Voici un article qui était prévu pour une autre publication, mais après un impair involontaire mais bien impardonnable de ma part, ça n’aura pas lieu. Je vous l’offre donc, j’aime pas laisser perdre…
Vous vous souvenez quand John Carter est arrivé aux Urgences, avec son menton imberbe, ses grands yeux et son envie de compatir avec les malades (ce qui le rendait souvent hermétique aux enseignements du dur Benton) ? Eh bien je soupçonne que l’inspiration derrière ce personnage se trouve en Doogie Howser, médecin de son état, et plus jeune d’environ une dizaine d’années.
Car si Dr Doogie apparait comme un drama médical, il est avant tout l’objet d’un parcours initiatique.
Doogie, c’est cet ado de 16 ans qui, dés le pilote, ne trouve rien de mieux à faire que sauver une vie au lieu de passer son permis… Il est comme ça, Doogie. La série repose évidemment sur ce paradoxe fort pratique (un petit surdoué qui évolue dans un monde d’adultes) afin de détricoter le passage à l’état adulte pour le jeu garçon pris entre deux feux.
Pour cette petite expérience scientifique, je vais avoir besoin d’un blondinet intelligent et sensible, d’une profession réputée pas facile, et d’un cobaye-témoin en la personne d’un ado lambda.
Car l’impact des expériences de notre héros en milieu médical se mesure immédiatement grâce au meilleur ami de Doogie, Vinnie. En fréquentant toujours son meilleur ami (pour des raisons certes obscures, mais qui suis-je pour vous faire une leçon sur l’amitié ?), Doogie garde donc un repère et peut prendre l’ampleur du chemin parcouru, grâce aux réactions de son ami escaladeur de fenêtres. C’est bien simple, si Doogie avait un ange d’épaule et un diable d’épaule, Vinnie incarnerait plutôt le second… et lorsque notre jeune médecin rencontre des problèmes sur son lieu de travail, il trouve rarement en Vinnie l’éclairage et les conseils qu’il aura réellement envie de suivre. Heureusement, c’est là qu’intervient un autre personnage très important de la série (et souvent sous-estimé ou réduit à un simple gimmick), le journal intime ! Doogie y consigne en effet hebdomadairement ce qu’il a appris… de la vie.
En effet, il ne s’agit pas pour lui d’apprendre son métier : il ne nous est laissé aucun doute sur le fait que notre bon docteur Doogie est compétent et capable sur un plan strictement médical. Ce qu’il doit apprendre, c’est en fait tout le reste : gérer ses relations professionnelles, son approche des patients (il manque souvent de distance ; et cela peut alors avoir de bons comme de mauvais côtés), ses histoires de coeur et, du moins l’espère-t-il parfois, ses histoires de sexe. Sur ces choses-là, il est évidemment comme n’importe quel personnage adolescent, à savoir peu sûr de lui et tâtonnant. Et l’ordinateur, épisode après épisode, est là pour attester des progrès que notre tête d’ampoule préférée fera en la matière.
A travers son médecin compétent mais d’une grande innocence, Dr Doogie fait plus que transposer des intrigues adolescentes en milieu médical. Il s’agit ici de poser des questions (qui fâchent, parfois) sur la relation médecin/patient, sur le poids de ce métier et la façon de le porter en préservant autant que possible son humanité. C’est grâce à l’éducation progressive de son protagoniste éponyme que la série nous éduque, non pas sur les actes de médecine (comme de trop nombreuses séries médicales), mais sur la façon de les pratiquer.
C’est vraiment dommage pour la publication en question, car si le titre est mauvais, l’article est excellent…