Aujourd’hui, un post de pure science-fiction. Non, ce n’est pas la suite de mes interrogations lasses sur les pitches de SF (qui d’ailleurs ont largement été atténuées par la découverte de District 9 sur les recommandations éclairées de Livia), mais un post qui en lui-même, relève de l’imaginaire.
Il y a eu une naissance, récemment, dans mon entourage. Fait peu courant parce que, globalement, on est en froid avec la plupart des membres de notre famille, mais surtout parce que, même en cherchant bien parmi ceux à qui on ne cause plus, on doit être 5, à tout casser, à être dans la tranche d’âge où on pourrait faire des enfants. Dont ma sœur, moyennement motivée, et ma cousine, pas tellement plus convaincue mais bon, elle vient de se marier, on en reparlera dans quelques temps ; du côté des garçons j’ai pas de nouvelles mais apparemment ce n’est pas à l’ordre du jour. Quant à moi, j’ai clairement fait savoir qu’il valait mieux porter ses espoirs sur autre chose, qu’au mieux je veux bien produire quelques textes chaque semaine, mais que c’est tout ce qu’on fera sortir de moi (et à l’approche des trente ans, mes parents commencent à réaliser que je ne déconne pas et que les chances que je change d’avis s’amenuisent). Donc, la natalité, dans ma famille, c’est pas ça qu’est ça. Obligée de me tourner vers les proches en-dehors du cercle familial.
Cette naissance a donc déclenché quelques interrogations de ma part, dont le tout naturel : « et tu vas lui faire regarder quoi, à ton gosse ? ». Ce qui, nous en conviendront tous, est une question des plus évidentes lorsque l’enfant paraît. Devant l’absence de réponse de mon interlocutrice (dévoilant par là que son projet éducatif n’est pas encore bien clair), je me suis donc mise à imaginer ce que moi, je ferais voir à mon gamin, si par le plus grand des malheurs il m’en venait un.
Malheur qui, si je puis me permettre, serait probablement réciproque chez ledit bambin : « maman c’est quand qu’on mange ? »/ »chut, laisse-moi finir ma saison ».
En tant que téléphage, la télévision fait partie intégrante de l’arsenal que je déploierais pour éduquer un gamin. C’est tellement évident que je ne devrais même pas avoir besoin de le préciser.
Je ne dis pas qu’il serait question pour moi de me servir de la télé comme d’une nourrice, au contraire. Je ne vois pas l’intérêt de mettre un chérubin qui ne sait pas encore parler devant une télé qui blablate à longueur de temps, pour commencer. On ne regarde pas la télévision parce que ça bouge et ça fait du bruit, on la regarde parce qu’elle raconte quelque chose, de réel ou de fictif (souvent un peu des deux), et pour cela il faut que la parole soit déjà présente, ça semble logique. Certes, je ne suis pas très au fait de ce que disent les spécialistes sur la capacité de compréhension d’un bébé avant et après qu’il possède le don (ou la malédiction, ça dépend du point de vue) de parole, ça se trouve un bébé est tout-à-fait capable de piger ce qui se dit dans un programme pour jeunes enfants, je n’en sais rien, je m’en fiche. Là, tout de suite, un expert débarquerait pour me dire qu’un enfant de 6 mois peut suivre sans problème un épisode d’A la Maison Blanche, c’est le même tarif. Si le gamin ne peut pas parler, je ne vois pas pourquoi il regarderait la télé.
Évidemment, je ne le parquerais pas dans son berceau pendant que je regarde moi-même la télé, il serait éventuellement envisageable que quand je la regarde, il soit dans les parages, donc il pourrait l’entr’apercevoir, mais je ne lui ferais pas spécialement regarder.
Ce serait plutôt une façon réaliste de lui faire comprendre que dans les décennies à venir, s’il me cherche, il sait où me trouver : cherche l’écran, tu trouveras maman.
Ainsi donc, être capable de communiquer avec le gamin semble, de façon instinctive, logique. S’il ne peut pas discuter de ce qu’il voit, ça n’a pas le moindre intérêt. Ensuite, effectivement, viendraient les années les plus horripilantes, quand le gamin peut parler mais n’a rien à dire et finit par faire du bruit. Je vous avoue que ces 3, 4, ou peut-être 5 années-là sont une des grandes raisons qui m’incitent à ne pas faire d’enfant (ça, et les 15 suivantes ; en gros, je suis tout-à-fait prête à avoir un enfant s’il m’est livré majeur, par exemple). Il y a probablement des choses à faire regarder à un enfant qui est en maternelle, mais pour ma part je n’en vois aucune actuellement.
En fait, je commence à avoir une idée précise des séries que je ferais regarder à un enfant vers l’âge de 6 ou 8 ans, mettons.
