Ce soir je me suis surprise à vouloir regarder par la fenêtre. Cette petite fenêtre dont je n’avais pas ouvert les volets depuis bien longtemps, et qui crystallise mes envies. Au-delà du « jeu », juste ouvrir cette fenêtre sur l’avenir que je me souhaite. Je ne m’y étais plus autorisée depuis bien longtemps.
Et je nous vois, là, devant mes yeux, je vois cette homme que je n’Aime plus mais que je sais que j’aimerai à nouveau, lorsque j’y serai prête, lorsque je serai forte à nouveau, je le vois auprès de moi, je le vois vouloir recommencer.
Au juste, je ne suis pas sûre d’être contente de rêver de tout cela, mais de temps à autres, et tant que je délimite bien de quel côté du chambranle tout cela se passe, ça devrait aller. Je crois que ça ne peut pas me faire de mal si je reste bien dans ces limites. Rêver est une des choses que je faisais depuis toujours, jusqu’à ce que, quelque part au cours de la relation avec Lord T, j’arrête et devienne strictement terre à terre, préoccupée en permanence, soucieuse, geignarde, mélancolique et tout le tralala. Peut-être que cela fait partie des éléments qui jusque là m’avaient fait survivre à mes douleurs précédentes ?
Je me rappelle de l’effroi de ma psy quand j’avais commencé à la voir, quand elle a appris pour mes « jeux ». Je crois que je n’avais jamais vu quelqu’un réagir aussi violemment à l’idée que je puisse rêver, le soir, à une vie meilleure. Elle m’avait exortée à arrêter, je n’avais pas voulu suivre son conseil. Pas tout de suite. Mais le fait est que plus tard, bien plus tard, j’ai tout de même arrêté et même si ce n’est pas entièrement lié, il faut tout de même bien admettre que je ne m’en suis pas porté mieux.
Alors, je vais m’autoriser, de temps à autres, à ouvrir ma fenêtre en grand, en prendre plein les yeux, me laisser irradier par ce qui s’y présente, quoi qu’il s’y présente.
Et si j’ai envie de rêver que Lord T et moi nous reprenons quelque chose dans un avenir pas trop proche, je vais arrêter de m’en empêcher. Une bonne fois pour toute, il faut que j’arrête de tout vouloir rendre sérieux. Il y a tellement de choses sérieuses de par le monde, il faudrait franchement que je le sois un peu moins.
Que je m’autorise à me blottir une dernière nuit dans les bras de Lord T, que je m’autorise à rencontrer un jeune adolescent avec lequel mon seul point commun est notre passion des séries, que je m’autorise à rabrouer ma grand’mère qui se permet un peu trop de choses, que je m’autorise toutes ces petites choses que j’ai passé des mois et des mois à m’interdire, toujours avec la peur au ventre, toujours en me demandant quelles en seraient les conséquences, comment j’allais le gérer, etc… Ai-je pour autant eu des conséquences moins désastreuses ? Ai-je pour autant mieux géré les choses ? Pas vraiment, non !
Certes, je ne serai jamais de ces jeunes femmes insouciantes -je n’ai pas été éduquée pour- mais je peux au moins m’accorder un peu d’air frais de temps à autres. C’est sans doute parce que je ne l’ai pas fait plus tôt que tout a été tellement difficile ces derniers temps. Je n’ai pas su survivre aux épreuves parce que je ne me concentrais que sur elles.
Non, je vais me permettre, de temps à autres, de regarder toutes les choses magnifiques sur lesquelles donne cette fenêtre. Je peux y voir pour le moment une relation puissante et lumineuse. Je veux me concentrer là-dessus quelques heures ce soir, et peut-être même demain.
Et avec un peu de chance, à force, cela deviendra une porte vers ce même paysage.