Vous n’avez pas encore pu prendre de vacances ? SeriesLive se propose de vous emmener en Inde, un pays où la télévision est très présente. Bouclez vos bagages, nous allons découvrir un nouvel univers.
À l’heure où le cinéma de Bollywood captive de plus en plus d’Occidentaux, et où la musique indienne charme bien au-delà de ses frontières, profitons de l’été pour revenir sur la culture télévisuelle d’un pays enivrant et intrigant, l’Inde. Aujourd’hui, on y trouve 130 millions de télévisions, et c’est le troisième plus gros marché télévisuel du monde, derrière les États-Unis et la Chine. C’est qu’il doit bien s’y passer quelque chose !
– De la télévision unique au choix pléthorique
C’est en septembre 1959 qu’émet pour la première fois Doordarshan (littéralement : « télévision »), la première chaîne d’Inde, avec trois malheureuses émissions de 30 minutes chaque semaine dans un premier temps. Il faut dire que dans un pays qui ne compte très exactement que 41 postes de télévision, la demande n’est pas bien forte, d’autant que les prix sont incroyablement élevés pour la plupart des Indiens. La société Philips, qui est à l’origine de ce projet pour lequel elle a reçu quelques subventions, n’est pourtant pas prête à abandonner ; pour l’aider, le gouvernement instaure des clubs de télévision. La population peut s’y retrouver autour d’un seul poste et prendre goût à ce nouveau loisir. À partir de 1970, tout en augmentant progressivement le nombre d’heures de programmes par semaine, Doordarshan va étendre sa couverture au-delà de Delhi. Les émissions sont alors majoritairement destinées à la culture, l’éducation ou l’information, et vont être pendant longtemps dénuées de fictions. En 1975, le pays lance, en partenariat avec la NASA, un premier satellite expérimental destiné à couvrir des zones plus reculées ; l’Inde devient alors le premier pays en voie de développement à utiliser le satellite pour la diffusion télévisée.
Comme son nom l’indique, Doordarshan est la définition-même de la télévision pour les Indiens, qui attendront quand même jusqu’en 1982 avant d’avoir la couleur. La chaîne unique propose alors des émissions autour de l’anniversaire de l’indépendance du pays, avec comme point de départ une allocution d’Indira Gandhi, ce qui rend d’autant plus symbolique cette avancée technologique. À la fin des années 80, Doordarshan (surnommée DD), lance une seconde chaîne publique, DD2, qui prendra plus tard le nom de DD Metro ; cette nouvelle chaîne propose à la fois des programmes nationaux et des décrochages locaux, dans une Inde où chaque dialecte nécessite ses propres émissions.
Il faudra attendre 1991 pour que la télévision indienne s’ouvre au privé ; les premiers à s’engouffrer dans la brèche sont CNN (filiale de la chaîne du même nom aux États-Unis) et STAR TV (filiale d’une chaîne éponyme à Hong Kong), et pour ce qui concerne les investisseurs indiens, on trouve Zee TV et Sun TV. À ce moment-là, ce sont tout de même 70 millions de foyers qui sont équipés (sur 400 millions d’habitants), et les années 90 permettent à tout ce petit monde d’avoir accès à pas moins de 100 chaînes. Première chaîne d’origine indienne à s’aventurer sur le câble, Zee TV ouvre la voie et c’est alors très vite la ruée vers l’or ; le câble et le satellite vont se développer très rapidement pendant cette décennie.
En 2001, l’Inde fait un nouveau pas technologique, en décidant de se doter du système CAS, qu’on pourrait qualifier d’équivalent de la TNT en France. Jusque là, la couverture du territoire indien est très inégale, notamment en zone rurale, et se fait à des prix très variables d’une région à une autre pour les chaînes payantes, L’idée est donc lancée de permettre l’accès à ces chaînes payantes, via un récepteur qu’il faut acheter à un tarif unique et ce, où que l’on habite. Cette technologie présente de nombreux avantages, mais reste cependant trop chère pour beaucoup d’Indiens, et en 2008, seulement 25 % de la population avait recours au CAS, les 75 % restants se contentant des chaînes gratuites.
La prochaine étape pour la télévision indienne est de passer au tout digital ; les autorités de régulation ont donné aux chaînes jusqu’en 2013 pour faire cette transition.
Le siège de Zee TV à Mumbai est assorti à son logo coloré !
