de ce blog par excellence.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

2 commentaires

  1. whisperintherain dit :

    Une Frannie d’enfer

    Eh ben voilà, quand je te disais dans mon MP sur SériesLive que j’avais sans doute mal cherché pour ne rien trouver sur Happily Divorced… Du coup, tu pourras ignorer ma question concernant ton point de vue sur la série puisque cet article y répond amplement.

    Je partage ton avis sur le fait que Fran Drescher a une capacité incroyable à prendre du recul sur les nombreuses épreuves difficiles qui ont jalonné sa vie et à les détourner de façon cathartique avec ce style qui lui est propre, pas forcément follement créatif, mais présenté avec un tel panache qu’on ne peut que se laisser conquérir.

    Et puis une autre chose que j’aime chez elle et que tu n’as pas évoquée, c’est son flair pour les gags visuels. Beaucoup à l’époque d’Une nounou d’enfer l’ont comparée à Lucille Ball sur ce plan, et elle admet elle-même s’en être inspirée. C’est peut-être sur cet aspect-là qu’elle prend le plus de risques finalement, elle y va franco mais sans tomber dans le ridicule, et c’est pas l’exercice le plus simple à mon humble avis. On a déjà eu un ou deux bons gags visuels dans Happily Divorced mais je rêve d’une bonne vieille course-poursuite ou d’un pugilat du style de celui de l’épisode « On se croirait dans Dynastie ! » d’Une nounou d’enfer.

    Je ne connais pas bien Du côté de chez Fran, je n’en ai vu que 2 ou 3 épisodes grand maximum, mais j’avais l’impression qu’outre la bonne idée d’avoir confié le rôle de son ex à Charles Shaughnessy, c’était quand même largement moins inspiré qu’Une nounou d’enfer. Ou alors c’est tout simplement que je ne vois pas vraiment ce qu’il y a de si drôle dans la situation de base d’une femme mûre qui refait sa vie avec un homme beaucoup plus jeune qu’elle.

    Pour en revenir à Happily Divorced en soi, je trouve la série sympa, elle a ce petit côté old school qui colle bien à la chaîne qui la diffuse, je trouve qu’elle s’accorde bien avec Hot in Cleveland qui la précède sur la grille, et le cast est sympa comme tout. Et si on prête attention aux répliques, y’a quelques références à la carrière de Fran Drescher assez bien intégrées. J’espère qu’elle sera renouvelée.

  2. UglyFrenchBoy dit :

    J’aime cette critique que certains sur Twitter devraient vraiment lire avec attention avant de tirer à boulet rouge tout ce qui vient de TV Land. Cette chaîne est souvent réduite (un peu à tort) à « cheap et pour vieilles et gays ». Mais quand ces mêmes détracteurs s’esclaffent devant un épisode de Mon oncle Charlie j’ai du mal à comprendre.

    Peut-être qu’effectivement pour apprécier Happily Divorced la raison ne peut être qu’irrationnelle et/ou il faut être particulièrement nostalgique. Mais en soi pour apprécier une sitcom (multicam donc), le niveau d’exigence n’est jamais très haut et/ou il s’agit aussi d’une certaine forme de nostalgie.

    Bref je m’emballe un peu, mais je voulais simplement dire que j’ai aimé cet post

    haut.

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