One little, two little, three little Indians

20 mai 2011 à 7:04

C’est pas pour être désagréable, mais si vous vous souvenez, fin janvier, c’était pas la joie dans le coin. J’étais un peu désabusée et du coup ma motivation avait largement pris du plomb dans l’aile. Pourquoi je brasse ce genre de souvenirs en ce radieux mois de mai où tout va bien dans le meilleur des mondes (du moins pour autant que ce blog soit concerné) ? Parce que j’ai essayé de me souvenir pourquoi diable je n’avais regardé que le pilote de Blackstone, lorsque le générique est soudain apparu dans ma playlist mercredi après-midi.

Un revisionnage du pilote plus tard, et maintenant que j’ai l’énergie de quatre téléphages, me revoilà à vous parler de Blackstone, avec un peu de retard, certes, mais vaut mieux tard… etc. Bon, du coup ça fera une review plus courte que si je ne l’avais écrite à l’époque, mais au moins elle est là, et j’espère qu’elle suffira à éveiller votre intérêt pour cette série atypique.


Blackstone ne s’embarrasse pas de subtilité : le politicien corrompu, il est corrompu, point barre. On le voit discuter avec ses autres comparses et rire de ses magouilles, sans que la série ne perde de temps à nuancer ses actes ou à chercher à le rendre vicieux. En fait, la démonstration n’en est que plus terrifiante, puisque cela implique que le chef ne s’en cache pas plus que le scénario ne le fait. Il verse des pots-de-vin, il se sert au passage, et il ne semble même pas ressentir de honte à le faire, alors pourquoi dissimuler ses actions ? Il a même le toupet de venir à des funérailles expliquer que si on faisait comme il a dit, ça ne serait pas arrivé. Tout ça pendant que la défunte est flanquée entre quelques planches de contreplaqué parce que ce même chef avait dit qu’il n’y avait pas de budget pour autre chose.
Oui, Blackstone fonce dans le tas, et il n’y a pas de place pour la nuance, l’explication, la relativisation. Certes ça implique qu’au stade du pilote, les personnages sont assez unidimensionnels, mais c’est tout simplement parce que le sujet de Blackstone, c’est plus la politique de la réserve que ceux qui y vivent.

C’est à une vraie série sur la politique locale qu’on assiste ici (mon Dieu, mais comme je m’en veux d’avoir été aussi négligente, elle aurait été parfaite dans The SeriesLive Show !), et sans chercher à se perdre dans des méandres électorialistes : quelles sont les conséquences de telle décision ? Ou de telle absence de décision ?
Et le constat est cinglant : non seulement la politique politicienne et les magouilles se font pointer du doigt, mais la permissivité des habitants eux-mêmes est soulignée dans une cinglante tirade sur l’aveuglement et, surtout, le silence. En réalité, les Indiens laissent faire parce que, comme si bien résumé dans une autre réplique déroutante : « pour autant que les choses aillent mal, il y a aussi une véritable peur de perdre tout ça », tout ça étant la possibilité de rester oisif à boire devant la télé en touchant les allocs. Vlan.

C’est là qu’indubitablement se pose la question de savoir pourquoi regarder une série qui parle de problèmes aussi ciblés.
Oh, vraiment ? Des politiques qui ne font rien, qui se servent dans les caisses, qui ont de belles paroles qui ne réparent pas les tragédies, c’est typique d’une réserve indienne ? L’alcoolisme, la drogue, le désoeuvrement, l’inceste… vraiment, c’est typiquement indien ?
Il faut dépasser ce moment où on ne se sent pas concerné (et je pense qu’il vient forcément un instant, même s’il peut ne durer qu’une seconde, où tout cela semble réellement lointain au spectateur francophone), et admettre que même si c’est de façon différente de nos préoccupations quotidiennes, Blackstone parle de quelque chose qui nous touche aussi chez nous, dans le fond.

Parmi les choses qui m’ont marquée pendant ce revisionnage du pilote, j’ajouterai pour finir qu’il y avait la scène d’ouverture. Un vieil Indien se fait filmer par un autre, plus jeune, qui tente de saisir avec sa caméra la réalité de la culture indienne ; le vieillard raconte une histoire. Et pour conclure, l’ancêtre a ces mots : « Je sais que tu essayes de faire quelque chose de bien avec ces videos. Mais la culture n’est pas simplement ce dont nous avons parlé… les jours anciens… les rites anciens… toutes ces choses qui font qui nous sommes. C’est aussi ce qui se passe aujourd’hui. Si tu regardes autour de toi, la culture s’affiche tous les jours. Violence familiale, alcoolisme, abus de drogue, inceste, suicide, corruption… c’est notre culture maintenant ».
Pas d’apitoiement. Pas d’excuse. Pas de cadeau.
Juste un baquet d’eau en plein visage, parce qu’il faut se réveiller.

Je sais que j’étais pas dans mon état normal en janvier, mais j’arrive pas à croire que j’ai préféré espacer le rythme de mes publications plutôt que de vous parler de Blackstone, puis d’avoir osé oublier cette série. L’erreur est réparée, cependant. Aussi vous n’avez plus d’excuse, maintenant.

Rho, quand je pense que le pilote a été diffusé le jour de mon anniversaire, je devrais avoir honte.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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