– Les chaînes indiennes
Vu le nombre de chaînes disponibles en Inde, on va éviter la liste exhaustive ! Voici les principales chaînes à retenir en matière de fictions :
Colors : il s’agit d’une chaîne toute récente (2008) qui, grâce à une politique agressive en termes de recrutement d’acteurs populaires, a su se tailler très vite la part du lion. Depuis janvier 2010, elle est également disponible outre-Manche.
Doordarshan : la chaîne publique fêtait en septembre 2009 ses 50 ans, ce qui n’est pas rien ! Aujourd’hui, en raison de ses nombreuses ramifications, la chaîne est également appelée DD National.
POGO : sa grille est principalement constituée de séries à destination des jeunes et des enfants, avec beaucoup d’animation, beaucoup d’importations, et quelques fictions maison çà et là.
Sahara One : chaîne généraliste proposant aussi bien des fictions que de la télé-réalité.
SAB TV : elle débute en 2000 comme une chaîne généraliste avant de se réorienter vers la comédie, puis les programmes pour la jeunesse, puis à nouveau la comédie.
Sony TV : cette chaîne basée à Mumbai, également surnommée SET, est l’une des chaînes les plus populaires d’Inde, principalement parce qu’elle s’adresse à toute la famille.
STAR One : la petite sœur de STAR Plus (voir ci-après) démarre en 2004 et suit le même chemin, fait de programmes simples à destination des jeunes femmes.
STAR Plus : d’abord lancée en langue anglaise par un groupe basé à Hong Kong, STAR Plus opte quelques années plus tard pour le hindi, mais a du mal à s’imposer. C’est la société de production Balaji Telefilms, et sa cargaison de soaps, qui va lui permettre de se faire aimer du public.
Zee TV : lancée en 1992, il s’agit de la première chaîne du câble originaire d’Inde. Diffusée dans une quinzaine de pays au monde, c’est également l’une des chaînes les plus populaires auprès des jeunes.
Il est cependant intéressant de noter que, si les chaînes proposant du divertissement sont nombreuses, elles ne font jamais autant d’audience que les chaînes d’information, qui restent les plus regardées. Enfin, les audiences, pour ce que ça veut dire…
– Kamasutra de la mesure d’audiences
En matière de télévision, les Indiens sont fripons : ils aiment mesurer leurs audiences de multiples façons. Mais dans un pays où les disparités sociales, linguistiques et religieuses sont si variées, il semble assez normal que la question soit compliquée. Ah, comme tout était simple quand Doordarshan était la seule chaîne, et qu’elle mesurait elle-même ses audiences ! Certes, elle pouvait dire tout et son contraire du succès de ses émissions, mais enfin, son système DART avait l’avantage de la simplicité. Aujourd’hui, ce système a perdu son monopole, mais il existe toujours, et d’ailleurs, c’est le seul à pouvoir mesurer les audiences dans les zones rurales de l’Inde.
En 1994 arrive le système INTAM, rebaptisé TAM en 1997, et proposé par des compagnies privées regroupées autour de l’institut Nielsen. Le gouvernement lui accorde alors le monopole officiel de la mesure d’audience (ou TRP, pour Television Rating Point), et bien que son système de calcul soit contesté (notamment parce qu’il est très opaque), il s’est affirmé comme le système de mesures le plus important du pays. Une place très convoitée qui incite des investisseurs américains à lancer en 2004 le système aMap comme concurrent ; son principal atout est de délivrer les chiffres le lendemain de la diffusion, et non une semaine après comme le fait TAM.
