Ah, la famille ! On y revient toujours. Dans le fond c’est forcément là que ça a commencé.
D’ailleurs, c’est vrai : la fiction japonaise, c’est quasiment par les comédies familiales que ça a commencé. Le genre home dorama a été lancé avant bien d’autres, dés les débuts de la télévision nippone, avec une particularité qu’on appelle le kitchen sink, c’est-à-dire que tout se passe dans la cuisine (à l’époque c’était techniquement plus pratique d’avoir un seul décor, et ça permettait des histoires entre belle-mère et bru qui tentent de cohabiter, les histoires de belle-doche c’est universel !). Les Japonais, qui décidément ont tant en commun avec nos amis iliens les Britanniques qui en avaient fait leur marotte télévisuelle aussi, ont lancé ce type de dorama avant même les histoires d’amour et autres triangles impossibles, dans les années 50, en même temps que les séries d’enquêtes (les deux étant au tout début filmés en direct).
C’était le paragraphe à peu près instructif du jour.
Donc, fort d’une longue tradition de home dorama, le Japon se doit d’en créer encore de temps à autres, histoire de ne pas perdre la main, et c’est toujours ça que ces saloperies d’adolescents n’auront pas. Aujourd’hui le genre est largement moins en vogue, ou alors on le transforme pour le mettre au goût du jour, genre Oniyome Nikki, et les home dorama typiques ont quasiment tous disparu.
Tous ? Non ! Car la chaîne TV Asahi résiste… en même temps c’est vrai que c’est la même chaîne qui a plus ou moins abandonné l’idée de s’adresser à une clientèle qui ne sait pas servir de Fixodent. M’enfin quand même.
Alors laissez-moi vous présenter Oishii Gohan (délicieux riz/délicieux repas), une série que pour tout vous dire, j’ai regardée parce que je le pouvais, sans lire une seule ligne à son sujet. J’ai vu le nombre de cagoules actives, j’ai foncé, des fois c’est aussi simple que ça, et on a vu récemment que ça me faisait de bonnes comme de mauvaises surprises. Aujourd’hui, c’est une bonne surprise, c’est indiscutable.
Il s’agit de l’histoire d’une famille qui, 15 ans après une brouille qui les a séparés (et dont on ne nous dit pas l’objet), se retrouve à cohabiter à nouveau dans la même maison. Le personnage-phare en est le patriarche, un homme dur et pas très avenant qui tient un magasin de riz dans une ville assez traditionnelle et conservatrice, et qui y travaille seul avec son employé dévoué, la maison étant par ailleurs entièrement vide. Mais lorsque pépé commence à avoir des ennuis de santé, l’employé Gorou va demander au fils de la famille, Shinpei, un écrivain tokyoite entre deux emplois dirons-nous, de bien vouloir tenir le magasin pendant que le vieux est à l’hôpital. Sauf que d’une part, pépé n’est pas au courant, et d’autre part, le fiston jure que dés que son père est sur pied, il retourne à Tokyo sans même le voir.
N’importe qui à ce stade aura deviné que ça ne va pas tout-à-fait se passer comme ça.
Mais tout cela est vu avec le regard de la femme de Shinpei, Tae, qui n’a jamais su pourquoi la famille s’était disloquée 15 ans en arrière et qui essaye de rabibocher père et fils, ce qui donne beaucoup de fraîcheur à cette comédie familiale.
Deux choses.
D’abord, il faut avouer que Tae est adorable. Elle donne l’impression de vrombir dans tous les sens avec bonne humeur. On sent déjà dés sa première scène que sa relation à son fils (le petit Shouta) est pleine de complicité et de tendresse, mais de toutes façons on verra ensuite qu’elle est toujours agréable à vivre (sauf quand elle cuisine où là, c’est un bourreau qui s’ignore), qu’elle est pleine de vie, et franchement, un personnage si positif, c’est un bonheur.