Instinctivement, j’ai envie de dire que beaucoup des séries que j’ai vues dans ma propre jeunesse lui seraient recommandées. Punky Brewster, par exemple, très bien. Ricky ou la Belle Vie, très bien aussi. Des séries mignonnes, tous publics (enfin, je me suis pas fait d’intégrale mais d’après mes souvenirs et les pilotes revus récemment, je pense quand même que je ne m’avance pas trop), mais pas abrutissantes. Je ne vais pas me donner la peine de donner naissance à un gamin si c’est uniquement pour qu’il aille grossir les flots de décérébrés qu’on trouve déjà en quantités un peu partout. Non, si je dois avoir un mioche, autant ne pas le trépaner. Car ces séries ont quand même le mérite de n’être pas totalement des séries de Bisounours : une orpheline qui vit dans la rue, un petit garçon qui n’a pas de maman… bon, on ne va pas se le cacher, ce que je vais donner à manger téléphagiquement à mon gamin imaginaire, c’est pas quelque chose d’idéalisé.
Hélas, je n’arrive pas à penser à un exemple de série récente qui s’inscrive dans cette démarche. Des idées ?
Mais surtout, c’est ensuite que les choses se jouent. Jusque là c’est facile : le mioche vit en circuit quasi-fermé, il n’a pas de raison de sortir du cadre scolaire ou familial sans encadrement, il est culturellement contrôlable. Mais vient l’âge honni de la pré-adolescence, et là, tout bascule. Les forces qui sont en jeu sont énormes. Il faut lutter contre la société toute entière.
Le défi ? Éloigner mon rejeton des tentations des séries Disney.
En garde, héritières hélas inévitables de Hannah Montana, remakes honteux de Phénomène Raven, surenchères de niaiseries chantées à la Sonny with a Chance ! Ce n’est pas parce que tout le monde les regarde qu’il faut que le fruit de mes entrailles en fasse autant. Et si tout le monde se jette du haut d’un pont, est-ce qu-… Hm. Passons. Non, c’est un combat à la vie à la mort pour le salut de l’âme de la Bête pré-adolescente qui vit dans la chambre dans laquelle je ne peux plus entrer. Oh, c’est sûr, je vais me faire haïr pour ça, mais de toute façon je vais me faire haïr, alors autant que ce soit pour la bonne cause.
Et avec les années, le défi va augmenter. Alors qu’inexorablement, je vais devoir laisser l’Animal sortir de la maison de plus en plus souvent, pour des motifs qui me sembleront ridicules tels qu’aller faire du lèche-vitrines, se retrouver pour jouer au foot, ou même, jusqu’où ira la débauche, des pyjama parties (et encore, Dieu nous préserve des goûters d’anniversaires, mais enfin tu l’as pas déjà fêté l’année dernière ?!), je vais perdre le peu de contrôle que j’avais sur la consommation téléphagique de la Bête, c’est sûr.
C’est pour ça qu’il faut prendre les devants avant même les 10 ans. C’est ce que préconisent tous les spécialistes de la téléphagie. Statistiquement, c’est à ce moment-là ou jamais. Il me faudra alors regarder le plus possible de bonnes séries avec mon gamin, des séries récentes, évidemment, on ne veut pas l’effrayer ce petit, mais des classiques, aussi : 10 ans, La Belle et la Bête. 11 ans, Une Nounou d’Enfer. 12 ans, V. 13 ans, Oishii Gohan.14 ans, Pushing Daisies. 15 ans, Angela, 15 ans. 16 ans, A la Maison Blanche, Boston Public, Mousou Shimai, Roseanne, Better Off Ted… Je n’aurai jamais assez de temps !
Et ne pas juste lui faire regarder, non, regarder avec lui, et discuter, discuter, discuter, et expliquer, expliquer, expliquer…
Ça m’épuise juste d’en parler.
C’était déjà tellement difficile de m’éduquer moi-même téléphagiquement ! Regardez : bientôt 30 ans, et j’en suis à peine à aborder l’Asie, l’Afrique, l’Amérique du Sud… Non, il y a trop de boulot. La tâche est énorme.
Rien que pour ça, papa, maman, désolée, mais je ne ferai jamais d’enfant.
Tiens pour une fois que je suis dans le vif du sujet, je me permets d’intervenir.
Alors déjà, oui un enfant comprend toute discussion avant de parler. Ma fille 20 mois ne sait pas parler, mais ça fait bien longtemps qu’elle nous comprends et qu’elle communique a sa façon avec nous.
Alors oui aussi faut pas laisser un enfant trop longtemps devant la tv, mais oui un enfant adore la tv. ( et franchement parfois ça rend bien service !) Mais il faut aussi savoir qu’il a des gouts bien précis et que non c’est pas vraiment toi le parent qui choisi ce qu’il aime voir.
Moi je déteste t’Choupi et Dora mais ma fille est ça la captive !
Moi aussi j’avais des plans bien défini en ce qui concerne quoi voir a la tv quand elle serait plus grande (genre Dawson ou Freaks and Geeks!) mais quand je vois que déjà a moins de 2 ans c’est déjà elle qui tient la télécommande, je me dis que ça va pas être une partie facile.
