Une histoire de série policière sans intrigue policière…

11 octobre 2010 à 20:43

Ah. Voilà ENFIN un avantage à ma cure d’amaigrissement hadopienne : forcée de fouiller dans mes cagoules, je me retrouve à regarder des épisodes depuis trop longtemps reportés. A l’instar de Hanchou, dont je vous parle depuis je ne sais combien de temps, et que j’avais pris le soin de cagouler et d’oublier quasi-simultanément pour cause d’allergie au poulet… Bon, bah ça y est, c’est fait, j’ai vu le pilote. De la première saison et tout. Ah ouais nan mais, l’air de rien, on en trouve des choses dans ces cagoules !

Bon alors, vu l’intro de ce post, vous vous doutez que ce n’est pas non plus l’admiration qui domine. Déjà parce que Hanchou est super classique, dans son genre : plus basique pour une série policière japonaise, je ne vois pas. Il y a tous les éléments de base, tout ce qui en fait un produit grand public. C’est un peu Les Experts de la télévision policière (le côté scientifique en moins). L’équipe d’enquêteurs avec la psycho-rigide, le gentil petit gars (certainement un petit nouveau, en tous cas le plus jeune), le comic relief… et bien-sûr le chef qui est toujours à mi-chemin entre l’humour et le sérieux, ce mélange parfait de professionnalisme et de clownerie légère qui n’existe vraiment que dans les séries japonaises.
C’est un peu lassant parce que ça donne un peu l’impression d’avoir déjà vu cent fois ce cocktail, les personnages ne brillant pas par leur originalité (bien au contraire), l’enquête n’étant pas plus captivante non plus…

…En tous cas c’est vrai sur la forme. Mais dans ce pilote, il y a tout de même quelque chose qui ressort et qui impressionne le spectateur : l’un des portraits, celui d’une suspecte. Et je soupçonne que, si l’enquête est si banale, limite chiante, c’est parce que peut-être, juste peut-être, ce n’est pas le but du jeu que de jouer les bons policiers qui cherchent à démasquer leur coupable. En fait plus j’y pense et moins ça semble être l’objectif de Hanchou.

L’épisode est pourtant construit comme un wudunit, avec une séquence typique montrant le crime, c’est-à-dire la victime tombant à terre, laissant choir son sac à main, dans lequel quelqu’un se saisit quelques secondes plus tard, furtivement, du portefeuille, bien que la femme reste allongée au sol avec tous ses bijoux. Vol qui a mal tourné ? I think not.
Il ne faut pas longtemps à Hanchou pour nous présenter son coupable désigné : une vieille dame dangereusement armée d’un mégaphone qui hurle depuis sa fenêtre des rappels polis à sa voisine sur la nécessité de se réveiller ou sortir les poubelles pendant des heures… la voisine étant la victime. Son comportement d’emmerdeuse patentée (mais polie !) fait d’elle une cible évidente pour quiconque cherche un « méchant » dans le voisinage. Et justement, c’est le cas : la voisine au haut-parleur est immédiatement interrogée et suspectée par la police, car si elle faisait preuve d’autant d’agressivité passive, elle est forcément coupable.

Naturellement, notre hanchou (le chef de section, si vous voulez) a un doute. Et la suite va consister en une observation, un peu futile en apparence et carrément lourde dans son déroulement, de ce personnage et ses troubles. Notre vieille voisine grincheuse est en fait totalement brisée par la solitude ; chaque dialogue, chaque interrogatoire s’emploie à explorer sa souffrance, ses regrets, son amertume, sa lassitude. De ce côté-là, le pilote de Hanchou est incroyablement touchant, et s’attaque à un sujet d’autant plus sensible dans un Japon vieillissant mais à la jeunesse de plus en plus individualiste. Notre voisine antipathique se transforme sous nos yeux en victime ordinaire de la vie. J’ai aimé que, lorsqu’on évoque le cas de son fils qui ne vient plus la voir, on ne cherche pas à nous sortir une justification : ils sont fâchés, il ne vient plus, voilà tout. Pas d’angélisme, pas de scénario à dormir debout, les faits juste les faits : elle est seule. Ce n’est ni sa faute ni celle de son fils, ou un peu des deux : les lignes sont troubles et c’est tant mieux. Lorsqu’elle évoque l’homme avec lequel elle a vécu, un bon rien qui a vécu a ses crochets sans se cacher de n’être là que pour l’argent, et qui est mort d’un cancer en lui demandant simplement d’être là pour lui (cruauté suprême !), elle est parfaitement lucide sur l’accord tacite de cette relation, là encore, pas d’utopique aveuglement. C’est ce qui rend le portrait, tout en détails, d’autant plus déchirant. Le désespoir est à son comble lorsqu’elle supplie (et je ne dis pas demande, non, elle supplie quasiment à genoux) d’être envoyée dans le couloir de la mort pour que tout ça s’arrête.
Sur cet angle-là, Hanchou est incroyablement fort. Ce n’est donc pas tant une série policière au sens strict du terme, qu’une série dramatique utilisant des enquêtes comme prétexte à étudier la société japonaise, une personne à la fois. C’est ce que j’aime dans Law & Order SVU par exemple. A priori ce serait donc un bon point.

Mais la forme est épuisante. Et ça, c’est vraiment difficilement surmontable. Je me désintéresse totalement des personnes qui travaillent dans l’équipe, à vrai dire je n’ai même aucun intérêt pour le hanchou qui est du genre « personnage principal omniscient à l’humour discret », fréquent dans les séries japonaises et surtout les policières, et qui m’exaspère. Il y a aussi une galerie de personnages secondaires qui viennent juste rallonger la durée de l’épisode (le chef du hanchou, son ami dans un autre service, la jolie journaliste…), qui ont dix secondes de présence dans l’épisode, et surtout, zéro utilité. C’est contractuel, et c’est chiant de voir la série presque se forcer à ces petits instants légers pour ne pas perdre la majeure partie de son public. J’ignore si la concession est consciente, mais elle est atroce à regarder parce qu’elle gâche absolument tous les bons points de l’épisode.

Alors forcément, sur la question de la forme, je préfère BOSS. Et du coup je la recommanderais plus facilement à des personnes peu ou pas habituées aux séries japonaises, bien plus que Hanchou qui est vraiment un produit taillé pour un public nippon et relativement peu regardant. La série n’est pas mauvaise, mais elle n’est pas bonne non plus. C’est son drame à elle.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

1 commentaire

  1. Nakayomi dit :

    Maintenant, tu n’as plus qu’à voir le reste de la série pour savoir si cette approche de la voisine était particulier ou si la série se montre plus policière que ça (bah oui, après tout hein… )

    Sinon a priori pas dans ce que j’ai envie de voir de ce côté-là pour le moment…

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