Ensuite, ce qui est vraiment génial, c’est que si chacun a fait sa vie de son côté, la génération de Shinpei est pétillante à voir interagir : il y a la fille aînée, Madoka, qui a la langue bien pendue, Shinpei donc, l’auteur au chômage (« j’avais trouvé une super idée mais c’est quelqu’un d’autre qui écrit le livre »), et enfin Kaede, la frangine gothique. On sent que même si leurs rapports sont distendus, en tous cas ils ne se sont pas perdus de vue. Lorsqu’ils réinvestissent la maison familiale pendant que leur père est à l’hôpital, on s’amuse de les voir tous ensemble, à la fois en train de ressortir quelques vieux souvenirs comme s’ils essayaient de se raccrocher à quelque chose qui n’est plus, et en même temps prendre du plaisir à passer du temps ensemble sans se soucier de rien. Il y avait pendant la scène du déjeuner dans la maison (un déjeuner improvisé) une atmosphère vivante qui donnait l’impression qu’on avait atterri au milieu d’une vraie famille.
Et enfin, la petite famille évolue dans une maison splendide (un jour je vais finir par ouvrir un album pour les captures des logements les plus chouette, ça vous tenterait ?), et ils passent leur temps à parler de vieilles chansons des années 70 et de nourriture (quand ce n’est pas l’avaler tout court). En même temps, quand on vend du riz, c’est normal quelque part, mais vraiment, ça m’a donné envie, tout ça.
Bon d’accord, ça fait trois. Mais de vous à moi, quand une série s’appelle Oishii Gohan (avec une ambiguïté sur le sens du mot gohan puisqu’il veut aussi bien dire riz que repas ; culturellement ça a du sens, je ne vous fais pas un dessin), il va nécessairement y être question de riz et de bouffe. Et là, comment vous dire ? J’étais assise face à l’écran et mon chat, assis à mes pieds, jouait avec ma langue.
Hm ? Quoi ? Non, vraiment ? Bon, d’accord, puisque vous insistez, je vous fais des captures.
Faaaaaaaim.
Bon, donc voilà, Oishii Gohan, c’est l’essence-même des repas de famille, des rires, des disputes, des vieux dossiers, et de la bouffe. J’ai regardé ce pilote en ayant l’impression d’assister à un Brothers & Sisters, mais en moins pété de thunes, quelque part, plus humble. Les comparaisons avec la série américaine ne s’arrêtent d’ailleurs pas là, mais je vais pas tout vous spoiler non plus.
Sans compter un truc qui me plaît énormément, c’est qu’à chaque épisode, on nous ressort une vieille chanson que la famille écoutait quand tout allait bien, et alors croyez-moi, ces chansons japonaises qui ont entre une et deux décennies, c’est du bonheur en barres. Je sais qu’on n’est pas nombreux en Occident à en raffoler, mais personnellement j’adore ça, et même moi qui n’en écoutait pas il y a 20 ans (même pas il y a 5 !), ça me rend toute joyeuse et nostalgique de voir ça, surtout que la famille déconne en écoutant les vieux vinyles, et que ça participe énormément à l’ambiance de la maisonnée.
D’ailleurs le titre de chaque épisode de la série fait référence à un plat familial et une chanson rétro, ça vous donne tout de suite le ton.
Donc maintenant que je vous ai fait pareille présentation, où je vous ai pour ainsi dire vendu un autre Lunch no Joou à découvrir, quand même, écoutez, c’est bien simple, si ce post-là, il ne vous met pas l’eau à la bouche, alors je rends mon tablier et je me mets à reviewer un par un tous les épisodes de The Beautiful Life cette saison.
Soyez chics, les gars, me laissez pas tomber sur ce coup.
Juste par pur plaisir sadique (et pour ne pas avoir à regarder), ça ne me met pas l’eau à la bouche du tout… *siffle*
Non, mais si, ça n’a pas l’air mauvais les captures !