On dit souvent combien Hollywood est un milieu hypocrite. C’est la loi du milieu qui veut ça : on se tape amicalement dans le dos devant les caméras à un press junket, on applaudit avec un large sourire aux Emmys, et ensuite on vitupère dans le dos les uns des autres. Mais aujourd’hui, on en a une nouvelle preuve flagrante : Dan Glickman se fend de déclarations, à l’occasion d’une quelconque manifestation, à propos du téléchargement. Pourquoi payer plus d’attention à ce qu’il dit qu’aux propos de n’importe quel autre clampin ? Eh bien, ce bon vieux Danny est quand même un peu le président de la MPAA, la Motion Picture Association of America, autrement dit le chasseur de pirates le plus célèbre au monde.
Bon alors, que nous dit Danny aujourd’hui ? « La crise économique rend [le problème du piratage] bien plus sérieux que par le passé ».
Danny vient-il de débarquer dans notre réalité ? Pas du tout, il vient juste d’expliciter une donnée du problème du téléchargement qui était jusque là reconnue par tout le monde, sauf l’industrie concernée au premier chef : la question économique. Comme quoi, ce n’est pas simplement une histoire de vilains pirates inconséquents, finalement, le téléchargement a bel et bien des motivations plus profondes…
Je ne vais pas vous parler du prix aberrant des albums (surtout vu la politique absurde de sorties de la plupart des Artistes occidentaux), ce n’est évidemment pas le sujet de ce blog. Je ne vais pas évoquer le problème du prix exorbitant d’UNE place de cinéma (avec laquelle on peut en général se nourrir pendant deux jours), parce que le cinéma, je veux bien faire des efforts mais faut pas abuser non plus. Non, je vais vous parler du prix grotesque d’un coffret DVD de série, en toute logique.
Ou plutôt non, je ne vais pas vous en parler, vous savez comme moi ce que ça coûte : les tarifs en vigueur vont du bras au rein, selon la popularité de la série, le nombre d’épisodes dans la saison et l’éditeur (ainsi que le sens du vent, l’âge du capitaine et le nombre de barreaux de chaise). Signalons quand même un certain nombre d’abus, certes, en diminution, mais quand même bien d’actualité, à l’instar des saisons découpées en deux coffret, chacun vendu au tarif de ce que devrait coûter une saison complète, ou encore la manie de rééditer encore et encore certains « classiques » (j’ai pas dit culte, je suis perchée !) avec un tout petit plus produit qui justifie bizarrement l’ajout de 5€ sur la facture.
Et à côté de ça, le pépère nous sort : « Bah ouais, c’est cher, les gens vont pas avoir les moyens ».
Nan mais, attention, hein, je ne critique pas Danny sur ce coup ; il a raison de le dire, on n’aura jamais attendu que plusieurs années que les grands manitous de l’industrie comprennent le problème.
Non, je critique Danny sur autre chose : la méthode. Parce que la continuité logique, pour Danny, qui est un peu mou du bulbe mais peut-on le lui reprocher vu qu’il travaille dans le cinéma, c’est qu’il faut… accrochez-vous au pinceau, il retire l’échelle… PROTEGER LES DROITS DE LA PROPRIETE INTELLECTUELLE. Bah ! C’est évident pourtant, parce que :
– jusque là personne ne s’en était occupé
– si les gens n’achètent pas, c’est forcément leur faute, pas celle de l’industrie concernée
– si les gens n’ont pas les moyens d’acheter, on va les forcer
Tant de cohérence, ça me fascine.
Tout le monde se serre la ceinture, et Chéri Bibi, lui, tout ce qu’il trouve à dire, c’est qu’il va falloir renforcer les dispositifs légaux ! Parce que, oui, baisser les prix, s’adapter au contexte économique, que ce soit bien clair, IL N’EN EST PAS QUESTION ! Nan mais, vous avez cru quoi ? Que manger, payer votre loyer et votre essence, c’était plus important que de regarder des divertissements légalement ? Mais vous vivez dans quel monde, au juste ? N’importe quoi, vous, vraiment… heureusement que Danny a la tête sur les épaules, lui.
Juste pour rire, je vous en remets une louche en complément. Bon, c’est pas tant applicable à la série télé qu’au cinéma, mais ça fait marrer un brin quand même.
Sur les centaines de films américains sortant chaque année sur le marché, « pas plus de 20 sont autorisés dans les cinémas chinois » a indiqué notre comique en herbe. « Ceci alimente le marché noir », qu’il nous dit. Du coup, il préconise que les films américains bénéficient d’un meilleur accès dans les pays du monde les plus peuplés, estimant que cela permettrait aux studios américains d’investir plus d’argent dans l’économie locale. (source : AFP)
Traduction parce que c’est le matin et que tout le monde n’est pas forcément réveillé : « Les sous c’est comme les milk shakes à la fraise : on n’en a jamais assez ». Apparemment, Danny Boy n’a pas pensé un seul instant que ça pouvait aider l’industrie du cinéma, cette politique, mais… celle de Chine. Non, il s’en fout Danny, il est de la MPAA pour America, pas pour China ! Hé. Gé. Mo. Nie ! Mo. No. Po. Le ! Enfin, quoi, il faut vous le dire en chinois ?
Bon, allez, je retourne bosser moi. C’est pas le tout, mais si je veux être rentrée suffisamment tôt aujourd’hui, et voir le dernier épisode en date de Pushing Daisies qui, à l’heure qu’il est, m’attend bien au chaud…
Hm ? Moui Danny, je pense à toi, te bile pas, copain. D’ailleurs, on va en reparler, de la crise, t’inquiète…
Ah ca fait du bien de lâcher ce qu’on a à la lecture de certaines choses !
Cela dit, effectivement, c’est toujours un peu le même problème, ils ne prennent justement pas le problème dans le bon sens (comme quand on a installé un dispositif anti-piratage sur les cd et qu’on pouvait plus faire grand chose avec… D’ailleurs, ils se sont rendus compte de cette bêtise, ça n’a pas duré bien longtemps).
Concernant les coffrets dvd, j’ai réussi à en mettre quelques-uns de pas trop cher sur la liste au Père-Noël, y’a une certaine amélioration. Comme il y a aussi beaucoup d’injustices (ah les saisons de 13 épisodes de Queer as Folk à 50€ !! Sans bonus… Ca donne envie, y’a pas à dire…).
Allez, zeeeen !
Et tu as oublié de parler de la super VOD direct 24h après les USA qui permet de louer une saison à peu près 3 fois plus cher que le DVD que tu devras racheter après pour permettre à ces chers messieurs de l’industrie de rouler en grosse voiture et de faire construire une nouvelle dépendance dans leur grande villa sur la côte…
Manger? Non mais c’est pas important de toute façon, les médias nous le répètent tous, pour être belle, il faut être anorexique, donc l’argent qu’on ne dépense pas en mangeant, on peut le mettre dans des DVDs, non ?