Enfin je ne désespère pas et surtout je me dis qu’il y aura bien des jours pluvieux ou mes DVD lui feront de l’oeil !!!
Comme le souligne Céline, l’ambition téléphagique des parents, c’est un peu comme l’ambition professionnelle, musicale ou autres d’autres… L’enfant a son mot à dire et détruit tous les espoirs placés en lui. O
Plus sérieusement, ayant une soeur de 7 ans de moins de moi, il se trouve que j’ai pu tester dans ma jeunesse une forme d’éducation téléphagique (bouleversant par là-même les questions d’âge, mais c’étaient les contraintes de n’avoir qu’une télé). A 5 ans, elle était une grande fan de Une nounou d’Enfer et de Loïs & Clark ; à 6 ans, Amicalement votre, c’était la série « gentleman » toute vieille qu’il était sympa de voir ; à 7 ans, elle regardait Urgences et avait déjà tout compris aux mécanismes des teen-show traditionnels avec Hartley Coeur à Vif ; à 8 ans, Friends était à jamais la meilleure sitcom à ses yeux (et ça l’est resté) ; à 9-10 ans, je l’avais transformé en fan de Gilmore Girls et d’A la Maison Blanche (elle ne comprenait pas grand chose, cela revenait à passer une partie de l’épisode à lui expliquer certaines subtilités, mais toutes les piques plus drôles ou des épisodes comme Navigation Céleste l’ont toujours fait mourir de rire) ; à 11 ans, j’ai commencé son éducation science-fiction ; à 14 ans, je l’ai installée manu militari devant Nobuta wo produce (cela a provoqué la plus grande réaction de toute son éducation téléphagique, puisqu’elle est partie dans un vaste cycle japonais, absolument fascinée par ce pays, au point d’acheter des livres pour apprendre à écrire et lire le japonais, avoir des correspondants japonais, lire des bouquins ou magasines sur la culture japonaise… c’est la première fois qu’elle manifestait tant de curiosité pour une culture étrangère) ; enfin, à 17 ans, 1ère série coréenne…
Mais tordons le cou aux idées reçues, recevoir une éducation téléphagique ne fait pas de l’enfant un téléphage de demain. Car un premier constat s’impose : ma soeur n’est pas téléphage, pas même vraiment télélambda. Elle aime bien regarder la télévision, mais c’est toujours « ce qui lui tombera sous la main », aucune curiosité devant l’inconnu. Elle est restée fan de toutes les séries que je lui ai présenté quand elle était plus jeune, mais elle ne prend toujours aucune initiative pour révolutionner ses programmes. Ce n’est pas elle qui entamerait spontanément une nouvelle série ou qui ferait preuve de curiosité… à mon plus grand regret.
Pourtant vu la somme de DVD et autres supports qu’elle a sa disposition en étant ma soeur, elle aurait pourtant de quoi trouver la perle rare, sans même tergiverser devant un programme tv. Mais non, toujours rien, aucune étincelle. Donc elle continue de regarder des séries, oui ; à un rythme très modéré, certes, mais honnête ; elle a une éducation pas mauvaise en la matière et te cite sans problème les grandes références. Mais voilà, les seules nouveautés qu’elle tentera, ce sont celles dont je vais lui mettre les DVD entre les mains avec autorité (et après, par contre, elle s’offre des marathons de saison, comme une vraie téléphage ^^). Cet été, j’ai ainsi pu l’initier à Psych, Doctor Who, You’re beautiful, Coffee Prince, Chuck et The Big Bang Theory…
Reste que, malgré tout, je me suis fait une raison : ma soeur ne sera jamais téléphage, en dépit de tous mes efforts.
Ce long post égocentrique pour en conclure, donc, que les grands projets téléphagiques, c’est bien. Donner des bases culturelles solides, c’est bien aussi. Mais malheureusement, cela ne fera pas automatiquement de ce môme un téléphage dans le futur. (Mais l’endoctrinement à 10 ans comme pour A la Maison Blanche, ça a très bien fonctionné ; elle découvre maintenant la série avec un autre regard et adore, alors que ce n’est pas trop son style a priori.)
[C’était Livia en mode 3615 MyLife)
Je me suis aussi posé cette question.
Et comme toi j’aimerai bien que ma progéniture se nourrisse de belles séries. Mais comme le soulignent Celine et Livia, tu ne peux imposer tes goûts. Tu ne formes pas un clone ou une amélioration de toi-même, tu éduques un enfant qui a ses propres envies, son propre cheminement, sa propre sensibilité surtout.
Alors bien sûr je tenterai de lui montrer certaines choses mais je ne veux pas non plus être déçu si je m’investis de trop. C’est une question de dosage.
En revanche je me pose beaucoup de questions sur le sexe de mon (mes) enfant (s). Est ce que je veux davantage une fille ou un garçon ? Parce que mine de rien ça joue aussi.
M’enfin tous ces questionnements s’envoleront le jour J (en espérant qu’il arrive, mais la lente machine prévisionnelle est en route). Devenir parent, c’est s’adapter, non ?