Le théorème de « pas encore ?! »

18 février 2010 à 11:49

Ça fait des semaines, voire des mois, que tout le monde anticipe l’arrivée de Parenthood… eh bien moi, ça ne commence à prendre que maintenant. Et encore : très lentement. Peut-être que j’ai arrêté d’avoir hâte que telle ou telle série commence. Peut-être que ne plus suivre de très près l’actualité des projets fait que je ne suis plus dans cette boucle où la première news crée une attente qui est entretenue par les suivantes. Peut-être tout simplement que je n’ai plus la moindre confiance dans les pitches.
Toujours est-il que Parenthood, c’est une nouvelle série comme une autre, un pilote que je pourrai bientôt découvrir, comme je le ferais de toutes façons.

Mais déjà, quand Nick a publié les affiches de promo, j’ai commencé à me dire : « tiens mais au fait, c’est que ce serait presque alléchant, c’t’affaire ! ». Drôles, tendres, bien pensées (bien qu’assez éloignées de mes préférences en la matière) ces affiches ont titillé un peu ma curiosité, je suis bien obligée de le reconnaître. Ce qui tombe bien, c’est leur objectif.
M’enfin bon, l’échéance paraissait encore lointaine.

Et puis, quand j’ai ajouté la date du series premiere dans mon petit « Pilot Watch » (z’avez ptet remarqué ce ptit truc récemment ajouté dans la colonne de droite et qui permet de garder un oeil sur les prochains pilotes que je vais dévorer), j’avoue que ça m’a quand même fait un petit quelque chose. Tout d’un coup, le pilote semblait approcher à grands pas. Et j’ai commencé à me dire que cette échéance qui se rapprochait, c’était quand même drôlement chouette.
En d’autres termes, j’ai commencé à anticiper l’arrivée de Parenthood.

Ce n’est pas non plus comme si j’avais eu une révélation quant à l’existence de ce projet. J’ai beau ne pas me frotter à l’actualité de trop près, j’étais au courant de l’arrivée de cette série, j’étais au courant des soucis autour de la santé de Maura Tierney, j’étais au courant de son remplacement par Lauren Graham… Mais je pense que ce qui a participé à l’effet de surprise, quelque part, c’est de voir tous ces visages connus sur les affiches de promo.

Lauren Graham, Peter Krause, Monica Potter, Craig T. Nelson, Bonnie Bedelia, Erika Christensen, Mae Whitman… plein de visages connus (certains plus que d’autres, certes).

Il s’avère que j’ai un théorème personnel sur les acteurs qu’on connait bien et qui se retrouvent en nombre dans une série. Ce n’est pas un théorème infaillible, loin de là, mais enfin, régulièrement elle me donne des preuves de sa justesse, et bien qu’il arrive que le contraire aussi se produise, je garde la conviction que mon théorème est juste. Ledit théorème est donc le suivant :
Quand une nouvelle série est lancée, plus il y a d’acteurs qui ont précédemment connu la gloire dans des séries, plus il y a des chances que la série se plante.

Un casting prestigieux ne me semble jamais être un gage de réussite. Je veux dire : un acteur de renom, bien. Deux, bon, passe encore. Mais les 3/4 du générique, c’est mauvais signe d’office.
Ma conviction, c’est qu’à toutes autres caractéristiques égales par ailleurs, entre deux séries, celle qui a le plus de chances de tenir bon, c’est celle qui a un casting majoritairement peuplé d’inconnus.

Alors après, quand je dis inconnus, je ne veux pas forcément dire que les acteurs sont des débutants qu’on n’a jamais vu ailleurs. Mais il faut que la majorité d’entre eux n’ait pas eu de rôle marquant jusque là. Les rôles précédents étaient des seconds rôles, ou des guests ; et plus le CV est chargé de premiers rôles antérieurs dans des séries ayant marqué les esprits, plus c’est mauvais signe.
J’ai l’impression persistante (mais là encore ce n’est peut-être qu’une impression ; reste que je ne peux m’en défaire) qu’un casting composé de personnes ayant marqué les esprits est une sévère entrave à la réussite d’une nouvelle série. Une nouvelle série doit révéler des talents inconnus de la majeure partie du public. C’est à la fois sa vocation et sa meilleure chance de survie.

