Le sevrage est rude mais comme il est m’est infligé brutalement (en dépit de certains efforts de ma part pour laisser la porte ouverte à la discussion), il va certainement être plus rapide à terme. En une semaine je me dis que j’ai quand même bien progressé, je suis sur la bonne voie pour guérir au plus vite de tout ça. D’accord, je suis en train de me refermer comme une huître, d’accord, je vais devenir distante avec tout le monde, d’accord, le prochain mec qui voudra s’y essayer va en chier parce que je vais être encore plus blindée, mais dans tous les cas c’est mieux que pleurer sur mon sort pendant des mois. Je l’ai dit, je veux pas en repasser par là.
Maintenant que je n’ai (presque) plus que ça à faire, j’emploie beaucoup de mes forces dans ce processus. Je me dis que j’ai une fenêtre de deux semaines environ pour me débarrasser définitivement de tout sentiment envers lui, et que lorsque mon nouveau travail commencera (et ç’a intérêt à se faire comme je le veux parce que sinon je ne réponds plus de moi), je me le serai ôté de la tête et je commencerai une nouvelle phase de ma vie, épurée d’un tas de douleurs et de doutes, et que je pourrai me tourner vers l’avenir, pour une fois. Ca ne peut que me faire le plus grand bien d’avoir un avenir. Ca me changera.
Après tout si lui peut m’ignorer si facilement et sans regret, il faut que j’en sois capable aussi, et il n’y a pas de raison pour que je n’aie pas cette capacité. M’expulser de sa vie semble facile, donc la réciproque doit nécessairement l’être aussi. C’est ce que je me répète. C’est juste une question de volonté. Si je veux vraiment ne pas souffrir longtemps, ne pas attendre d’email ou de coup de fil comme une ado désespérée à laquelle je me fais encore trop penser, si je veux pouvoir être libérée de ma colère aussi, si je veux ne plus me sentir abandonnée et trahie, alors il ne dépend que de moi d’accélérer le mouvement et faire mon maximum pour, à mon tour, le sortir de ma vie. Et de mon coeur dans la mesure du possible.
Evidemment, pour le moment ça mouline encore un peu là-haut. Bah oui, passer son temps à chercher à oublier quelqu’un, c’est quand même encore penser à lui. Mais ça fait partie du processus et ce n’est qu’une question de temps. Je me le suis promis.
A quoi je cogite depuis une semaine ? J’essaye de comprendre pourquoi j’ai tenté d’être toujours la plus claire possible sur mes intentions, mais pourquoi j’ai aussi accepté d’essayer de comprendre, deviner et anticiper ce qu’il voulait, au risque de mal interpréter ou ne pas déchiffrer tout ce qui lui semblait implicitement évident. Il est clair que je n’aurais jamais du accepter un tel fonctionnement dans notre relation, qui ne pouvait que m’induire à me compliquer la vie et accessoirement, à des erreurs d’interprétation qui se sont avérées catastrophiques. J’aurais dû exiger de la clarté moi aussi. J’aurais dû exiger exactement ce que je donnais. Mais encore une fois j’ai cherché à être compréhensive. Je me hais quand je suis comme ça, vous pouvez pas vous imaginer.
Quand je pense que ça faisait des mois qu’il me disait qu’il voulait son propre appart (« mon chez moi »), et qu’en fait ça voulait dire qu’il voulait s’éloigner et prendre du recul sur nous, je me dis que je me suis encore une fois faite piéger (moitié par lui, moitié par moi). Il lui a suffit de prendre un air penaud et de déclarer qu’il était immature pour que je le prenne en pitié et que je fasse la démarche d’analyser toujours ce qu’il faisait et disait, et ainsi il n’a plus jamais eu à se donner le mal de communiquer clairement ce qu’il voulait. Pourquoi j’ai refait exactement cette erreur, ça je voudrais encore bien comprendre. Concrètement, du jour où il m’a dit qu’il voulait son « indépendance », on ne vivait déjà plus la même relation. Pas parce que je voulais absolument qu’on vive ensemble (ça m’aurait bien plu mais c’était pas absolument indispensable dans l’immédiat) mais bien parce qu’à ce moment-là, visiblement, ça voulait dire qu’il voulait prendre de la distance d’avec moi, géographique mais surtout affective. Ca lui semblait évident, mais pas assez pour le formuler ; c’est pas la peine de le lui reprocher, c’est un mec, les mecs n’ont jamais les couilles de dire ce qu’ils pensent, un mec clair sur ses intentions ça n’existe pas. Non je crois que j’en suis à un point où je me reproche surtout d’avoir accepté d’entrer dans sa tête pour son confort, ainsi que d’avoir cru en une relation qui n’existait déjà plus.
Mais ça me passera, c’est une question de volonté, je le répète.
Déjà tout ça porte sur le passé. Pas sur un éventuel futur.
Certes il y a mes régulières démarches pour ne pas être hostile et rester ouverte à des contacts ultérieurs (autant pour lui montrer mes intentions que pour ne pas me laisser gagner par la rancoeur ; je suis bien consciente que du jour où je vais m’autoriser à me laisser gagner par la rancune je deviendrai aigrie, et ça non merci), mais je ne nourris aucun espoir et je sais que c’est définitivement fini. S’il y avait une quelconque espoir, lui aussi aurait fait un geste en mon sens. Or il a opté pour le silence radio, ne rien chercher à arranger, donc autant en faire mon deuil vite fait. Il n’y a pas de futur possible. Ni amical ni rien. Plus jamais. Autant m’y faire. Je sais très bien que lorsqu’on a perdu l’amour de quelqu’un, on ne peut jamais plus y faire quoi que ce soit, et surtout si c’est un homme, parce qu’ils ne font jamais aucun effort de réconciliation.
J’ai passé le reste de mon week end à me prendre la tête sur des CMS clé en main. C’était pas tellement que j’avais envie de tout recommencer à zéro, ni même que je voulais expérimenter Joomla! au cas où j’obtienne cet autre poste où il est utilisé (les deux excuses seraient parfaitement valable mais ce serait pas honnête de dire qu’elles en sont la raison), en fait c’était surtout dicté par la volonté d’essayer d’aller de l’avant par moi-même.
Parce qu’il le faudra bien et qu’il ne veut visiblement plus rien avoir à faire avec moi, il faut que j’élimine tous les aspects de ma vie où il intervenait. Sinon c’est la porte ouverte à tous les regrets et à des salves régulières de larmes dues au manque. C’est pas la peine d’y penser, je veux pas en repasser par là.
Il voulait qu’on s’éloigne ? Je m’en vais à grands pas. Ca fait mal pour le moment, mais c’est normal, dans toute désintox, la première période d’abstinence est la plus dure.