L’hégémonie de TAM est régulièrement remise en question aussi bien par les professionnels que par le public. Le problème, c’est d’une part que TAM ne mesure l’audience qu’à partir de quelques milliers de spectateurs, ce qui, au regard de la population indienne (s’élevant à 1,18 million d’âmes), ne pèse déjà pas bien lourd. Mais surtout, ses résultats sont systématiquement payants, et ne sont jamais dévoilés publiquement. Et puisque les compagnies audiovisuelles doivent débourser de l’argent pour connaître leurs propres audiences, TAM est souvent suspecté de chercher à faire plaisir à ses clients, donnant d’une main et prenant de l’autre. Du coup, pas étonnant qu’à intervalles réguliers, on annonce de nouveaux systèmes de calcul de TRP, soi-disant plus performants, qui d’ailleurs ne voient pas forcément le jour. La contestation des chiffres de TAM par les professionnels eux-mêmes (certainement ceux qui refusent de payer) jette en tout cas un profond discrédit sur le prétendu succès (ou non) des programmes. La popularité d’une série tend donc à se mesurer aux phénomènes qui l’entourent plutôt qu’à des audiences. Incidemment, certaines séries dont TAM affirme que les TRP sont médiocres ne sont pas annulées pour si peu, ce qui indique clairement l’ampleur du malaise autour de la mesure d’audience en Inde…
En Inde, ce n’est pas toujours facile de savoir qui regarde quoi…
– Au pays de la diffusion massive
Le système de diffusion des séries ne s’est jamais vraiment structuré, en Inde. Il n’y a, pour commencer, pas vraiment de saison : les séries commencent quand elles veulent. A vrai dire, elles finissent aussi quand elles veulent ! Lorsqu’on parle de saisons pour une série indienne, on ne quantifie donc pas vraiment le nombre d’années (ou portions de l’année) qu’elle a passé à l’antenne. Pour une série, une saison, c’est ce qui désigne le moment à partir duquel la série a commencé à être diffusée, et cela finit lorsqu’elle s’interrompt, pour quelque raison que ce soit. Un exemple éloquent : la comédie Hum Paanch a commencé en 1995, et sa diffusion s’est poursuivie sans discontinuer jusqu’en 2000 ; puis, elle a repris de 2005 à 2006. Eh bien, officiellement, la série n’a que 2 saisons… pour plus de 500 épisodes au total !
Il y a donc toute l’année des séries qui finissent, et donc d’autres qui commencent. Mais le plus fou c’est qu’il n’y a jamais de pause pendant des vacances, par exemple. Les déprogrammations en cours de diffusion interviennent rarement (en général uniquement si l’actualité l’impose). En Inde, une série a donc de grandes chances d’être diffusée 4 jours par semaine, 52 semaines par an ; pas étonnant que le nombre d’épisodes soit souvent titanesque !
La majorité des séries (le plus gros des troupes étant constitué de soaps et de comédies) sont diffusées en quotidienne, du lundi au jeudi, à partir de 19h30 ; les épisodes durent rarement plus d’une demi-heure. Certaines séries, à l’instar de CID, sont en revanche diffusées le vendredis et samedis, mais il s’agit de cas plus rares. Généralement, en ce qui concerne le prime time, le weekend est consacré aux émissions d’information et de divertissement, et la semaine réservée aux fictions.
– Les premières séries qui donnent le ton
C’est dans les années 80 que l’Inde développe ses premiers soaps. Hum Log, le premier du genre, débute en 1984 sous l’impulsion du ministre de la Culture de l’époque (au retour d’un voyage au Mexique, il s’était senti inspiré par les telenovelas). On y raconte l’histoire d’une famille on ne peut plus normale de la classe moyenne, qui tente de surmonter un certain nombre de problèmes personnels courants. Cette première série-fleuve, totalisant 156 épisodes et s’achevant en 1985, crée le canevas d’un grand nombre de soaps futurs, où la famille sera bien souvent au centre des préoccupations. D’ailleurs, ses audiences sont à l’époque absolument hallucinantes et ont de quoi rendre jaloux les créateurs de séries d’aujourd’hui : jusqu’à 90% des Indiens regardent la série, et dans les zones où on ne parle pas hindi (la langue dans laquelle la série est tournée), ça n’empêche pas les spectateurs d’être présents jusqu’à 40%. D’accord, Doordarshan n’a alors pas de concurrence, mais rien n’obligeait les gens à allumer leur télévision… Plus de 25 ans après, et ce, même si son message éducatif sur la libération de la femme n’est pas forcément passé, Hum Log reste la plus importante série de l’histoire télévisuelle indienne.
Un autre genre remporte un grand succès : la série historique. Ramayan apparait en 1987, et s’inspire des écritures religieuses hindoues. Lancée de façon hebdomadaire le 25 janvier, elle s’étendra sur 78 épisodes jusqu’en juillet 1988. Bien que la chaîne Doordarshan n’ait pas une haute idée du projet, programmant Ramayan dans une case peu populaire, la série attirera jusqu’à 100 millions de spectateurs (beaucoup faisant l’acquisition d’une télé uniquement pour ne pas rater d’épisode), ce qui lui vaudra de tenir le record du plus grand nombre de téléspectateurs pour un programme télévisé dans le monde. La série devient un tel phénomène que toute l’activité du pays (transports, services religieux…) doit s’adapter à sa diffusion. Ramayan devient la première série d’un sous-genre de la série historique : la série d’histoire religieuse. Elle sera suivie de nombreuses autres, donnera un spin-off et fera l’objet d’un remake en 2008.
