Apathie

12 avril 2010 à 22:23

Il y a quelques jours, quand certaines préoccupations semblaient encore lointaines, j’ai éprouvé l’envie aussi soudaine qu’inattendue de revoir Le Protecteur. Non pas pour Simon Baker, mais au nom du bon vieux temps, lorsque TFHein a commencé à diffuser la série et que j’étais devant tous les après-midi, ou presque. Je dis presque parce que je n’étais pas sûre d’avoir vu le pilote (ce sont des choses qui hélas arrivent), et je suis convaincue d’avoir loupé tout de même quelques épisodes, puisque sans cagoulage ni DVD, je suis proprement incapable de faire un sans faute. Dans tous les cas, ce visionnage était pour sûr la première fois que je voyais la série en VO.

Dans ce pilote, on apprend comment Nick Fallin est forcé par un juge à faire des travaux d’intérêt général sous la forme de travail pro bono auprès du service d’aide juridique à l’enfance de la ville, chose pour laquelle il est qualifié en théorie puisqu’il est avocat. Cet avocat d’affaires n’a pourtant jamais plaidé devant une cour, mais j’ai envie de dire que c’est un peu le moindre de ses problèmes. On apprendra en effet par la suite que notre bonhomme est un consommateur de substances illicites… Un drogué avec un costume sur mesure, des pompes à 500 dollars la paire et un air de gendre idéal, qui confesse aimer l’argent et le pouvoir, mais un drogué quand même.

Cependant, contrairement à ce que son intrigue pourrait laisser penser sur le papier, Le Protecteur n’est pas une grande leçon humaine sur un mec pété de thunes qui va découvrir à la faveur d’un accident de parcours que la vie n’est pas rose pour tout le monde. Non, on dépasse très largement ce clivage simpliste. Nick Fallin a en effet un problème qui s’exprime à chaque seconde de sa présence à l’écran : il est complètement apathique. Le génie de ce personnage, c’est qu’on comprend immédiatement ce qu’un homme tel que lui, qui semble vidé de toute émotion humaine, peut chercher dans la consommation de drogues dures. Fallin est un grand refoulé qui semble dénué de la capacité à exprimer la moindre émotion, quand bien même (et ça n’est pas forcément prouvé) il serait capable d’en ressentir.

Bien au-delà de la leçon d’humilité au petit con arrogant, Le Protecteur se préoccupe de plonger son personnage dans le grand bain de la vie, avec le secret espoir de lui infliger un salvateur électrochoc émotionnel.

Nick Fallin est prisonnier de lui-même. La plupart du temps, il affiche un air blasé, et très franchement, on a l’impression que la plupart des choses qui se passent dans sa vie ne trouvent pas la moindre résonance en lui. Il laisse son intellect cartésien prendre le dessus, s’en remet au pragmatisme derrière lequel il lui est si facile de se cacher, à plus forte raison parce que sa profession s’y prête et qu’il y est doué, le bougre.

Mais sa première affaire va commencer à mettre à mal sa carapace, juste un peu, et c’est de cela dont toute la série va parler. Son premier petit client a, comme lui, perdu sa mère ; une douleur sourde les unit et donne à Nick l’occasion de s’animer un peu, réagissant à la douleur du petit qui fait écho à la sienne. On a hâte d’approfondir cela.
Si la drogue, comme son métier dans le cabinet friqué de son père, semblaient faire illusion et apporter un semblant à la fois de frisson et de respectabilité dans sa vie, on comprend que sa vie ne commence que maintenant, que Fallin s’apprête accoucher de lui-même, certes dans la douleur.

Attention, ceci est un paragraphe à spoiler, car ce dont je me rappelle de la suite de la série ne confirme malheureusement pas que la chenille est devenue papillon, le personnage ne trouvant jamais la force intérieure d’entrer totalement dans le monde, et préférant faire marche arrière dans ses relations personnelles dans les instants les plus cruciaux. Je me rappelle de façon floue le contenu des épisodes, mais très nettement mes cris effarés devant cette obstination à choisir le néant plutôt que le chaos.

Le Protecteur, plus, bien plus qu’une bête série judiciaire, et une série qui parle d’un personnage profondément apathique, oscillant entre le monde réel qui le pousse à se dépasser lui-même, et son petit monde carré et sécurisant où rien ne le bouleverserait. Un drame humain, avant tout.
C’est malin, maintenant j’ai envie de me faire une intégrale. Dites, ils sortent quand en France, les DVD ? Ce serait pourtant le moment, là…

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1 commentaire

  1. Nakayomi dit :

    J’avoue que j’ai un souvenir assez flou de la série… Je crois n’avoir regardé que quelques épisodes auxquels je n’ai pas dû accrocher plus que ça… Et je crois que maintenant, je fais une Simbon Bakerophobite Aiguë, donc ça ne va pas aider à me donner une quelconque envie de retenter. Je ne suis d’ailleurs pas sûr d’avoir cerné le personnage et son problème à l’époque.

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