Alors quand je vois Peter Krause et son omniprésence à la télé ces dix dernières années (Six Feet Under, The Lost Room, Dirty Sexy Money), Lauren Graham et son front estampillé Gilmore Girls (d’ailleurs dés qu’on lit un article sur Parenthood, c’est terrible, le nom de Lorelai Gilmore revient instantanément quelque part dans le texte), Monica Potter qu’on a vue absolument partout (Boston Justice, Trust Me…), je réprime un frisson.

Parce que, facteur aggravant s’il en est, mon petit théorème se complète d’un axiome complémentaire : plus l’acteur a été vu récemment à la télévision, plus c’est dangereux.
Quand on est un acteur de télévision, il faut savoir faire profil bas pendant une saine période de temps, se faire oublier, et ensuite revenir dans la course. C’est aussi pour ça que Dieu a inventé le cinéma, le théâtre, les apparitions en guest et les économies à la banque : pour laisser passer un peu de temps. C’est la seule option qui permette encore de sauver les meubles : adopter la technique dite « Richard Dean Anderson », et laisser passer quelques années ou une décennie (idéalement deux) sans se faire remarquer avant de reprendre un rôle principal. Et entre MacGyver et Stargate SG-1, la magie de l’axiome complémentaire avait opéré, et personne n’avait l’impression persistante de voir Angus franchir la porte des étoiles en treillis (et c’était, du coup, pas du tout choquant de le voir se servir d’une arme).

Et c’est ça le secret.
Parce qu’autant au cinéma, c’est fatiguant de voir toujours les mêmes, mais pas dangereux pour le succès d’un film, autant repointer le bout de son nez dans un rôle important à la télévision dés qu’on a quitté le précédent, c’est mission suicide pour les audiences.

Il ne faut pas oublier que la caractéristique principale de la télévision, c’est le long terme ; du moins est-ce la règle générale, mettons de côté les annulations intempestives pour les besoins de la démonstration.
Donc, on s’invite non pas 1 fois 1h30, mais 15 ou 20 fois 1h00 dans la vie du spectateur chaque année. Dans l’esprit de celui-ci, il n’y a plus du tout de différence entre le personnage et l’acteur. L’un est nécessairement identifié à l’autre (d’où les acteurs qui se font appeler dans la rue par le nom de leur personnage, ou les cris d’orfraie des spectateurs quand un même personnage est recasté pour remplacer son premier interprète, à raison d’ailleurs). Indissociables pendant plusieurs années !

Puis, la série s’arrête. Le spectateur en regarde d’autres. On ne lui rafraîchit plus la mémoire toutes les semaines à la même heure. Petit-à-petit, les personnages ont le droit à l’oubli. L’acteur a le droit de prendre une seconde peau. Lentement, très lentement. Surtout ne rien brusquer ! Attendre encore. Faire autre chose. Ne pas raviver le souvenir. Tout changer, ou tout faire ailleurs.
Et là, seulement là : revenir.

C’est à ce seul prix qu’une série avec le casting de la trempe de Brothers & Sisters (que Parenthood, dans la configuration de cast, me rappelle beaucoup) peut réussir à ne pas éveiller chez le spectateur un lourd sentiment de « ah non, pas encore ?! ». Avec la technique « Richard Dean Anderson », et une saine dose de visages inconnus (ingrédient que Parenthood ne me donne même pas l’impression d’avoir).

J’ai un mauvais pressentiment sur cette série, et je ne souhaite que de me tromper.
Mais je suis désolée, pour Lauren Graham, et pire encore, pour Peter Krause, il n’y pas encore prescription.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Parenthood de SeriesLive.

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