Enfin, Karamchand est l’une des premières séries policières. Aidé par une assistante maladroite, Kitty, le détective Karamchand aide la police à résoudre diverses enquêtes. En plus de démasquer les criminels, il devient une icône : sa façon de parler, de s’habiller, de se comporter, font du personnage un modèle à suivre pour beaucoup de jeunes hommes impressionnés par son côté ultracool. Aidé par un gimmick à la portée de tous (notre enquêteur mâchonne en permanence une carotte ; d’ailleurs les ventes de carottes ont décollé pendant la diffusion de la série !), Karamchand est un homme charismatique qui se permettait également des instants de comédie, notamment grâce à son empotée d’assistante. Le succès du personnage fait le succès de l’acteur principal, qui d’ailleurs retrouve en 2007 son rôle fétiche le temps d’un remake.
Ces trois séries donnent naissance aux genres télévisuels qui seront les plus employés à la télévision indienne. La fiction indienne touchera évidemment à d’autres genres, mais ce sont ces trois-là qui domineront les grilles pendant les décennies suivantes.
Les comédies ont également la part belle, mais leur pitch consiste généralement à prendre une situation familiale pour en rire, c’est-à-dire à employer les mêmes bases que la plupart des soaps pour les traiter avec un ton différent. Leur format, leur réalisation et leur diffusion restent également très proches des soaps.
Le développement des soaps doit énormément à Balaji Telefilms, une société de production à la tête de laquelle on trouve la productrice Ekta Kapoor. Balaji est devenue dans les années 2000 la plus importante maison de production de l’Inde, grâce aux formules de soaps développés par Kapoor. On parle de phénomène « K » pour désigner l’importance croissante des créations de Kapoor dans les grilles des chaînes (d’ailleurs, la majorité de ces séries ont un nom commençant par la lettre « K ») ; mais si les séries en question sont populaires, elles reçoivent néanmoins beaucoup de critique pour leur absence d’originalité, et leur portrait idéalisé de nombreux faits de société.
Hum Log, premier soap indien
– Miroir de quelle Inde ?
En dépit d’un grand choix de chaînes, et d’une offre télévisuelle vaste, la télévision indienne connaît un problème de représentativité. Pour mieux comprendre ce problème, il faut d’abord chercher du côté du pays lui-même : l’Inde reconnaît 23 langues et dialectes dans sa Constitution. La télévision est donc très fragmentée à cause de cette seule particularité nationale, puisque les spectateurs ne peuvent regarder que ce qu’ils comprennent ! À la façon des USA, chaque État (il y en a 28) a donc sa propre programmation, que ce soit avec des chaînes locales, ou nationales, mais proposant des décrochages locaux à certaines heures. Sur la totalité de l’offre, les Indiens se reconnaissent donc, finalement, seulement dans une petite partie des fictions proposées à travers le pays.
Mais l’un des plus gros problèmes réside dans le contraste entre le monde urbain et le monde rural. On l’a vu, ce dernier n’est pas représenté dans le principal système de mesure des audiences. Mais de toute façon, peu de séries se déroulent dans un contexte rural, à la campagne. Les personnages de la plupart des fictions ont adopté un mode de vie piochant dans la culture occidentale : ils poursuivent des études, se marient plus tard, ne vivent plus autant avec leurs parents, etc. Le pays compte, d’après le dernier recensement de 2001, une population rurale de plus de 72 % des Indiens, et malgré cela, leur mode de vie n’est pas ou peu représenté à la télévision. Cycliquement, des chaînes tentent de s’acheter une crédibilité (comme Sony TV avec Maan Rahe Tera Pitaah depuis début juin 2010), mais les audiences sont rarement au rendez-vous et les tentatives sont souvent de courte durée.
Sur un sujet connexe, la condition des femmes en Inde pose de vraies questions quant à la représentation qu’en fait la fiction. Dés le premier soap, Hum Log, on a vu que les autorités tentaient de faire passer des messages afin de faire progresser la société indienne dans ce domaine. Mais depuis au moins 10 ans, le féminisme n’est plus de mise dans les séries, et surtout pas dans les soaps. Certes, ce n’est pas dans leur nature de révolutionner le monde, mais les soaps grand public ont développé la mauvaise habitude de présenter les femmes comme pleines d’abnégation et de générosité, acceptant tous les coups du sort sans broncher. La chose est d’autant plus difficile à comprendre que le marché de la télévision indienne est majoritairement dominé par des auteurs et producteurs… de sexe féminin. Bien que certaines séries tentent de faire passer un message différent (à l’instar de Tara ou Banegi Apni Baat), la majorité des fictions fait du sur-place à ce sujet, voire même, opère un retour en arrière. Le conservatisme des années 2000 se ressent également dans le traitement de la difficile question de société des castes et du colorisme, deux sujets encore sensibles en Inde, et dont les femmes sont souvent les premières victimes. Récemment, la série Saat Phere avait encore pour sujet une femme à la peau sombre, ostracisée du fait de sa couleur… mais qui évidemment souffre du racisme quotidien dans la dignité (= en silence).
Pourtant, des études très sérieuses ont montré que l’arrivée du câble dans les foyers ruraux avait un impact positif sur le taux de violences domestiques, la préférence des fils aux filles (donnant encore souvent lieu à des avortements clandestins), et autres problématiques comme l’éducation des jeunes enfants et les mariages forcés. Mais à travers ses thématiques récurrentes de l’amour impossible, de la femme bafouée qui reste digne, et de la famille qui traverse les épreuves, la télévision grand public a tendance à faire perdurer le mythe de la femme indienne parfaitement douce, si ce n’est soumise, qui reste belle et noble dans l’adversité. Oh, le gouvernement tente de faire passer des messages éducatifs, mais la loi ne suit pas toujours ; un exemple assez parlant est la régulation des publicités à la télévision : toute publicité pour un quelconque substitut au lait maternel est absolument proscrite, de même que les petits pots pour jeunes enfants, et la contraception ne doit jamais être mentionnée explicitement. D’un autre côté, on parle de la même télévision qui attend de ses publicitaires que la femme ne soit jamais montrée dans une situation de soumission et/ou de passivité, ni comme une citoyenne de second ordre ! Bonjour le paradoxe.
Être une femme libérée tu sais c’est pas si facile…
– La télévision indienne hors de l’Inde
Une spécificité indienne : sa diaspora. Avec de nombreux ressortissants indiens installés dans d’autres pays du monde, et notamment la Grande-Bretagne ou les États-Unis, les chaînes se sont vite aventurées hors de leurs frontières afin de toucher le plus grand public possible, même si celui-ci ne parle plus très bien hindi (notamment les générations nées à l’étranger de parents indiens). D’ailleurs, les séries, surtout si elles s’adressent aux jeunes, ont même pris l’habitude d’employer un langage urbain, une sorte d’argot inventé en mélangeant le hindi et l’anglais ; cet hinglish, comme il est surnommé, permet ainsi aux populations ne pratiquant pas le hindi couramment de tout de même suivre les histoires. Zee TV, qui en 2000 touchait déjà 24 millions de spectateurs hors de l’Inde, a popularisé ce procédé la première. En France, Zee TV propose trois chaînes, disponibles en supplément sur le bouquet de l’offre de télévision par ADSL de Free ; les séries y sont sous-titrées en anglais.
Plus récemment, avec l’intérêt croissant des autres pays pour la culture indienne, grâce à la popularité des films de Bollywood et la carrière internationale de l’actrice Aishwarya Rai, de plus en plus de fictions indiennes parviennent à séduire dans les pays étrangers. Là encore, l’emploi de sous-titres en anglais fait beaucoup pour la propagation du phénomène.
Enfin, une petite curiosité : en 2009, au Brésil, une telenovela a été tournée sur le modèle des soaps indiens (ce qui, quand on y pense, n’est qu’un juste retour des choses quand on se souvient que Hum Log avait vu le jour sous l’influence des séries mexicaines). La série se nomme Caminho das Índias (« le chemin des Indes ») et raconte une romance entre un jeune Indien et une belle Brésilienne, dont bien sûr l’union est impossible du fait des différences culturelles et des traditions de chacune des familles. La série, tournée en Inde et au Brésil, a suscité un grand engouement, et a même remporté un Emmy lors des International Emmy Awards. Mais pour ce qui est des telenovelas… on verra ça une autre fois !
Article également publié sur SeriesLive.com.